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mercredi 25 février 2015

Des inquiétudes autour de l’avenir du processus de paix en République Démocratique Du Congo

Kinshasa, le 24 février 2015 – Les Organisations membres du Groupe de Travail pour le suivi de la mise en œuvre de l’Accord-cadre et la Résolution 2098 (2013) du Conseil de Sécurité s’interrogent sur l’avenir du processus de paix en République démocratique du Congo, et partant de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération en RDC et dans la région. En effet, plus de huit ans après la signature à Nairobi (le 15 décembre 2006) du Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement de la région des Grands Lacs par les onze Etats membres de la Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs et deux ans après la signature de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba par les mêmes Etats, ces organisations estiment que des efforts substantiels sont encore à faire.
Elles craignent que si l’on n’y prend garde, l’Accord-cadre pourtant nécessaire, ne vienne allonger la liste « des accords de paix » en RDC qui ont échoué les uns après les autres. Car à plus de deux ans de sa mise en œuvre, les parties prenantes et leurs partenaires peinent encore à s’affranchir de la « liturgie de la parole ». Les quelques avancées enregistrées - se traduisant à des faits d’annonces - ne sauraient fonder les déclarations d’autosatisfaction, si l’on sait qu’en RDC, la mise en place du Mécanisme National de Suivi (MNS), fonctionnant avec l’unique organe exécutif, n’arrive toujours pas à mettre en application la matrice de suivi des indicateurs de référence sur les réformes à entreprendre. La neutralisation des groupes armés achoppe sur la mise à l’écart des commandants accusés d’implication dans la violation des droits de l’homme entre le gouvernement congolais et ses partenaires, principalement la MONUSCO ; et que le processus électoral souffre d’un manque de consensus. Aussi, la plupart d’observations contenues dans les deux rapports du Groupe de Travail publiés respectivement le 24 février 2014 et le 15 septembre 2014 gardent leur actualité alors que cela aurait dû engager le gouvernement congolais, ceux de la région et les autres partenaires à plus d’activisme dans la mise en œuvre des obligations leur incombant aux termes de l’Accord-cadre.
Ainsi, au chapitre des élections, le Groupe de Travail appelle les acteurs politiques à privilégier le dialogue pour en dégager le consensus autour du processus électoral en vue de l’instauration d’un climat apaisé susceptible d’épargner aux populations civiles des conséquences semblables aux événements du 19, 20 et 21 Janvier 2015 qui ont endeuillé le pays à la suite de l’introduction d’une incise controversée dans le projet de loi électorale discuté au Parlement. Concernant le processus de réforme du secteur de sécurité, le Groupe de travail note quelques légères avancées consécutives notamment à la nomination du personnel clé de nouvelles structures des FARDC. 
Toutefois, il s’avère que la plupart des nominés ne sont pas mis en condition pour pouvoir assumer leurs nouvelles charges et responsabilités pendant que le processus DDR-DDRRR piétine du fait pour le gouvernement d’accuser un déficit des stratégies ou d’approches à mettre en œuvre ainsi que par l’absence de financement. S’agissant du processus de la Décentralisation, les organisations membres du Groupe de Travail déplorent le fossé qu’il y a entre les textes, les décisions et les actes concrets à poser. Le transfert des compétences et la rétrocession de 40 % constituent toujours la pomme de discorde entre le pouvoir central et les provinces… En ce qui concerne la « promotion des objectifs de la réconciliation nationale, de tolérance et de démocratisation », l’application sélective de la loi d’amnistie compromet dangereusement l’objectif de la cohésion nationale si bien que le Groupe de Travail demeure d’avis que la non-application de la plupart des résolutions et recommandations issues des concertations nationales semble avoir entamé la crédibilité de l’ensemble du processus de réconciliation. 
Le Gouvernement congolais fera œuvre utile en exécutant de bonne foi ses engagements relatifs notamment à la réconciliation nationale par la libération des prisonniers d’opinion; la démocratisation par l’organisation d’un dialogue devant déboucher sur l’adoption d’un processus électoral réaliste et consensuel; la lutte contre l’impunité par la mise à l’écart des commandants impliqués dans des violations des droits de l’homme; et la poursuite de sa coopération avec la MONUSCO afin de neutraliser tous les groupes armés qui écument encore l’est de la RDC. Au plan régional, les pays excellent dans une sorte de « passivité » face à l’obligation relative à la neutralisation des groupes armés et l’engagement de poursuivre les personnes soupçonnées de graves violations des droits de l’homme. Le Groupe de travail demeure préoccupé par la « faible attention » qui tend à s’installer dans le chef de la MONUSCO qui n’arrive toujours pas à assumer le rôle lui dévolu, notamment celui de soutenir, coordonner et évaluer l’application en RDC des engagements nationaux pris aux termes de l’Accord cadre, particulièrement en ce qui concerne la neutralisation des groupes armés. 
Le Groupe de Travail s’inquiète de l’absence d’engagement et d’un plan mis en place par les Envoyés Spéciaux en vue de conduire un processus politique global ouvert à toutes les parties prenantes pour remédier aux causes profondes du conflit en République Démocratique du Congo et dans la région des grands lacs tel que recommandé par les Résolutions 2098 (2013) et 2147 (2014) du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Il encourage, en outre, les visites officielles des pays signataires de l’Accord-cadre par les différents envoyés spéciaux. Cependant, vu le caractère sélectif desdites visites qui sont plus focalisées sur la RD Congo, les Organisations membres du Groupe de Travail exhortent les envoyés spéciaux à les étendre aux autres pays signataires de l’Accord-cadre avec la même fréquence que celles effectuées en RDC. Le Groupe de Travail recommande à la Communauté internationale de maintenir la pression sur les parties prenantes pour qu’elles s’acquittent effectivement de leurs obligations, de quitter le mode urgence en mettant en place d’un programme clair de consolidation des acquis pour la durabilité des actions menées en vue d’espérer à des résultats escomptés.

Fait à Kinshasa, le 24 février 2015

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