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dimanche 18 septembre 2011

Discours-bilan du président de la République à Kingakati, réaction du candidat président Vital Kamerhe


Dans un discours prononcé le mercredi 14 septembre 2011 dans sa ferme de Kingakati devant un parterre de cadres et militants du Pprd et de la Mp, le Président de la République, Monsieur Joseph Kabila Kabange, s’est livré à un exercice qui interpelle nos populations, à bien de titres, tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme
De prime abord, il est important, dans le contexte pré-électoral du moment, de s’interroger sur la qualité de l’intervenant dans cette communication. Il faut en effet éviter la confusion  des genres et l’amalgame qui profiteraient d’un dédoublement fonctionnel dangereux pour la République, pour la démocratie et pour le processus électoral en cours. Dédoublement entre la qualité de Président de la République, Chef de l’Etat en exercice, et la qualité de Candidat-Président de la République, Chef de l’Etat sortant. En d’autres termes, chacun et chacune de nos compatriotes devraient pouvoir savoir si le bilan présenté en toute responsabilité par Monsieur le Président de la République est destiné à la consommation nationale ou plutôt à la consommation partisane et électoraliste, et s’il a été le fait du Chef de l’Etat en exercice ou du Chef de l’Etat sortant, Candidat-Président.
Je me refuse à croire que ce discours est celui du Président de la République, Président de tous les Congolais et de toutes les Congolaises. D’ailleurs, il s’adresse à environ trois milles « militantes et militants de la renaissance du Congo », réunis dans une concession privée. En effet, le lieu, le cadre et l’ambiance partisans dans lesquels ce discours est intervenu ne conviennent  pas aux institutions de la 3ème  République. Ils rappellent, à ne pas s’y tromper, le modèle de communication du défunt Mpr-Parti-Etat. Encore que, à sa décharge, ce dernier se justifiait dans le contexte institutionnel monolithique d’alors. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Au regard des pratiques républicaines et démocratiques saines, ce genre d’exercice est organisé par la Constitution. Je pense notamment aux messages faits à la nation, aux Chambres du Parlement et aux discours sur l’état de la Nation.
En agissant de cette façon, le Président de la République s’est délibérément mis en marge des traditions républicaines et démocratiques. En fait, il a  ainsi confirmé les pratiques d’un pouvoir caractérisé par une gouvernance formelle et des gouvernances de l’informel. De là, à imaginer un Etat officiel et un Etat parallèle, il n’y a qu’un pas, du reste facile à franchir.
A l’évidence, le discours est celui d’un Candidat-Président qui, drapé de sa toge de Magistrat Suprême, utilise le registre officiel pour entrer de façon peu élégante en campagne, en présentant non pas le bilan de la mandature actuelle mais celui de ses dix années d’exercice du pouvoir au sommet de l’Etat.
Ce qui étonne, c’est que le Président ait choisi de s’adresser à la nation, en sa qualité d’ « autorité morale de la Mp » à travers une assemblée de partisans et de militants – Pprd et Mp – qui l’ont certes investi candidat, mais qu’il a aussitôt après, d’une certaine manière, désavouée en se présentant comme « candidat indépendant » après avoir pris acte de son investiture par elle. On a voulu justifier ce tour de passe-passe en avançant que, comme Président sortant, il demeure Président de tous les Congolais et de toutes les Congolaises et on en déduit abusivement qu’il ne pourrait qu’être le Candidat de tous les Congolais. Ce raisonnement est de nature à rompre tout équilibre entre candidats. Qu’en est-il alors des autres, car la Céni a retenu 11 candidats qui doivent tous attendre le choix du souverain primaire à l’issue du scrutin du  28 novembre 2011 ?
Il convient sur ce point d’attirer dès maintenant l’attention de la Ceni et du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication sur ces violations subtiles de la loi électorale en faveur d’un Candidat qui ne se prive pas d’utiliser à des fins partisanes et de propagande électorale les moyens de l’Etat. Il suffit de voir les affiches déployées sur nos places publiques et privées, ainsi que les banderoles le long des principales artères de la capitale et des autres villes du pays, ou encore de noter que des gouverneurs de province encore en exercice sont désignés comme directeurs de campagne au niveau provincial. Il faut que ces deux institutions veillent à ce que tous les candidats soient placés dans les mêmes conditions, conformément à la loi électorale.
Enfin, il n’est pas sans signification de relever que, s’agissant de la méthode à laquelle le Président-Candidat fait recours pour établir la comptabilité de sa gestion, elle se fonde également sur l’un des modèles les plus écurés du Mpr-Parti-Etat. Ainsi, de la même manière que la dictature, pour se légitimer, a développé la méthode de « la révolution-comparaison » en falsifiant au besoin les données objectives de l’histoire et de l’économie, le Président-Candidat opère à partir d’un point de départ ou d’un « bilan d’ouverture » de « quarante ans de gestion qui ont précédé la victoire du peuple conduit par l’Afdl sur la dictature », en modelant les statistiques sur les affirmations qu’il entend faire accréditer.  Il s’ensuit que le fond du discours est rempli de contradictions, d’erreurs, de contre-vérités, voire de manipulations des données de l’observation.
Sur le fond
Au plan économique
Il n’est un secret pour personne que l’économie de la Rdc est l’une des économies les moins compétitives d’Afrique, qu’elle fait partie des Pays les moins avancés et qu’elle est classée parmi les 10 pays les plus pauvres de la planète.
Bien que le pays soit pourvu d’immenses ressources naturelles, le niveau de vie de sa population est parmi les plus bas du monde. Il ressort du classement annuel de l’Indice du Développement Humain - IDH - du Pnud publié en 2009  que la RDC compte parmi les trois pays où le niveau de vie régresse.
Sur la maîtrise de l’inflation, le Président de la République est contredit par les chiffres avancés par la CIAfactsbooks qui place la Rdc à la 119e place au monde, avec un taux d’inflation de 26,2 %.
Comment peut-on être fier d’une telle place alors que nous avons un pays qui a vocation à jouer le premier rôle ?
En outre, selon la Banque Mondiale, la Rdc occupe la 178e position, c’est-à-dire, la dernière place sur la liste de tous les pays classés d’après leurs capacités à offrir un bon climat d’affaires.
Il est bon de fustiger la gestion passée qui avait conduit à la faillite de la grande Gecamines avec toutes les conséquences qui en ont découlées. Le chef de l’Etat aurait dû ajouter que depuis son accession au pouvoir, l’Etat a non seulement aliéné une majorité de ses parts dans le capital de cette entreprise, mais qu’en plus, les réserves minières qui valorisaient encore le patrimoine de la Gecamines, ont été vendues sans que les Congolais en général, et les Katangais en particulier, ne sachent ce à quoi a servi le produit de cette vente. Aujourd’hui, après avoir épuisé le parc immobilier de la Gecamines, le pouvoir s’attaque à celui de la Sncc, de l’ex-Onatra, et même de la Snel, dans des opérations qui s’apparentent visiblement à des actions de décapitalisation frauduleuse desdites entreprises.
Alors, de quelle économie parle le Président de la République ?
S’agissant des infrastructures, il est étonnant de voir le Président de la république se vanter de la réhabilitation de quelques routes dans la capitale.

Pour  un pays aussi vaste - 2.345.000 km2 -, les infrastructures jouent, certes,  un rôle majeur. La situation du système des transports en République Démocratique du Congo est désastreuse.  La réalité dans ce secteur se traduit par une insuffisance totale de l’offre des services de transports, accentuée par le mauvais état des infrastructures de transport et par une non-satisfaction chronique de la demande.
Le boulevard du 30 juin existe depuis l’époque coloniale, que l’on y ajoute des bandes ne change en rien les conditions de vie de l’habitant de Ngandajika, de l’habitant de Shabunda, de l’habitant d’Aru ou de Bongandanga. Cela n’a aucun effet pour l’habitant de Masina, dès lors, je confirme monsieur le Président de la République, qu’il n’existe pas de transports en commun organisé. Ces routes sont construites et réhabilitées pour ceux qui ont des voitures  pour y circuler !
Parce qu’il a juré d’être transparent avec nous dans son discours du 8 décembre 2010, le Président de la République aurait été complet en nous disant comment l’appel d’offres ou les différents appels d’offres, avaient été lancés pour la construction de toutes ces  routes. 
Il s’agit dans cet exercice d’évaluation, des données indispensables pour établir la rationalité des choix opérés, parce que je refuse d’accepter, que l’élargissement  d’une route - d’une dizaine de kilomètres de longueur - qui part de l’échangeur de Limete jusqu’à l’aéroport de N’djili, pour ceux qui connaissent Kinshasa, et qui existait  déjà, puisse coûter 180 millions de $ ! Si ces 180 millions de dollars américains, avaient été affectés à la réhabilitation des écoles construites à l’époque coloniale - nous parlons des lycées, collèges et athénées -, toutes les écoles secondaires de la République Démocratique du Congo auraient été modernisées !
Dans le même ordre d’idées, le montant dépensé sur le boulevard du 30 juin, de 80 millions de dollars américains pour 5 km de longueur et 28 m de largeur pour la 1ère tranche ne constitue pas non plus un choix rationnel.  Il s’agit d’un investissement tape à l’œil sans aucune incidence sur le vécu quotidien des Kinois dans la mesure où ils continuent à y affronter les embouteillages. Le même montant ajouté aux 29 millions de dollars américains gaspillés pour l’agrandissement  du boulevard Triomphal sur 1 km et demi, sans aucun effet induit, suffiraient à la remise en l’état, à travers le pays, de tous les hôpitaux de référence qui datent de l’époque coloniale.
Il y a manifestement une mauvaise affectation des ressources de la République.
Comment  la communication du Président de la République ne peut-elle pas discerner ce qui est en cours de réhabilitation et ce qui a été réhabilité, donc comptabilisable à son actif, de ce qui n’existe encore qu’en projet ? Parce qu’il dit et je cite : « il en est de même de la réhabilitation des ports de Matadi, de Mbandaka, de Kalemie, de Kisangani, de Kalundu et d’Ilebo, ainsi que celle, en vue de leur modernisation, des aéroports de N’djili, de Goma, de la Luano, de Kisangani, de Moanda ; de Kolwezi et de Kavumu qui a démarré ou va bientôt l’être ». Je vous  laisse apprécier la précision.
Le Président de la République informe l’opinion qu’il va nous livrer, comme toujours, bientôt, l’hôpital du Cinquantenaire. A qui va-t-il le livrer ? Quelqu’un qui est à Bondo, en province orientale, quelqu’un qui est à Kolwezi au Katanga, qu’est-ce que cela veut dire pour lui l’hôpital du cinquantenaire ? Les 100 millions de dollars américains dépensés pour  les travaux de finition de l’hôpital du cinquantenaire auraient permis de réhabiliter tous les hôpitaux de la Gecamines, de la Sncc, de la Miba, de Kilo-Moto, l’hôpital Mama Yemo, les Cliniques universitaires,…… les hôpitaux existent mais sont dans un état de délabrement avancé. Les 100 millions de dollars américains pourraient aussi suffire  à améliorer les conditions de travail des médecins, des infirmiers et de tous les personnels des hôpitaux.
Dans son propos de Kingakati, le Président de la République met à son actif la réhabilitation de la route Kinshasa-Matadi.  Je voudrais, ici, rappeler que cette route avait été réhabilitée au moins trois fois pendant la 2ème République et que sa dernière remise en état, date de la période de la Transition de 1+4.
Pour la route Kisangani-Nyanya-Beni, nous devons avoir l’honnêteté de reconnaitre que les travaux avaient été financés dans le cadre de Pmurr depuis le régime 1+4. Celle reliant Kinshasa à Kikwit a été  réhabilitée grâce à la coopération avec l’Union européenne et la Banque mondiale. Ces deux routes n’entrent donc pas dans le programme de la législature qui s’achève, et ne relèvent pas du financement des conventions dites « contrats chinois ».
Pour une meilleure évaluation, le Président de la République aurait été mieux inspiré en rappelant à l’opinion les prévisions en matière d’infrastructures, notamment les routes.  Combien de kilomètres des routes bitumées, en terre battue, de desserte agricole, devaient être construits ?  Combien l’ont été effectivement ?  Quel est le pourcentage de réalisation avant de proclamer la réussite de son œuvre ?
Sur le plan social, l’opinion se souviendra que l’année 2010 avait été décrétée « Année du social ».
Le bilan est catastrophique et tout le monde le sait, parce que le Président de la République lui-même l’avait reconnu devant les 2 chambres réunies en congrès le 8 décembre 2010. Il est donc surprenant d’entendre le Président de la République nous tenir, neuf mois après, un discours diamétralement opposé !
Les contre-vérités et les erreurs  reprises dans le message de Kingakati ne peuvent pas nous laisser indifférents.  Que cela soit couché dans le discours du Président de la République, qu’il le répète devant les caméras et qu’il se trompe, non pas d’un chiffre, non pas de la moitié, non pas du double, … mais qu’il nous annonce que les magistrats touchent 1.600 dollars américains alors que ces derniers gagnent 485.000 FC soit près de 500 dollars américains ; cela est impardonnable !
Vous pouvez vous imaginer les problèmes dans les foyers des magistrats et les réactions de leurs bailleurs qui vont certainement réajuster les loyers en conséquence.
Les professeurs d’université ; les professeurs ordinaires perçoivent 1.200.000 Fc, soit l’équivalent de 1.300 dollars américains et non 2.200 dollars américains comme annoncé à Kingakati.   Et l’université, pour l’information du public et du Président de la République, n’est pas constituée que de professeurs ordinaires. Il y a les professeurs ordinaires, il y a les professeurs, il y a les professeurs associés, il y a les chefs de travaux, il y a l’assistant deuxième mandat, il y a l’assistant premier mandat,  et il y a les assistants de recherche et les personnels administratifs. Qu’en est-il de tout ce monde ? 
L’université, ce sont aussi les étudiants.  Le Président de la République sait-il que les étudiants sont confrontés à des conditions infra humaines ?  Souvent issus de familles modestes, les étudiants sont livrés à eux-mêmes, sans bourse, sans transport, sans logement, sans restauration, sans bibliothèque et sans auditoires.  Sait-il - le Président de la République - qu’il y a des universités et des instituts supérieurs qui n’existent que sur papier, et d’autres qui fonctionnent dans des bâtiments abandonnés et ou inachevés ?
Sur ce même chapitre, le Président de la République devait savoir que l’université, c’est aussi le programme et les équipements modernes.  L’université et la recherche scientifique, c’est toute une vision pour l’avenir du pays.
Sait-il - le Président de la République - que dans le dernier classement des universités africaines paru dans Jeune Afrique, aucune université congolaise ne figure parmi les 500 premières ?  Quelle honte pour le pays dont Lovanium, actuellement Unikin ; l’Uoc, actuellement Unilu ; et l’Université protestante de Kisangani, actuellement Unikis ; furent la référence en Afrique noire !
Nous sommes étonnés qu’aucun paragraphe n’ait été consacré à la recherche scientifique !
Dès lors, comment peut-on parler de développement sans penser à réhabiliter les centres de recherche et les chercheurs qui y travaillent ?
L’eau et l’électricité : avant d’aborder ce problème que nous vivons chaque jour à Kinshasa comme à l’intérieur du pays,  je voudrais dire aussi que le Président de la République s’est trompé en déclarant que « le pouvoir d’achat du Congolais s’est amélioré ».  
Quand le Gouvernement se complait dans l’illusion monétaire d’avoir augmenté les salaires sans se soucier du facteur de pondération composé du taux de change à cause de la forte dollarisation de notre économie d’une part, et des prix moyens pratiqués sur le marché d’autre part, j’attire l’attention du Président de la République sur l’inexactitude de sa perception de ce problème : le pouvoir d’achat de tous les Congolais a fortement régressé.
Tenez : il y a 10 ans, quand M. Joseph Kabila remplaçait Mzee Laurent-Désiré Kabila à la tête du pays, le carton de Mpiodi se vendait à 30 dollars américains, et tout le monde s’en souvient ! Aujourd’hui, la ménagère débourse la même somme pour une seule rame de Mpiodi, chaque carton en comptant 3, il lui faut 90 dollars américains pour acquérir ce carton.
Dans le budget 2007, l’huissier avait un salaire de 32.500 FC alors que le dollar s’échangeait à 580 FC, soit plus de 56 dollars américains. Aujourd’hui, en 2011, ce même agent de l’Etat touche mensuellement 35.000 FC, ce qui fait une augmentation nominale de 7,7 % par rapport à 2007. Cependant, le dollar est passé, au cours de la même période, de 580 FC à 920 FC, soit une dépréciation de 58 %.  De ce pourcentage, vous enlevez celui de l’augmentation nominale, c.à.d. 7.7 %, ce fonctionnaire a subi une perte de 50 % de son pouvoir d’achat initial.  En valeur relative, son salaire de 2011 ne vaut en réalité que 28 dollars amércains, c'est-à-dire 50 % de ce qu’il touchait en dollars en 2007.
Comment le Président de la République peut-il nous dire après cette démonstration que le pouvoir d’achat du Congolais s’est amélioré ?
Par ailleurs, les inégalités sont très marquées. Environ 80 % de la population vit en dessous du  seuil de pauvreté, qui est estimé à 2 dollars américains par jour. Près de 44 % de femmes et environ 22 % d’hommes n’ont aucun revenu. Les disparités régionales sont très fortes avec un taux de chômage supérieur à 60 %, chômage qui affecte essentiellement la population active de 18 à 35 ans. Les salaires et les prestations sociales sont dérisoires dans tout le pays.
Je termine cet exercice douloureux en posant la question de savoir :
- qu’en est-il des rémunérations des militaires, des policiers et de tous ceux qui veillent pendant que nous dormons ?  Est-ce qu’on n’est pas en train de nous mettre en danger quelque part ?
Nous voulons aussi aborder l’autre question, peut-être que le Président de la République n’est pas informé, qu’effectivement tous les congolais ont un accès difficile à la nourriture, à l’eau, à l’électricité, aux soins de santé, à l’habitat. La situation s’est d’avantage détérioré qu’il y a cinq ans ! 
En ce qui concerne l’eau et l’électricité, pendant que je m’entretiens avec vous ici à la Gombe, commune qui abrite les sièges de la plupart des institutions nationales et internationales, il n’y a ni eau, ni électricité ! Vous pouvez le vérifier par vous-mêmes, pour ne pas me taxer de démagogue.
Le Président de la République, sait-il qu’à Macampagne, un des quartiers  résidentiels huppés de la capitale, où habite son ministre de l’énergie, les résidents ont commencé à creuser des bornes fontaines pour se procurer de l’eau ? C’est inacceptable !
On peut détester le Président Mobutu Sese Seko, parce que dictateur, mais Kinshasa n’avait jamais atteint ce niveau de pénurie. Dans les hôpitaux comme Mama Yemo et autres, le manque d’eau et d’électricité est à la base de l’augmentation du taux de  mortalité, surtout infantile. Il faudrait que le Président de la République, reconnaisse que son bilan est totalement négatif.
Dans le secteur de la distribution de l’électricité, l’augmentation du taux de desserte de 6 à 9 % qu’avance le Président de la République n’est soutenue par aucun élément probant dans la mesure où le délestage n’épargne aucun quartier de la capitale - y compris le sien -, ni aucune autre ville du pays. Pour certains quartiers de la capitale, il ne s’agit plus de délestage, mais des coupures qui durent trois à six mois.  Dans l’arrière pays, la situation est pire, dans certaines villes, ils n’ont jamais vu le courant ; pour d’autres, ils en gardent des vestiges d’il y a vingt ans.
Sur le plan des droits humains,  je m’attendais à ce que le Président de la République nous dise en sa qualité de magistrat suprême, qu’il va effectivement peser de tout son poids :
-      pour que Floribert Chebeya ait un procès équitable,
-      pour qu’on nous dise ce qu’est devenu le corps de Fidèle Bazana,
-      pour qu’on nous dise qui a tué Armand Ntungulu,
-      pour qu’on nous dise qui est l’auteur du récent assassinat ignoble de l’opérateur économique propriétaire des Ets City 11 à Bukavu,
-      pour qu’on nous dise également le sort réservé aux assassins de tous ces journalistes ;
-      pour qu’on nous dise, quel est le sort réservé, dans un pays qui se dit démocratique, à tous ces détenus d’opinion ;  les Mokia, Kuthino  et bien d’autres qui sont à Makala et dans d’autres prisons, à travers le pays !
En ce  qui concerne la sécurité,
Les habitants de la province orientale, qui continuent à subir les attaques de la LRA et même parfois celles de nos propres soldats, se demandent si le chef de l’Etat a encore la maitrise de la situation sur le terrain.
Bon nombre des habitants du Nord et du Sud Kivu ont dû sursauter en entendant le Président de la République déclarer que « le pays est presqu’entièrement pacifié,…..la région des grands lacs a retrouvé la paix et la stabilité,… » Alors que, non seulement ils vivent sous la psychose de la  peur à cause des opérations d’intégration non achevées, mais font aussi face à plusieurs armées. Chaque minute qui passe, il y a une femme qui est violée. Et Madame Clinton, Secrétaire d’Etat américain, dans sa dernière adresse à l’UA, n’a pas mâché ses mots en plaçant la RDC parmi les 3 pays où la vie des femmes est en danger. La Rdc occupe, en effet la 2ème place après l’Afghanistan.
Malgré les différentes opérations qui ne font que changer des noms, force est de constater que les ex-interahamwe continuent à causer des malheurs au sein de la population congolaise, mais aussi à contrôler les gisements miniers de cassitérite et d’or.
En abordant les problèmes de la réforme de l’armée, de la police et des services de sécurité, et en affirmant que les libertés individuelles sont garanties ; et en citant pour preuves, (1) le retour au pays des dignitaires mobutistes, (2) la participation des tous aux élections,…  ici, il y a une double interrogation : de quelle armée, de quelle police, des quels services de sécurité, parle le Président de la République ?   Sait-il que dans certains coins de la République, il y a des militaires qui se livrent à la production des braises, du bois de chauffe pour survivre, quand ils ne peuvent pas se payer sur la population ?  Sait-il que les enfants des militaires ne sont pas scolarisés ? Qu’ils n’ont pas accès aux soins de santé et à un habitat humainement acceptable ? 
De quelle réforme parle-t-on quand on a une armée qui compte autant de généraux que des colonels, bref, où il y a autant d’officiers que d’hommes des rangs ?  Le chef de l’Etat ignore-t-il que tous les militaires et les policiers commis à la garde des édifices publics doivent rançonner les visiteurs, Congolais comme Expatriés, qui veulent rencontrer les autorités ?  Simplement parce qu’abandonnés à eux-mêmes, ils sont souvent à la recherche des moyens de survie !
Pas plus tard qu’il y a trois jours, la ville de Bukavu était en alerte parce que les militaires avaient tiré.
Nous aurions souhaité entendre le Président de la République dire à l’opinion nationale et internationale ce qui s’est réellement passé dans cette ville. La violence continue à l’Est de la République Démocratique du Congo où l’on viole, on pille, où l’on coupe les routes en toute impunité.
Dans la capitale et dans les autres villes, l’insécurité persiste.  Elle ne saurait  reculer tant qu’on n’aborde pas le vrai problème, celui de la mise en place d’une armée où le militaire sera réellement pris en charge et le policier mis dans des conditions adéquates de travail.
Tolérance Zéro n’a été qu’un leurre.
Le Président de la République a dit que les portes des prisons étaient ouvertes. Depuis le début de cette législature, tous les gestionnaires ont été plébiscités, aucun cas de détournement  n’ayant été relevé, ni sanctionné.
En ce qui concerne la décentralisation, le pays a reculé, le Président de la république ayant repris toutes les prérogatives des assemblées provinciales, y compris celles de révoquer le gouverneur de province.  Nous comprenons que le Président de la République, se soit gêné d’en faire mention, dans son adresse de Kingakati.
Si le Président de la République se déplace la nuit, le pays est vraiment plongé dans le noir.
Monsieur le Président de la République, j’ai entendu : « n’en déplaise à ceux pour qui il fait nuit alors qu’il fait jour»,….
C’est à tomber à la renverse lorsque tout le monde sait que le pays est au propre comme au figuré dans le noir. A mon tour, Monsieur le Président de la République de vous dire, qu’il n’est pas bon de faire croire au Peuple congolais qu’il est en plein jour, alors qu’on l’a plongé dans une nuit qui se prolonge douloureusement. La nuit imposée au peuple congolais, même si elle dure, finira par céder la place à la lumière du jour, et c’est pour bientôt.
Cela ne dépend que du Peuple congolais lui-même, lorsqu’il se sera doté d’un leadership apte à forger son destin.
Mes chers compatriotes,
Nous n’allons pas finir cette adresse sur une note sombre.  Nous allons quand même féliciter le Président de la République, car nous nous rendons du fait qu’il vient de découvrir que le Congo a vocation à devenir très rapidement un pays émergent et à terme un pays développé. Le Président de la République en a parlé dans son discours en mettant en exergue les potentialités immenses dont dispose notre pays.  Ceci a toujours été notre vision quand nous comparons la Rdc au Brésil, et en disant que si le miracle brésilien a pu s’opérer en  8 ans avec le Président Lula, le miracle congolais peut s’opérer en 10 ans avec un leadership responsable.
Le destin d’un peuple, loin d’être un cadeau de quiconque, est tributaire de sa foi en Dieu, en lui-même, et tributaire de son travail.
Lorsque le Seigneur examine la terre afin d’y trouver d’éventuels leaders, il ne cherche pas des Anges incarnés, encore moins des hommes parfaits. Il cherche des hommes et des femmes comme vous et moi, de simples êtres humains faits de chairs et de sang. Mais Il cherche aussi certaines qualités chez eux, celles-là même qu’Il trouva chez David, c’est-à-dire, la spiritualité qui engendre la foi, l’humilité et l’intégrité. Voilà, comment Dieu a sorti David de la bergerie, pour en faire le roi d’Israël. L’humilité c’est la marque des grands, car il n’y a que les grands pour s’humilier. C’est ce que, pour notre part, nous faisons chaque jour, pour arriver à la désignation du candidat commun de l’opposition. C’est dans cet esprit que nous nous sommes rendus ce jour, au siège du Mlc, pour y déposer formellement la lettre de demande de partenariat adressée à mon frère, l’honorable Sénateur Jean-Pierre Bemba Gombo.
Dans cette œuvre de rassemblement de l’opposition, nous voulons adopter la philosophie de Monsieur Deng Xiao Ping qui avait dit que, « pour faire 1.000 mètres, il faut commencer par faire le premier mètre ». C’est la signification de l’acte que nous avons posé à l’adresse du Mlc. Et nous espérons que toutes les autres forces de changement, de Fatima comme de Sultani, vont se joindre à cette initiative pour répondre au vœu longtemps exprimé par notre peuple, celui de nous voir aller aux élections, rangés en ordre de bataille.
Je vous exhorte à ne pas baisser les bras, et à persévérer dans le combat pour l’alternance en vue de l’instauration d’un leadership nouveau.
Je vous remercie.

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