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jeudi 22 septembre 2016

Lambert Mende : « Le Gouvernement congolais surpris d'entendre François Hollande ignorer l'origine et le cheminement événements de la semaine et s’abstenir de la moindre expression de compassion »

Les 19 et 20 septembre 2016, Kinshasa a été le théâtre de violences inouïes consécutives à une tentative délibérée de déstabilisation de l’Etat, perpétré par une frange de l’opposition politique dont quelques partis furent naguère adeptes de la lutte démocratique non violente mais qui semblent s'être radicalisés depuis. On peut présenter comme preuve du refus du consensus de leur part leur boycott actif du dialogue politique national inclusif que certains d'entre eux réclamaient avec insistance il y a encore quelques temps, en plus d’avoir pris part aux pourparlers préparatoires y relatifs. Ce dialogue national se tient pourtant à la Cité de l’UA dans les conditions convenues de commun accord avec eux. Plusieurs partis politiques de la Majorité, de l'opposition et des représentants de la société civile accompagnés par l'Union Africaine et l'ensemble de la Communauté internationale y participent pour débattre de la question électorale dans l'optique d'une solution consensuelle en vue de préserver la RDC et son peuple du chaos.

Force est de constater que pour les initiateurs des désordres des 19 et 20 septembre c’est bien le chaos et rien que le chaos qui était recherché ainsi que l’a avoué l’un d’entre eux dans un entretien du 16 septembre avec l’hebdomadaire Jeune Afrique qui l’a publié le 18 septembre en se référant aux pyromanes de Ouagadougou qui avaient incendié leur parlement comme un modèle à suivre.

Le bilan de ces violences est très lourd car selon les dernières données fournies par la PNC, on a compté pour les deux jours
-     32 morts dont des éléments des forces de police en plein exercice de leurs fonctions, des enfants tués sur la route de l’école ainsi que quelques pilleurs et casseurs ;
-     plusieurs biens tant publics que privés vandalisés objet de destruction méchante ;
-     des propriétés privées pillées.

Au nom du Gouvernement et en mémoire de tous nos compatriotes ainsi fauchés inutilement, parmi lesquels des policiers brûlés vifs dans l'exercice de leur mission, je vous convie à vous lever et à garder une minute de silence. (Merci). Nos sincères condoléances à toutes les familles éplorées.

Mesdames et Messieurs,

Contrairement au sempiternel refrain entendu ici et là au sujet du non respect des droits de l'Homme ou du rétrécissement des espaces démocratiques en RDC, c’est bien dans le cadre de l'exercice légitimement revendiqué et reconnu de la liberté d’expression et de manifestation garanti dans notre pays que ces crimes humainement inacceptables ont été commis. Le Gouvernement congolais, toujours attaché à ces droits et libertés, n'a jamais interdit à quiconque de se faire entendre dans les limites du respect des lois. Tout le monde se souvient qu'il y a à peine quelques semaines, le retour au pays en grande pompe et le meeting du leader d’un regroupement de partis de l’opposition à Kinshasa avaient drainé beaucoup de monde sans que cela ne donne lieu à quelque désordre que ce soit.

C'est fort de ces convictions et suivant les mêmes principes que le regroupement politique "Rassemblement" avait obtenu, après concertations avec les autorités urbaines de Kinshasa, l'autorisation d'organiser une "marche pacifique" pour la remise d’une pétition à la CENI selon un itinéraire et un chronogramme bien précis.

Alors que cette marche était, selon ses organisateurs prévue pour débuter à 12H00, on s’est rendu compte que dès les petites heures du matin, parfois la veille dans quelques quartiers de la ville, elle s’est muée en un mouvement insurrectionnel manifestement prémédité de longue date. Dans un certain nombre de points de la capitale, on a en effet vu débouler de manière coordonnée des bandes d’émeutiers, de pilleurs et de meurtriers. Des appels au saccage des résidences de certains acteurs politiques qui circulaient sur les réseaux sociaux comme des mots de passe en langues lingala et en tshiluba témoignent de cette stratégie virale. Les meurtres de sang froid comme ceux d’une fillette élève à l’Ecole Mwinda, après avoir été violée, parce qu’elle avait osé porter son uniforme d’écolière, d’une dame receveur de bus Newtrans lapidée jusqu’à ce que mort s’ensuive et d’un policier de garde devant la permanence d’un parti de la Majorité dont les émeutiers mettront le feu à son corps. Ces meurtres atroces étaient destinés à terroriser la population de Kinshasa. La mise à sac des sièges des partis politiques prenant part au dialogue, qu’ils soient de la Majorité comme de l’Opposition, la détention et l'utilisation par les émeutiers d'armes et de munitions de guerre, les attaques contre les monuments des pères de l’indépendance Patrice Lumumba et Joseph Kasa-Vubu, la destruction des symboles de l'Etat, notamment les commissariats et sous - commissariats de la police nationale ainsi que les sièges des tribunaux et les écoles donnent à penser à un schéma de coup d’Etat sur lequel la justice ne manquera pas de nous éclairer bientôt.

Devant cette flambée de violence et pour éviter le chaos généralisé, les autorités municipales de la capitale, qui ont réalisé la supercherie de la part de leurs interlocuteurs désormais auteurs intellectuels, moraux et matériels de ces assassinats et autres crimes socio-économiques collatéraux, ont pris la décision salutaire d'interdire cette manifestation dont l'objectif inavoué n'avait plus rien à avoir avec celui déclaré au départ. D’où leur décision de disperser les faux manifestants tout en faisant procéder à l’arrestation de ceux d’entre eux surpris en flagrant délit d’actes criminels.

Tout porte à croire que l’information portée à la connaissance du gouverneur de Kinshasa d’une marche pacifique ayant pour objectif de déposer une pétition à la CENI n'avait été qu'une pure diversion. L’objectif principal des auteurs de cette procédure qui se sont répandus par la suite à travers les médias et réseaux sociaux en des appels délibérés aux actes répréhensibles qui ont endeuillé la ville de Kinshasa semble avoir été de conduire au renversement des institutions de la République et leur remplacement par de nouveaux acteurs suivant un schéma insurrectionnel sous le prétexte de mettre la pression sur les participants au dialogue politique national inclusif qu’ils accusaient de vouloir violer la Constitution de la République.

Leurs atermoiements et leur refus catégorique de prendre part audit dialogue qu’ils n’avaient cessé de réclamer depuis plus de trois ans malgré les invitations réitérées de larges couches de Congolaises et de Congolais ainsi que des  supplications de la communauté internationale sont révélateurs de cette démarche funeste.

Le Gouvernement condamne sans ambages de tels actes de violence. Il est décidé à faire régner l'ordre et encourage fermement le Procureur Général de la République qui a annoncé dès hier sa détermination à arrêter et engager sans désemparer des poursuites judiciaires à l’encontre des auteurs matériels et intellectuels de tous les auteurs de cette flambée de violences qui ne peut en aucune manière être justifiée.

Le Gouvernement se félicite de ce que les deux chefs des délégations, respectivement le ministre  de la Justice Alexis Thambwe Mwamba pour la majorité et le président du parti UNC, Monsieur Vital Kamerhe pour l’opposition les aient condamné sans ambages au nom de tous les participants à ce forum tout en insistant sur le caractère exemplaire des sanctions qui doivent être infligées aux auteurs matériels et intellectuels de ces drames causés par ce véritable dévoiement des libertés démocratiques fondamentales.

On a entendu un des initiateurs de ces débordements criminels avouer pratiquement sur les ondes des médias périphériques la paternité des crimes commis le 19 septembre en les attribuant ce qu’il a eu l’outrecuidance d’appeler « le peuple » qui aurait ainsi manifesté sa réprobation devant la tentative du Chef de l’Etat de rester au pouvoir au-delà de la fin de son mandat constitutionnel. Sans un mot pour les nombreuses victimes de ses turpitudes, il se lamentait uniquement au sujet de l’incendie du QG de son parti causé par des individus que les services du PGR s’efforcent encore d’identifier et qui, du point de vue du Gouvernement, ne sont pas plus criminels que ceux qui avaient mis le feu aux sièges de quelques autres formations politiques de la majorité, les représailles épidermiques n’étant pas acceptables dans un l’Etat de droit.

Le lourd bilan humain que les kinois déplorent aujourd’hui doit, hélas, nous ramener à la réalité. Un lourd bilan aggravé par une déstructuration systématique du tissu socio-économique de la capitale dont le Gouvernement encourage les autorités à établir rapidement les responsabilités.

Le Gouvernement de la République est convaincu que les violences du 19 et 20 septembre traduisent à suffisance l'incapacité de ceux qui les ont initiées d'infuser un minimum de civisme de vivre-ensemble pacifiquement et convivial dans ce pays, tellement ils sont pressés d'arriver au pouvoir par tous les moyens. Les masques sont tombés. Ayant déserté son agenda initial du dialogue pour exécuter par procuration celui du chaos avec meurtres, un schéma cher à un affairiste véreux devenu ainsi un mollah dont les acolytes doivent exécuter les fatwas, un des principaux partis de l’opposition congolaise vient malheureusement par l’implication de certains de ses responsables dans ces violences humainement inacceptables de ressusciter en RDC des pratiques surannées des coups de force qui avaient plongé le pays dans une dictature sanguinaire de plus de trois décennies et dont les conséquences sont encore prégnantes autour de nous.

Par ailleurs, le Gouvernement s’insurge contre une certaine tendance observée chez quelques médias internationaux œuvrant dans notre pays à s'émouvoir des conséquences, en l'espèce la répression des actes criminels tout en méconnaissant les causes qui la rendent nécessaire dans tout Etat de droit. Nous nous perdons également en conjectures sur leur propension à servir volontiers de caisses de résonance à certains messages partisans et dévoyés ou à exprimer une compassion sélective devant les vies fauchées des Congolais. Une véritable prime au chaos et à l’anarchie qui semble s’inscrire dans une certaine symbiose avec la vision de la situation en RDC par certains dirigeants étrangers qui semblent parier sur la déstabilisation et, à terme, la balkanisation de notre pays pour leurs propres intérêts. J’en veux pour exemple les récents propos tenus par le Président de la République française sur les graves événements survenus à Kinshasa les 19 et 20 septembre en marge de son discours devant l’Assemblée générale des Nations Unies à New York.

En effet, le Président François Hollande, avec des accents de maître d’école, s'est permis de tirer à boulets rouges sur le gouvernement congolais auquel il impute la responsabilité de ces violences dans lesquelles il n’a sélectionné on ne sait pourquoi que l'incendie au deuxième jour, le 20 septembre du siège d’un parti de l’opposition, passant sous silence les meurtres, viols et  saccages  intervenus la veille aux QG des autres partis politiques de la majorité ou de ceux prenant part au dialogue politique national, ainsi que des écoles et du pillage des commerces qui avaient eu lieu le même jour, allant jusqu’à faire grief à nos forces de sécurité de réprimer des criminels !

Le Gouvernement congolais a été surpris d'entendre le Chef d'un État comme la France, pays ami bien représenté ici à Kinshasa, ignorer superbement l'origine et le cheminement desdits événements et s’abstenir de la moindre expression de compassion à l'endroit du plus grand nombre de morts du 19 septembre en se limitant à n'évoquer que deux victimes tombées le 20, deuxième jour du mouvement insurrectionnel. Cette façon de diviser les Congolais qui nous gêne énormément.

Comme à l'accoutumée, nous avons eu droit à des injonctions comminatoires par lesquelles, à travers une vaine tentative de substitution à la fois au souverain primaire et à la CENI, il a rappelé qu’il avait déjà prévenu qu’il « ne transigerait pas sur les dates des élections en RDC». À se demander si la République Démocratique du Congo était devenue un nouveau département d'outre-mer issu de nouvelles conquêtes de l'Hexagone. Il n’est pas inutile de rappeler un de ses prédécesseurs qui confronté aussi à l’époque à des problèmes avec les sondages préélectoraux, avait tenté  de se refaire une santé politique en caressant l'idée de faire d’un autre pays africain, la Libye pour ne pas la citer, un scalp pour améliorer son image passablement brouillée dans l’opinion. En vain. Nous, Congolais ne pouvons continuer à admettre qu'un pays étranger fasse de notre pays ce qu’il est reproché à certains d’avoir fait de la jadis prospère Jamahiriya Libyenne qui n’existe pratiquement plus que de nom, pour des intérêts qui n’ont rien à voir avec les droits brandis de sa population.

C’est le lieu de rappeler aux uns et aux autres que le peuple congolais tient à exercer son droit inaliénable à l’autodétermination et que, comme l’a souhaité l’immortel Patrice Lumumba, son Avenir s’écrit en RDC par les Congolais eux-mêmes et non à Paris ou dans les couloirs des Nations Unies. 

Nous avons des problèmes mais on peut bien poser la question de savoir quel pays, quel peuple n’en a pas. La Nation tout entière en a pris conscience et a estimé que le dialogue politique national inclusif que le leader du Rassemblement de l’opposition qualifiait il n’y a pas si longtemps de « voie royale » pour des élections crédibles et apaisées était de toute évidence incontournable pour le développement et l’émergence de ce grand pays au cœur de l’Afrique. 

C’est pourquoi le Gouvernement continue à insister pour que la classe politique congolaise dans son ensemble se retrouve autour de la table du Consensus dans l’intérêt supérieur de la Nation et que l’on arrête de mettre  le feu à la maison commune à cause de l’impatience suscitée par des ambitions personnelles mal maîtrisées.

Pour conclure, le Gouvernement de la République invite la population de Kinshasa à garder sa sérénité habituelle qui sera bientôt renforcée par les résolutions pertinentes du dialogue national et inclusif. Grâce à ces résolutions, le chemin qui nous conduira à des élections libres, transparentes et apaisées, seul mode d’accession légitime au pouvoir dans un Etat démocratique, sera ainsi balisé.

Je vous remercie.



Lambert MENDE OMALANGA
Ministre de la Communication et Médias

Porte-Parole du Gouvernement

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