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jeudi 29 septembre 2016

Angèle Makombo : ‘’Où allons-nous en RDC ?

Elle crève l’abcès. Dans une analyse pointue, la Présidente de la LIDEC et Déléguée au Dialogue, reprend, ici, les grandes péripéties de l’histoire récente des événements douloureux qu’a connus la RD. Congo. Elle revient, à sa manière, sur les tentatives de réponse, les ratés et, s’il y a lieu, les rares acquis. Elle fustige, en même temps, le déficit de la participation des femmes dans tous les enjeux. Scrutant l’avenir, devenu flou, à la lumière de tous les tâtonnements, elle se demande où va, finalement, la RDC et son peuple. Sur quels rails veut-on les engager? Très préoccupée, elle place la classe politique congolaise, quelles que soient les tendances ou sensibilités, dans l’obligation de sortir de l’ankylose ou, à la limite, de la politique du cercle vicieux,  et de s’assumer pleinement face à ce qui apparaît, désormais, comme  des vrais défis : le dialogue,  la paix, l’unité du pays, la consolidation de la démocratie et du pluralisme, la protection des libertés individuelles et collectives, le respect des lois et de la Constitution, la tenue des élections transparentes, la reconstruction et le développement. Décidément, Angèle Makombo crie sur le toit  de la maison.
RDC : où allons-nous ?
Année 2015, les 19, 20 et 21 janvier : répression sanglante des manifestations dans plusieurs villes du pays contre le projet de loi électorale censé subordonner la tenue des élections au recensement de la population, et entraîner le report de l’élection présidentielle initialement prévue en novembre 2016. Bilan de cette répression à Kinshasa, selon la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) : 42 morts et de nombreux blessés.  Un jeune militant de notre parti politique, la Ligue des Démocrates Congolais (LIDEC), victime d’une balle perdue dans la commune populaire de Ngaba, fait partie des blessés.
Année 2016, les 19 et 20 septembre, nouvelle répression ! Cette fois-ci, il s’agit de  manifestations du Rassemblement des forces politiques et sociales acquises au changement d’Etienne Tshisekedi, menées à travers le pays pour exiger de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), la convocation du corps électoral pour l’élection présidentielle. Bilan de ces deux jours de violence meurtrière à Kinshasa, selon Human Rights Watch : 44 morts dont 37 personnes tuées par les forces de sécurité, et 7 policiers morts dans les affrontements avec des manifestants; 32 morts selon la Police Nationale Congolaise. A cela, s’ajoutent de nombreux blessés et des dégâts matériels considérables: plusieurs sièges ou bureaux des partis politiques incendiés, des écoles brûlées, des résidences privées et des commerces pillés et saccagés, des véhicules calcinés ou caillassés,
Des morts, encore des morts
Pourquoi faut-il des morts, encore des morts, pour une marche de protestation  politique dans notre pays ? Et,  parmi ces compatriotes innocents qui succombent, nombreux sont ceux qui sont touchés par des balles réelles tirées à bout portant par certains éléments des forces de sécurité. Je voudrais rappeler,  ici,  l’appel pathétique que nous avions  lancé  aux autorités congolaises,  lors d’un meeting politique de notre parti,  le 7 février 2015 à Ngaba, suite aux évènements tragiques de janvier : « Plus jamais ça! », plus jamais des forces de l’ordre tirant à balles réelles sur la population ! Rien n’y fait, les balles continuent à crépiter lorsque les Congolais usent de leur droit constitutionnel de manifester. Les pouvoirs publics ont,  pourtant,  l’obligation de garantir ce droit.
Œil pour œil, dent pour dent
Le 19 septembre 2016  dernier au soir, les sièges ou bureaux de certains partis politiques sont incendiés. Il s’agit du RCD, CNC, ARC, ATD et PPRD. Est-ce un hasard ? Certainement pas. Ces partis ont un point commun : leurs leaders ont accepté de participer au dialogue facilité par Edem Kodjo à la Cité de l’Union africaine à Kinshasa. Le lendemain, c’est œil pour œil, dent pour dent : les sièges de l’UDPS, du MLP, des FONUS et de l’ECIDE sont mis à feu. Ce n’est pas non plus un hasard : ces partis politiques membres du Rassemblement, ne participent pas au dialogue et ont récusé le Facilitateur Edem Kodjo, qu’ils accusent de partialité en faveur du Président Kabila. Ces attaques ciblées contre les partis politiques précités ont donc tout l’air d’une réponse musclée du berger à la bergère.
A la LIDEC, parti politique de l’opposition, nous condamnons fermement toute forme de violence d’où qu’elle vienne et demandons que toute personne coupable d’un acte répréhensible soit sévèrement punie. Nous pleurons nos compatriotes tombés pour défendre la Constitution, mais déplorons la violence aveugle perpétrée par certains jeunes gens manipulés et désorientés. Les meurtres de policiers brûlés vifs, les scènes de pillage, les destructions méchantes auxquelles nous avons assisté ou avons été victimes, ne relevaient pas d’un soulèvement populaire pour la défense de la Constitution mais bien,  du lot d’actes criminels et de vandalisme. Et ces exactions reflètent un manque criant de civisme et d’empathie au sein d’une population congolaise meurtrie, frustrée et appauvrie du fait d’une gouvernance inefficace du pays.
Qui donc conseille le Président Kabila ?
Suite à une telle tragédie, le peuple congolais était en droit de s’attendre à une déclaration télévisée ou radiodiffusée du Chef de l’Etat. Mais qu’avons nous eu à la place ? Après deux jours d’un silence déconcertant, nous avons eu un simple communiqué de la Présidence de la République, signé par le Directeur de cabinet du Président et lu par un journaliste sur la chaîne de télévision nationale dans lequel le Président présente ses condoléances aux familles éprouvées, blâme l’opposition pour les violences et appelle à l’apaisement.  Présenter des condoléances par communiqué? Comment interpréter cela? Qui donc conseille le Chef de l’Etat?
A  qui profite le crime ?
Autre question : à qui profite le crime ? Il n’aura, en effet, échappé à personne que ces deux jours de violence meurtrière ont abouti au blocage persistant du dialogue. Etait-ce l’un des buts poursuivis ? Si oui, c’est hélas réussi! La Commission Episcopale Nationale du Congo (CENCO) a suspendu sa participation au dialogue politique depuis le 20 septembre, pour faire le deuil des personnes tuées et par solidarité avec les familles éprouvées ainsi que le peuple congolais, et pour rechercher un consensus sur l’accord politique censé sanctionner la fin des travaux du dialogue. Les représentants de la société civile et les délégués de l’opposition ont également suspendu leur participation au dialogue pour les mêmes raisons. La CENCO a demandé que certaines exigences soient prises en compte dans le projet d’accord politique élaboré par le Facilitateur notamment, une disposition stipulant que l’actuel Chef de l’Etat, le Président Kabila, ne sera pas candidat à la prochaine élection présidentielle à organiser, dès que possible ; et l’inclusion des dates précises des élections dans l’accord en question.
Le dialogue nécessaire pour baliser la voie à  des élections apaisées
La LIDEC, qui a toujours fait preuve d’une remarquable constance, avait dit « oui » au dialogue, mais pas n’importe lequel (lire mon article intitulé « Un dialogue pour quoi faire ? » paru dans le quotidien kinois La Prospérité du 11 juin 2015). Nous continuons à dire « oui » au dialogue et participons au Dialogue en cours à la Cité de l’Union africaine.  Car «Avec la violence, on s’entretue sans issue. Avec le dialogue, on se  chamaille pour déboucher sur une solution », et parce que « le dialogue est plus que jamais nécessaire pour baliser la voie à des élections apaisées » (Sam Bokolombe Batuli).
Aussi, osons-nous espérer que les consultations en cours pendant la suspension du dialogue permettront de dégager « un consensus le plus large possible qui puisse mener à la tenue d’élections crédibles et transparentes dans les meilleurs délais et dans le respect,  à la fois,  de la Constitution et de la volonté de la population », comme l’a déclaré, le 26 septembre, l’Ambassadeure du Canada en RDC, Ginette Martin, après la rencontre d’un  groupe d’ambassadeurs de l’Union européenne, du Canada et des Etats-Unis accrédités à Kinshasa avec le Facilitateur du dialogue, Edem Kodjo.
Espérons aussi que la récusation d’Edem Kodjo par le Rassemblement sera levée. Car, croire que remplacer le Facilitateur actuel suffirait à relancer le dialogue est un leurre. A cet égard, il convient de rappeler que les hommes politiques congolais ont souvent renié les facilitateurs de nos crises antérieures. Avons-nous oublié ce qu’ils disaient,  par exemple, de l’ancien Président sénégalais Abdoulaye Wade, de l’Algérien Lakhdar Brahimi  ou de l’ancien Président botswanais Ketumile Masire? S’agissant de Said Djinnit, évoqué récemment par Didier Reynders, Vice-Premier Ministre et Ministre belge des Affaires étrangères, on se souviendra que M. Olivier Kamitatu, Président de l’ARC, parti politique membre du G7, avait tweeté  l’an dernier : «La nkurunzization à pas lents de la RDC… Avec Saïd Djinnit en prime! On prend les mêmes et on recommence».

Les femmes congolaises n’ont pas droit au chapitre
Le mot de la fin ? Je suis convaincue que nous n’en serions peut-être pas là si les femmes congolaises avaient droit au chapitre. La crise actuelle en RDC, créée de toutes pièces par des hommes, orchestrée par des hommes, gérée par des hommes, était évitable. Les femmes congolaises ne l’ont pas voulue et n’ont pas recouru à des actes de violence, pour lesquels, d’ailleurs, l’ONU demande une enquête indépendante ; mais lorsque l’on recherche les voies et  moyens pour mettre fin à cette crise, elles sont systématiquement ignorées !
Angèle MAKOMBO


jeudi 22 septembre 2016

Plusieurs journalistes attaqués pendant les troubles de Kinshasa du 19 septembre

Dans une lettre adressée, le jeudi 22 Septembre 2016, au Vice-premier ministre en charge de l’Intérieur et Sécurité nationale, Evariste Boshab, Journaliste en danger (JED) lui a demandé instamment d’ouvrir une enquête urgente pour identifier et sanctionner les responsables des exactions commises contre des journalistes lors des violences qui ont secoué la ville de Kinshasa, les 19 et 20 Septembre 2016.
Dans cette correspondance dont copies ont été réservées notamment au Président de la République, au Premier ministre, au Procureur général de la République ainsi qu’à l’Auditeur général des Forces Armées de la RD Congo (FARDC),  JED rappelle  que dans son bilan des affrontements qui ont opposé des manifestants de l’opposition aux forces de l’ordre, le Vice-ministre a parlé  des personnes tuées ; des bâtiments publics et des écoles brûlés ; des sièges des partis politiques incendiés et des maisons pillées, mais à aucun moment il n’a évoqué des cas de nombreux journalistes et professionnels des médias qui ont été victimes des violences de la part des forces de sécurité alors qu’ils ne faisaient que leur travail. Au total et selon nos informations, près d’une dizaine de journalistes ou professionnels des médias ont été malmenés, attaqués ou interpellés à Kinshasa, dès le premier jour des manifestations, par des éléments de diverses forces de sécurité.
JED a dénoncé vigoureusement cette vague de violence gratuite infligée aux journalistes congolais et étrangers dans l’exercice de leur profession en violation flagrante de la loi garantissant l’exercice de la liberté de la presse en RDC.
A titre illustratif, et au cas où il s’agirait d’une omission involontaire, JED a tenu à porter à la connaissance du Vice-Premier Ministre en charge de l’Intérieur et de la Sécurité nationale les faits suivants :   
1° Sonia Rolley, envoyée spéciale permanente de Radio France Internationale (RFI) en RDC, Edouardo Soteras, journaliste-photographe de l’Agence France Presse (AFP), Dady Songhozo et John Kinkendu, journalistes à TV 5, ont été interpellés, dans la matinée du lundi 19 Septembre 2016 sur le boulevard triomphal loin des endroits où se déroulaient les manifestations, par la Police Militaire (PM). Ils ont été malmenés et conduits au camp Kokolo où ils ont été gardés pendant plusieurs heures et dépouillés de tous leurs biens dont du matériel de travail, de l’argent et des téléphones.
2° Dosta Lutula, journaliste à Canal Congo Télévision (CCTV), chaîne de télévision émettant à Kinshasa, a été arrêté, le 19 Septembre 2016, par des agents de l’ordre non autrement identifiés pendant qu’il était en train de couvrir la manifestation de l’Opposition. Jeté dans une jeep de la police, le journaliste a été conduit au camp militaire Tshatshi où il a été copieusement tabassé avant d’être transféré vers 1 heure du matin au camp Kokolo où il sera également molesté et déshabillé. Dosta Lutula a été libéré le lendemain vers 18 heures. Sa caméra et ses cassettes d’enregistrement ont été confisquées.   
 Kevin Inana, journaliste au quotidien « La Prospérité » a été arrêté au niveau du rond-point des huileries par un groupe de policiers anti-émeutes qui dispersaient les manifestants à coup des balles et gaz lacrymogènes. Kevin Inana a été pourchassé par ces hommes en uniforme qui, après l’avoir rattrapé lui ont demandé de décliner son identité. Brandissant sa carte de presse, le journaliste a été bastonné à coups de matraque à la tête avant d’être projeté sur le sol. Il s’en était tiré avec un bras cassé.
4° Eliezer Thambwe, journaliste-présentateur du magazine «Tokomi wapi», diffusé sur plusieurs chaînes de télévisions de Kinshasa ainsi que son cameraman, Dieumerci Makesela, ont été arrêtés, séparément, le samedi 19 Septembre 2016, par un groupe de policiers au rond-point Victoire, pour le journaliste, et sur l’avenue des Poids-lourds, pour le cameraman, où ils couvraient cette manifestation. Eliezer Thambwe a été relâché quelques temps après tandis que Dieumerci Makesela a été conduit au cachot des services spéciaux de la police où il a été gardé pendant 72 heures. La camera que détenait Dieumerci Makesela a été confisquée avant sa libération. 
Afin que ces actes des violences contre les professionnels des médias ne puissent se reproduire au moment où tout le monde redoute des turbulences politiques majeures en RDC, JED rappelle que c’est du reste, dans cette optique, que les organisations professionnelles des médias ont organisé, en juillet dernier, une Table ronde sur la sécurisation des journalistes en période de crise. A l’issue de cette Table ronde, les professionnels des médias ont proposé la mise en place d’un cadre de concertation entre les médias et les pouvoirs publics en charge de la sécurité, en vue de la prévention des risques encourus par les journalistes en cette période de tension.  


Lambert Mende : « Le Gouvernement congolais surpris d'entendre François Hollande ignorer l'origine et le cheminement événements de la semaine et s’abstenir de la moindre expression de compassion »

Les 19 et 20 septembre 2016, Kinshasa a été le théâtre de violences inouïes consécutives à une tentative délibérée de déstabilisation de l’Etat, perpétré par une frange de l’opposition politique dont quelques partis furent naguère adeptes de la lutte démocratique non violente mais qui semblent s'être radicalisés depuis. On peut présenter comme preuve du refus du consensus de leur part leur boycott actif du dialogue politique national inclusif que certains d'entre eux réclamaient avec insistance il y a encore quelques temps, en plus d’avoir pris part aux pourparlers préparatoires y relatifs. Ce dialogue national se tient pourtant à la Cité de l’UA dans les conditions convenues de commun accord avec eux. Plusieurs partis politiques de la Majorité, de l'opposition et des représentants de la société civile accompagnés par l'Union Africaine et l'ensemble de la Communauté internationale y participent pour débattre de la question électorale dans l'optique d'une solution consensuelle en vue de préserver la RDC et son peuple du chaos.

Force est de constater que pour les initiateurs des désordres des 19 et 20 septembre c’est bien le chaos et rien que le chaos qui était recherché ainsi que l’a avoué l’un d’entre eux dans un entretien du 16 septembre avec l’hebdomadaire Jeune Afrique qui l’a publié le 18 septembre en se référant aux pyromanes de Ouagadougou qui avaient incendié leur parlement comme un modèle à suivre.

Le bilan de ces violences est très lourd car selon les dernières données fournies par la PNC, on a compté pour les deux jours
-     32 morts dont des éléments des forces de police en plein exercice de leurs fonctions, des enfants tués sur la route de l’école ainsi que quelques pilleurs et casseurs ;
-     plusieurs biens tant publics que privés vandalisés objet de destruction méchante ;
-     des propriétés privées pillées.

Au nom du Gouvernement et en mémoire de tous nos compatriotes ainsi fauchés inutilement, parmi lesquels des policiers brûlés vifs dans l'exercice de leur mission, je vous convie à vous lever et à garder une minute de silence. (Merci). Nos sincères condoléances à toutes les familles éplorées.

Mesdames et Messieurs,

Contrairement au sempiternel refrain entendu ici et là au sujet du non respect des droits de l'Homme ou du rétrécissement des espaces démocratiques en RDC, c’est bien dans le cadre de l'exercice légitimement revendiqué et reconnu de la liberté d’expression et de manifestation garanti dans notre pays que ces crimes humainement inacceptables ont été commis. Le Gouvernement congolais, toujours attaché à ces droits et libertés, n'a jamais interdit à quiconque de se faire entendre dans les limites du respect des lois. Tout le monde se souvient qu'il y a à peine quelques semaines, le retour au pays en grande pompe et le meeting du leader d’un regroupement de partis de l’opposition à Kinshasa avaient drainé beaucoup de monde sans que cela ne donne lieu à quelque désordre que ce soit.

C'est fort de ces convictions et suivant les mêmes principes que le regroupement politique "Rassemblement" avait obtenu, après concertations avec les autorités urbaines de Kinshasa, l'autorisation d'organiser une "marche pacifique" pour la remise d’une pétition à la CENI selon un itinéraire et un chronogramme bien précis.

Alors que cette marche était, selon ses organisateurs prévue pour débuter à 12H00, on s’est rendu compte que dès les petites heures du matin, parfois la veille dans quelques quartiers de la ville, elle s’est muée en un mouvement insurrectionnel manifestement prémédité de longue date. Dans un certain nombre de points de la capitale, on a en effet vu débouler de manière coordonnée des bandes d’émeutiers, de pilleurs et de meurtriers. Des appels au saccage des résidences de certains acteurs politiques qui circulaient sur les réseaux sociaux comme des mots de passe en langues lingala et en tshiluba témoignent de cette stratégie virale. Les meurtres de sang froid comme ceux d’une fillette élève à l’Ecole Mwinda, après avoir été violée, parce qu’elle avait osé porter son uniforme d’écolière, d’une dame receveur de bus Newtrans lapidée jusqu’à ce que mort s’ensuive et d’un policier de garde devant la permanence d’un parti de la Majorité dont les émeutiers mettront le feu à son corps. Ces meurtres atroces étaient destinés à terroriser la population de Kinshasa. La mise à sac des sièges des partis politiques prenant part au dialogue, qu’ils soient de la Majorité comme de l’Opposition, la détention et l'utilisation par les émeutiers d'armes et de munitions de guerre, les attaques contre les monuments des pères de l’indépendance Patrice Lumumba et Joseph Kasa-Vubu, la destruction des symboles de l'Etat, notamment les commissariats et sous - commissariats de la police nationale ainsi que les sièges des tribunaux et les écoles donnent à penser à un schéma de coup d’Etat sur lequel la justice ne manquera pas de nous éclairer bientôt.

Devant cette flambée de violence et pour éviter le chaos généralisé, les autorités municipales de la capitale, qui ont réalisé la supercherie de la part de leurs interlocuteurs désormais auteurs intellectuels, moraux et matériels de ces assassinats et autres crimes socio-économiques collatéraux, ont pris la décision salutaire d'interdire cette manifestation dont l'objectif inavoué n'avait plus rien à avoir avec celui déclaré au départ. D’où leur décision de disperser les faux manifestants tout en faisant procéder à l’arrestation de ceux d’entre eux surpris en flagrant délit d’actes criminels.

Tout porte à croire que l’information portée à la connaissance du gouverneur de Kinshasa d’une marche pacifique ayant pour objectif de déposer une pétition à la CENI n'avait été qu'une pure diversion. L’objectif principal des auteurs de cette procédure qui se sont répandus par la suite à travers les médias et réseaux sociaux en des appels délibérés aux actes répréhensibles qui ont endeuillé la ville de Kinshasa semble avoir été de conduire au renversement des institutions de la République et leur remplacement par de nouveaux acteurs suivant un schéma insurrectionnel sous le prétexte de mettre la pression sur les participants au dialogue politique national inclusif qu’ils accusaient de vouloir violer la Constitution de la République.

Leurs atermoiements et leur refus catégorique de prendre part audit dialogue qu’ils n’avaient cessé de réclamer depuis plus de trois ans malgré les invitations réitérées de larges couches de Congolaises et de Congolais ainsi que des  supplications de la communauté internationale sont révélateurs de cette démarche funeste.

Le Gouvernement condamne sans ambages de tels actes de violence. Il est décidé à faire régner l'ordre et encourage fermement le Procureur Général de la République qui a annoncé dès hier sa détermination à arrêter et engager sans désemparer des poursuites judiciaires à l’encontre des auteurs matériels et intellectuels de tous les auteurs de cette flambée de violences qui ne peut en aucune manière être justifiée.

Le Gouvernement se félicite de ce que les deux chefs des délégations, respectivement le ministre  de la Justice Alexis Thambwe Mwamba pour la majorité et le président du parti UNC, Monsieur Vital Kamerhe pour l’opposition les aient condamné sans ambages au nom de tous les participants à ce forum tout en insistant sur le caractère exemplaire des sanctions qui doivent être infligées aux auteurs matériels et intellectuels de ces drames causés par ce véritable dévoiement des libertés démocratiques fondamentales.

On a entendu un des initiateurs de ces débordements criminels avouer pratiquement sur les ondes des médias périphériques la paternité des crimes commis le 19 septembre en les attribuant ce qu’il a eu l’outrecuidance d’appeler « le peuple » qui aurait ainsi manifesté sa réprobation devant la tentative du Chef de l’Etat de rester au pouvoir au-delà de la fin de son mandat constitutionnel. Sans un mot pour les nombreuses victimes de ses turpitudes, il se lamentait uniquement au sujet de l’incendie du QG de son parti causé par des individus que les services du PGR s’efforcent encore d’identifier et qui, du point de vue du Gouvernement, ne sont pas plus criminels que ceux qui avaient mis le feu aux sièges de quelques autres formations politiques de la majorité, les représailles épidermiques n’étant pas acceptables dans un l’Etat de droit.

Le lourd bilan humain que les kinois déplorent aujourd’hui doit, hélas, nous ramener à la réalité. Un lourd bilan aggravé par une déstructuration systématique du tissu socio-économique de la capitale dont le Gouvernement encourage les autorités à établir rapidement les responsabilités.

Le Gouvernement de la République est convaincu que les violences du 19 et 20 septembre traduisent à suffisance l'incapacité de ceux qui les ont initiées d'infuser un minimum de civisme de vivre-ensemble pacifiquement et convivial dans ce pays, tellement ils sont pressés d'arriver au pouvoir par tous les moyens. Les masques sont tombés. Ayant déserté son agenda initial du dialogue pour exécuter par procuration celui du chaos avec meurtres, un schéma cher à un affairiste véreux devenu ainsi un mollah dont les acolytes doivent exécuter les fatwas, un des principaux partis de l’opposition congolaise vient malheureusement par l’implication de certains de ses responsables dans ces violences humainement inacceptables de ressusciter en RDC des pratiques surannées des coups de force qui avaient plongé le pays dans une dictature sanguinaire de plus de trois décennies et dont les conséquences sont encore prégnantes autour de nous.

Par ailleurs, le Gouvernement s’insurge contre une certaine tendance observée chez quelques médias internationaux œuvrant dans notre pays à s'émouvoir des conséquences, en l'espèce la répression des actes criminels tout en méconnaissant les causes qui la rendent nécessaire dans tout Etat de droit. Nous nous perdons également en conjectures sur leur propension à servir volontiers de caisses de résonance à certains messages partisans et dévoyés ou à exprimer une compassion sélective devant les vies fauchées des Congolais. Une véritable prime au chaos et à l’anarchie qui semble s’inscrire dans une certaine symbiose avec la vision de la situation en RDC par certains dirigeants étrangers qui semblent parier sur la déstabilisation et, à terme, la balkanisation de notre pays pour leurs propres intérêts. J’en veux pour exemple les récents propos tenus par le Président de la République française sur les graves événements survenus à Kinshasa les 19 et 20 septembre en marge de son discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York.

En effet, le Président François Hollande, avec des accents de maître d’école, s'est permis de tirer à boulets rouges sur le gouvernement congolais auquel il impute la responsabilité de ces violences dans lesquelles il n’a sélectionné on ne sait pourquoi que l'incendie au deuxième jour, le 20 septembre du siège d’un parti de l’opposition, passant sous silence les meurtres, viols et  saccages  intervenus la veille aux QG des autres partis politiques de la majorité ou de ceux prenant part au dialogue politique national, ainsi que des écoles et du pillage des commerces qui avaient eu lieu le même jour, allant jusqu’à faire grief à nos forces de sécurité de réprimer des criminels !

Le Gouvernement congolais a été surpris d'entendre le Chef d'un État comme la France, pays ami bien représenté ici à Kinshasa, ignorer superbement l'origine et le cheminement desdits événements et s’abstenir de la moindre expression de compassion à l'endroit du plus grand nombre de morts du 19 septembre en se limitant à n'évoquer que deux victimes tombées le 20, deuxième jour du mouvement insurrectionnel. Cette façon de diviser les Congolais qui nous gêne énormément.

Comme à l'accoutumée, nous avons eu droit à des injonctions comminatoires par lesquelles, à travers une vaine tentative de substitution à la fois au souverain primaire et à la CENI, il a rappelé qu’il avait déjà prévenu qu’il « ne transigerait pas sur les dates des élections en RDC». À se demander si la République Démocratique du Congo était devenue un nouveau département d'outre-mer issu de nouvelles conquêtes de l'Hexagone. Il n’est pas inutile de rappeler un de ses prédécesseurs qui confronté aussi à l’époque à des problèmes avec les sondages préélectoraux, avait tenté  de se refaire une santé politique en caressant l'idée de faire d’un autre pays africain, la Libye pour ne pas la citer, un scalp pour améliorer son image passablement brouillée dans l’opinion. En vain. Nous, Congolais ne pouvons continuer à admettre qu'un pays étranger fasse de notre pays ce qu’il est reproché à certains d’avoir fait de la jadis prospère Jamahiriya Libyenne qui n’existe pratiquement plus que de nom, pour des intérêts qui n’ont rien à voir avec les droits brandis de sa population.

C’est le lieu de rappeler aux uns et aux autres que le peuple congolais tient à exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et que, comme l’a souhaité l’immortel Patrice Lumumba, son Avenir s’écrit en RDC par les Congolais eux-mêmes et non à Paris ou dans les couloirs des Nations Unies. 

Nous avons des problèmes mais on peut bien poser la question de savoir quel pays, quel peuple n’en a pas. La Nation tout entière en a pris conscience et a estimé que le dialogue politique national inclusif que le leader du Rassemblement de l’opposition qualifiait il n’y a pas si longtemps de « voie royale » pour des élections crédibles et apaisées était de toute évidence incontournable pour le développement et l’émergence de ce grand pays au cœur de l’Afrique. 

C’est pourquoi le Gouvernement continue à insister pour que la classe politique congolaise dans son ensemble se retrouve autour de la table du Consensus dans l’intérêt supérieur de la Nation et que l’on arrête de mettre  le feu à la maison commune à cause de l’impatience suscitée par des ambitions personnelles mal maîtrisées.

Pour conclure, le Gouvernement de la République invite la population de Kinshasa à garder sa sérénité habituelle qui sera bientôt renforcée par les résolutions pertinentes du dialogue national et inclusif. Grâce à ces résolutions, le chemin qui nous conduira à des élections libres, transparentes et apaisées, seul mode d’accession légitime au pouvoir dans un Etat démocratique, sera ainsi balisé.

Je vous remercie.



Lambert MENDE OMALANGA
Ministre de la Communication et Médias

Porte-Parole du Gouvernement

La République démocratique du Congo au bord du précipice : « Mettre fin à la répression et promouvoir les principes démocratiques »

(Kinshasa, le 18 septembre 2016) — Les décisions du gouvernement de la République démocratique du Congo concernant sa prochaine élection présidentielle seront cruciales pour l’avenir du pays, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié le 22 septembre 2016.
 Le rapport résume les recherches de Human Rights Watch de ces deux dernières années, aux cours desquelles le gouvernement a mené une répression à l’encontre d’activistes ainsi que de dirigeants et membres de partis d’opposition qui se sont opposés à la prolongation de la présidence de Joseph Kabila au-delà de la limite constitutionnelle de deux mandats, qui prend fin le 19 décembre 2016. Il inclut aussi des recommandations pour dissuader d’autres violations des droits humains et empêcher une crise plus large dans les semaines et les mois à venir.
Un “dialogue national” dirigé par le gouvernement est censé présenter son accord final dans les prochains jours. La plupart des principaux partis d’opposition n’ont pas participé à ce processus, le considérant comme un stratagème pour retarder les élections et permettre au Président Kabila de se maintenir au pouvoir. Des activistes et des groupes d’opposition ont appelé à des manifestations à l’échelle du pays commençant le 19 septembre, trois mois avant la fin du mandat de Kabila et au moment où, selon les exigences de la constitution, la commission électorale doit annoncer les élections présidentielles.
La répression gouvernementale a connu une forte hausse dans les jours menant aux manifestations projetées. Dans la capitale, Kinshasa, au moins une dizaine des jeunes activistes pro-démocratie ont été arrêtés après une réunion tenue le 15 septembre sur la non-violence, la paix, et le respect de la constitution. Ils sont détenus par l’agence nationale de renseignements, sans inculpation et sans accès à leurs familles ou à des avocats.
Le 16 septembre, des policiers dans la ville de Lubumbashi, au sud-est du pays, ont tiré du gaz lacrymogène et plus tard à balles réelles pour disperser des membres de partis d’opposition qui se réunissaient pour préparer les manifestations du 19 septembre. Certains participants de la réunion ont répondu en lançant des pierres, en brûlant des pneus, en bloquant des rues, et en pillant plusieurs commerces et bureaux. Des dizaines de personnes ont été arrêtées tôt le lendemain matin. 
Le 17 septembre, des policiers et des agents des services de renseignements ont arrêté un activiste des droits de l'homme, Patrick Pindu, à son domicile à Kinshasa, peu de temps après avoir participé à une réunion de la société civile sur les élections. Il a été libéré le lendemain sans inculpation, sous condition qu’il se présente à l’agence de renseignements tous les 15 jours. 
Pour contribuer à prévenir la violence, les représentants du gouvernement et les membres des forces de sécurité devraient respecter les droits des personnes aux libertés d’expression et de réunion, et autoriser le déroulement de manifestations pacifiques et de meetings politiques.

« Les décisions que le Président Kabila et son gouvernement vont prendre dans les prochaines semaines peuvent faire toute la différence pour l’avenir de la RD Congo, » a déclaré Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Il s’agit d’une opportunité cruciale pour le pays pour consolider la démocratie, l’État de droit, et les droits humains, pour son propre future et celui de la région entière. »

Election présidentielle/RDC : le Chef de l’Etat responsable devant la Cour constitutionnelle

Le dialogue politique entre la majorité présidentielle, l’opposition politique (sans le Rassemblement) et la société civile, débuté le 1er septembre dernier pour une durée initiale de 15 jours, est censé accoucher d’un accord ce week-end. Les termes de ce compromis, quoique consacrant de fait le «glissement », sont très attendus dans l’opinion nationale après les tristes événements de 19, 20 et 21 septembre. En effet, ils pourront suffire pour apaiser les esprits. Mais, l’on entend souvent, dans les rues de la capitale, les gens de tous bords s’interroger : qu’est-ce qui garantira le respect de cet accord, notamment l’organisation de la présidentielle – couplée aux législatives nationales et provinciales – dans le délai qui sera annoncé ? « Qui a bu boira », craignent-ils. Le facteur psychologique joue un rôle déterminant dans l’application des textes – Constitution, Lois, Accord – que les Gouvernants doivent mettre en œuvre. Leur état d’esprit peut les amener à se donner corps et âme pour honorer leurs obligations dans la perspective d’une gouvernance fondée sur l’efficacité. Il peut aussi expliquer l’hésitation et la lenteur qu’ils peuvent accuser dans leur mise en œuvre. 
Ce dialogue politique m’a astreint à soumettre à la lucidité de l’intelligentsia congolaise ma réflexion sur l’indépendance de la Commission électorale en RDC, objet de mon ouvrage en chantier. En effet, la perception – le plus souvent négative dans divers milieux sociopolitiques – de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) nuit à la crédibilité du processus électoral et aux résultats des élections. Quelles que soient l’intégrité morale et les compétences avérées des animateurs de cette institution d’appui à la démocratie. Pour prétendre mettre durablement fin au problème d’illégitimité du pouvoir issu des urnes, il faille renforcer en amont les mécanismes de garantie de l’indépendance de la CENI. C’est dans cette perspective que je propose, en ma qualité de chercheur en Relations internationales et de patriote épris de paix, une formule susceptible d’assurer le développement harmonieux de la pratique électorale en RDC.
La création de la Commission électorale est un des résultats des négociations politiques ayant accouché de l’Accord de Sun City. Ce, même si, en perspective des élections générales prévues après la proclamation de la démocratisation du Zaïre (actuellement RDC), il fut déjà envisagé la mise en place de la Commission nationale des élections (CNE), quoique non concrétisée. A ce titre, il n’est pas erroné d’affirmer que la RDC est, si pas le premier, un des premiers pays africains à avoir pris l’initiative de mettre sur pieds un organe de gestion électoral autonome.
Le contexte de production de cette initiative est marqué par des vives controverses politiques, notamment dans les sillages de la Conférence nationale souveraine, attestant la contestation on ne peut plus clairement de la légitimité du Chef de l’Etat, et une profonde crise de confiance en l’administration publique censée organiser les élections. Il s’agit, pour l’opposition politique, de l’expression de la volonté de rompre avec les pratiques antérieures au 24 avril 1990 ayant caractérisé la démocratie à la soviétique que le Zaïre avait longtemps incarnée pendant la bipolarité du système international.
La Commission électorale constitue donc un modus vivendi pour assurer l’intégrité du processus électoral et/ou du cycle électoral dont l’enjeu consiste en l’acquisition ou la conservation du pouvoir politique pour lequel plusieurs centaines des partis politiques sont créés quand bien même tous ne feraient pas montre de viabilité. Elle vise à rassurer les acteurs politiques du bon déroulement du jeu électoral tant en amont qu’en aval de manière à leur permettre de donner du crédit aux résultats qui en découleront. Pour ce faire, elle est censée bénéficier du prestige et de la confiance de toutes les parties prenantes car son action doit contribuer à garantir la consolidation de la démocratie dans un pays post-conflit et encore « assis » sur une poudrière.
La Constitution de la RDC, qui institue la Commission électorale, la définit comme étant une « institution d’appui à la démocratie ». Cette conception peut prêter à confusion. Larousse online entend par appuyer le fait de « placer quelque chose contre quelque chose qui lui sert de support ; appliquer une chose sur une autre en pressant, en pesant ; fonder, établir quelque chose (abstrait) sur quelque chose d'autre ; soutenir quelqu'un, une action, un projet, les approuver, les aider de son crédit, de son influence ». La structuration de la Constitution met en évidence le fait qu’il relève de la responsabilité des institutions nationales et provinciales d’assurer l’alimentation décente de la démocratie en RDC. 
La Commission électorale, quant à elle, concoure à la solidité, la fiabilité, la légitimité de ces institutions en garantissant la régularité des élections de leurs animateurs. Il va sans dire que l’efficacité de l’action des animateurs de ces institutions est fonction de l’affirmation de la conformité des élections en vertu desquelles ils sont hissés aux rangs qui sont les leurs. Cette validation est du ressort non seulement de la Cour constitutionnelle mais aussi de l’opinion publique nationale dont le rôle en démocratie ne cesse d’aller crescendo.
La Constitution attribue à la Commission électorale un rôle d’une sensibilité telle qu’elle est exposée et ne peut nullement échapper aux critiques des uns et des autres. Elle a la lourde responsabilité de crédibiliser le pays dans un contexte marqué de plus en plus par le devoir de « loyauté de la démocratie dans les relations internationales » (Luc Sindjoun). Elle doit favoriser l’ancrage de la démocratie libérale que promeut le bloc occidental malgré les exigences qui en découlent dans des pays en voie de développement.
C’est dans cette perspective sans nul doute qu’elle se définit comme étant « le temple de la démocratie en RDC ». Force est de constater que la Constitution ne précise pas les marges de manœuvre dont doit disposer la CENI pour s’acquitter efficacement de ses obligations. La Loi fondamentale indique uniquement qu’elle est dotée de la personnalité juridique. C’est dire que la Commission électorale est un acteur à part entière du jeu politique national et, de ce fait, constitue un élément du système institutionnel de la RDC.
Elle a la latitude de prendre des initiatives et de poser librement des actes dans le cadre de ses fonctions. Elle doit relever le défi de gérer les impératifs internes et externes à son environnement en vue de construire et de soigner une image de marque auprès de ses membres et des tiers. Elle est soumise au principe de redevabilité caractérisant les sociétés démocratiques.
L’article 211 de la Constitution stipule qu’elle « est chargée de l’organisation du processus électoral, notamment de l’enrôlement des électeurs, de la tenue du fichier électoral, des opérations de vote, de dépouillement et de tout référendum. Elle assure la régularité du processus électoral et référendaire (…) ». C’est dire que c’est à elle qu’incombe le devoir de concevoir et d’opérationnaliser la planification électorale en administrant les preuves de la maîtrise des paramètres techniques y afférents sur l’ensemble du territoire national. En effet, l’organisation des élections relève d’abord de la technicité quoique soumise à la décision politique.
La personnalité juridique attribuée à la CENI lui confère le droit de jouissance de l’autonomie administrative et financière. A cet effet, elle dispose d’un budget propre sous forme de dotation, pouvant être complétée par des apports extérieurs. Elle jouit de l’indépendance d’action par rapport aux autres institutions, et doit bénéficier de leur collaboration. Le cadre juridique de la Commission électorale circonscrit son indépendance strictement dans les périmètres de l’action qu’elle doit mener. Ceci est banal pour toute organisation jouissant de la personnalité juridique. Cependant, il ne garantit nullement en amont l’efficacité de l’action que la Commission électorale doit obligatoirement mener. Il est évident que ce qui importe n’est pas la latitude d’agir indépendamment mais bien plus l’impact que l’action attendue doit produire dans la perspective de la consolidation de la démocratie.
Cette observation vise à mettre en évidence la nécessité de créer effectivement et nettement les conditions d’une véritable indépendance de l’action de la CENI dont la collaboration avec les autres institutions publiques ne rassure pas indéniablement l’affirmation de son efficacité. Toutes ces institutions s’inscrivant dans une dynamique systémique, les difficultés avérées auxquelles le Gouvernement peut être butté dans son obligation constitutionnelle de conduire au quotidien la politique de la nation peuvent avoir des répercussions sur le rendement des autres.
Situer l’indépendance de la CENI uniquement à son action, et parallèlement la soumettre à la collaboration avec les autres institutions dans le strict respect, peut-on dire, des attributions de ces dernières, ne lui offrent pas une bonne marge pour exprimer véritablement son indépendance. En effet, elle ne peut « agir » que lorsque le Parlement et le Gouvernement se seront acquittés, dans le « délai », de leurs obligations sans disposer d’un quelconque moyen de pression sur ces institutions.
Dès lors, elle est tributaire de l’agenda des pouvoirs exécutif et législatif telle que la planification des élections court sérieusement le risque de relever d’une simple aventure. Car la planification de pareil projet, une entreprise laborieuse, s’inscrit impérativement dans la dynamique de la temporalité telle que, pour cette même activité, les données de divers ordres peuvent sensiblement variées d’une période à une autre. Que le Constituant n’ait pas expressément prévu le bénéficie de l’urgence que les autres institutions doivent, dans l’exercice de leurs missions, accorder à la CENI subordonne cette dernière à l’échelle politique des actions prioritaires à mettre en œuvre à court, moyen et long termes. 
Je m’interdis de porter un quelconque jugement sur la manière dont le Gouvernement et le Parlement assurent, depuis 2005, leur concours à la Commission électorale. Ceci n’est pas pour l’instant l’objet de ma préoccupation scientifique. Je plaide plutôt, partant de la nécessité de marier l’idéal politique et la « realpolitik » congolaise, que des mécanismes juridiques soient clairement mis en place de façon à contraindre particulièrement ces deux dernières institutions à doter la CENI des moyens législatifs et financiers nécessaires à l’enclenchement de son action.
C’est suite à l’inexistence de ces mécanismes juridiques que la Cour constitutionnelle, saisie par la CENI en 2015 pour constater son incapacité à organiser les élections provinciales telles qu’inscrites dans son calendrier, n’a pas pu exercer une influence pour l’opérationnalisation de cet agenda électoral. A cet effet, il y a lieu d’envisager la responsabilité, expressément sur la matière électorale, du Président de la République, Garant de la nation et du bon fonctionnement des institutions, devant la Cour constitutionnelle pour tirer les conséquences – à fixer - qui doivent s’imposer en cas de tenue de l’élection présidentielle dans le délai présidentiel. Ceci contribuera, eu égard aux tristes expériences faisant couler eau et salive en ce temps qui court, de renforcer l’obligation pour le Chef de l’Etat d’assurer l’ancrage de la démocratie, gage de paix et de cohésion nationale. Toutes dispositions n’appelant pas forcément l’interprétation de la Cour constitutionnelle, il appartiendra simplement à cette dernière d’en faire le constat et de tirer les conséquences sous le regard du peuple congolais, souverain primaire. 
De la sorte, il y a lieu d’espérer que le Gouvernement affectera en temps opportun les ressources nécessaires au bon fonctionnement de la machine électorale, particulièrement pour l’organisation des élections législatives provinciales, et législatives nationales ainsi que la présidentielle. Ceci pourrait largement concourir à la détermination claire des contours de la collaboration des institutions impliquées dans le champ électoral et à favoriser, en RDC, le développement d’une excellente pratique politique en matière électorale. 
Pour autant que les élections s’imposent en vue d’assurer la consolidation de la sécurité et permettre à la RDC de réaliser le défi de son émergence dans les relations internationales. En effet, la question électorale est, pour la RDC, un enjeu de taille dans la construction de son image dans les relations internationales africaines. La sociologie politique congolaise doit donc servir de fondement aux suggestions d’une meilleure construction de la démocratie congolaise.
Martin ZIAKWAU L.
Doctorant en R.I./UNIKIN
Chef de travaux/IFASIC


vendredi 16 septembre 2016

Une première : une séance solennelle s'est tenue vendredi matin dans le Saint des Saints de la plus haute juridiction du pays, la Cour Constitutionnelle

Gendarme constitutionnel en charge de s'assurer de la cohérence entre les lois provinciales et la Mère des lois - la Constitution de la République - le ministre des Relations avec le Parlement a déclaré avoir fait sa part; au Juge constitutionnel de faire la sienne en statuant en dernier ressort, aussitôt saisi formellement par le Gouvernement, sur le Rapport dressé par les Experts de haut niveau du Gouvernement et en ordonnant le retrait de l'arsenal juridique national, des lois déclarées non conformes, donc inconstitutionnelles, donc illégales par le Ministère des Relations avec le Parlement. 

"Votre mission est faite de noblesse et de fascination car c'est vous qui écrivez l'histoire en majuscules, notre histoire, l'histoire du Congo, l'histoire de 70 millions de Congolais, c'est vous qui tracez la destinée des 70 millions de Congolais dont la vie de tous les jours, encadrée par les pouvoirs provinciaux, peut être émaillée d'abus et d'excès provenant des lois mal conçues, et non pertinentes", a déclaré le ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba.
"Vous êtes le dernier rempart contre le non-droit. Il vous revient de porter haut l'étendard de la démocratie congolaise naissante", a poursuivi le ministre.

Car l'Etat doit apporter des réponses idoines aux résistances et autres remous constatés dans le chef des populations et des opérateurs économiques et autres qui rechignent à appliquer des lois provinciales inconstitutionnelles.

Le ministre Kin-kiey a fait état de l’incohérence juridique quand des lois provinciales non conformes donc inconstitutionnelles sont d'application suggérant un régime d'avis préalable comme c'est le cas des lois organiques cotées et adoptées par l'Assemblée nationale.


Dans sa présentation, le ministre Tryphon Kin-kiey Mulumba a insisté sur cinq provinces: l'ex-Bas Congo, l'ex-Katanga et l'ex-Kasai Oriental qui ont réussi en volume alors que l'ex-Bandundu vient en dernier avec moins d'une loi provinciale par an adoptée en 9 ans d'existence. Et l'ex-Équateur qui a eu la plus forte mortalité législative provinciale du pays.