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mardi 11 décembre 2012

Journée internationale des droits de l’homme : « Le cri de détresse des millions d’hommes, de femmes et d’enfants victimes des conflits armés et des violations des droits de l’homme à l’est de la RDC doit être entendu»

Goma, le 10 décembre 2012
Le Centre de Recherche sur l’Environnement, la Démocratie et les Droits de l’Homme, CREDDHO en sigle, voudrait exprimer, à l’occasion de la journée mondiale des droits de l’homme, sa vive préoccupation sur la recrudescence des violences et le drame humanitaire qu’elles entrainent dans la province du Nord-Kivu et à l’est de la République Démocratique du Congo en général.
1. Après la prise surprise de la ville de Goma par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23), soutenus par le Rwanda et l’Ouganda,  en date du 20 novembre 2012 et leur progression au sud de la ville, les rebelles s’y sont retirés suite aux pressions internationales et régionales, mais l’établissement de leur position avancée à moins de cinq kilomètres de Goma demeure « une épée de Damoclès » au-dessus de la ville. Non seulement les événements de Goma dénotent une situation sécuritaire très volatile, mais sont surtout caractéristiques des violences auxquelles sont exposées les populations de la province du Nord-Kivu et de l’est de la République Démocratique du Congo en général.
2. Le bilan de récents affrontements autour et à Goma est lourd de conséquences sur le plan des droits de l’homme. Le CREDDHO a été mis au courant de plusieurs violations des droits de l’homme commises tant par les rebelles du M23 que par des militaires de l’armée loyaliste. Certains militaires FARDC quittant Goma et Sake se sont livrés à des exactions contre les civils. Tout au long de leur parcours, ces militaires ont extorqué des biens des civils : véhicules, motos, téléphones, … Plus au sud de la ville, dans la localité de Minova, on rapporte le viol d’une dizaine de femmes. Quant aux rebelles du M23, ils ont pillé de manière systématique les biens publics, des autorités publiques et de certains particuliers. Des exécutions sommaires, des viols, … ont également été commis par les rebelles à Goma et dans la cité de Sake.
3. La médiatisation de la dernière offensive du M23 ne doit cependant pas occulter les pires exactions auxquelles sont soumis les habitants d’autres localités du Nord-Kivu sous l’emprise du M23 ou d’autres groupes armés.  Le CREDDHO voudrait particulièrement attirer l’attention de l’opinion sur le territoire de Masisi où sévissent les groupes armés à caractère tribal qui selon un récent rapport des Nation unies ont mené des attaques contre les populations des tribus rivaux entrainant plus de 200 morts et des incendies des villages entiers. Les conflits armés dans la province du Nord-Kivu ont par ailleurs déjà poussé plus de 200 milles personnes hors de leurs domiciles, les exposant à des pires conditions de vie dans les camps à l’intérieur et à l’extérieur du pays.  
4. Le M23 réclame la réévaluation des accords du 23 mars signés entre les groupes armés, parmi lequel l’ex-CNDP dont est issu le M23, et le gouvernement congolais. Le gouvernement congolais, suite à la démonstration de force sur Goma, a accepté des négociations avec ce groupe armé, responsable des violations des droits de l’homme selon plusieurs rapports indépendants. Ces négociations ont lieu actuellement à Kampala, capitale ougandaise, mais le CREDDHO craint qu’elle ne débouche sur la consécration de l’impunité en remerciant des responsables des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire par des postes dans l’armée et les institutions étatiques. Le refus par le gouvernement congolais de livrer M. Bosco Ntaganda, un des responsables du M23 et à l’époque chef du CNDP, recherché par la Cour pénale  internationale hante encore les esprits et n’a eu aucun effet sur la stabilité dans la région. Le CREDDHO reste convaincu que la politique de prime à la guerre ne soulagera pas les souffrances des populations de l’est de la RDC et invite le gouvernement de la RDC et la Communauté internationale à l’intransigeance sur ce point. 
5. L’est de la RDC célèbre la journée mondiale des droits de l’homme dans un contexte difficile et sombre.  « Cette année, l’accent (est) mis sur les droits de tous les individus - les femmes, les jeunes, les minorités, les personnes handicapées, les autochtones, les personnes pauvres ou marginalisées - afin que leurs voix soient entendues dans la vie publique et prises en compte dans les décisions politiques ».
6. Chaque habitant du Nord-Kivu et de l’est de la RDC, soit-il homme ou femme, adulte ou enfant, jeune ou vieux, …, confronte les violences occasionnées par les conflits armés depuis plus de 15 ans, sans que son cri de détresse n’interpelle ni les autorités congolaises ni la communauté internationale pour œuvrer à mettre fin de manière définitive au cycle de violences. A l’occasion de la journée internationale des droits de l’homme, le CREDDHO joint sa voix  à celle des habitants du Nord-Kivu pour demander que soit mis fin à toute forme de conflit et de violences à l’est de la RDC et que leurs auteurs soient sanctionnés.
7. Mais également, le CREDDHO saisit cette occasion pour attirer l’attention de l’opinion sur la situation des droits de l’homme dans le pays caractérisée par des atteintes graves aux droits et libertés fondamentaux, la corruption et l’impunité. Cette situation fragilise les structures de l’Etat et le prédispose aux conflits sanglants dénoncés ici, mais surtout prive des millions des congolais du droit de jouir des richesses de leur pays dans la paix. Cet état de choses est inacceptable et ne peut plus durer.
8. Face à ce qui précède, le CREDDHO demande :
1° Au gouvernement congolais :
- D’œuvrer pour mettre fin rapidement aux conflits à l’est du pays et d’éradiquer tous les groupes armés, dont le M23 ;
- De mettre fin aux atteintes et restrictions des droits et libertés fondamentaux des citoyens ;
- De rendre effectifs les mécanismes de reforme du secteur de sécurité ;
- De mettre fin à l’impunité des responsables des violations des droits de l’homme dont Bosco Ntaganda, Sultani Makenga, Innocent Nzimurinda, John Numbi, … ;
- D’élaborer une politique claire de lutte contre la corruption et l’impunité et la rendre effective sur l’ensemble de la RDC.
2° Aux M23 et autres groupes armés :
- De mettre immédiatement fin aux exactions contre les civils ;
- D’abandonner sans condition la lutte armée ;
- De livrer leurs membres auteurs des violations des droits de l’homme, Bosco Ntaganda, Sultani Makenga et Innocent Nzimurinda notamment, aux autorités judiciaires compétentes.
3° Au Rwanda et à l’Ouganda :
- De mettre fin à tous actes de déstabilisation de la RDC ;
- D’œuvrer pour des initiatives de cohabitation pacifiques pour le développement des tous les pays de la région des Grands-lacs.
4° Aux Nations Unies et à la Communauté internationale :
- De renforcer le mandat de la Monusco ;
- De sanctionner les groupes armés et leurs membres responsables des violations des droits de l’homme à l’est de la RDC et des pays qui les appuient ;
- De ne pas cautionner tout schémas visant à promouvoir les responsables des violations des droits de l’homme dans l’armée et des institutions de la RDC ;
- D’accompagner le gouvernement de la RDC pour la mise en œuvre des mécanismes efficace de bonne gouvernance et de lutte contre l’impunité.
5° Au Peuple congolais :
- De ne pas céder aux manipulations des groupes armés et aux discours tribaux,
- De dénoncer tout acte qui trouble la paix et la sécurité publique,
- De s’abstenir des actes de vengeance et de justice populaire.

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