Avoir des textes, les signer et en respecter
l’esprit ne va pas toujours ensemble en RDC. La culture des textes et une
certaine éthique politique sont indispensables à leur gestion citoyenne. Les
idéologies perpendiculaires des groupes dirigeants sont souvent contraires aux
textes qu’ils signent. Les gouvernants actuels de la Rdc ont choisi de
gouverner avec le soutien des milices armées. Le témoignage de
Kikaya Bin Karubi est très éloquent sur cette question.
Depuis 2006, le pays est doté d’une constitution.
Ce texte est supposé être notre loi fondamentale ; du moins pour ceux et
celles qui y croient. Ce texte soutient que « la vie humaine est sacrée »
dans un pays où le droit à la vie - garanti par le respect des droits civils,
socio-politiques, culturels et économiques - est purement et simplement ignoré.
Victimes de l’obscurité et de l’obscurantisme politico-idéologique, plusieurs
de nos compatriotes en sont venus à croire que quelques-uns d’entre nous et/ou
des étrangers ayant mis notre pays sous-tutelle avaient le droit de vie ou de
mort sur nos masses populaires ! Les massacres et les exécutions
extrajudiciaires sont devenus monnaie courante chez nous ; la justice pour
les victimes inexistante.
La fameuse loi fondamentale susmentionnée indique
les conditions devant être remplies pour qu’une manifestation politique - par
exemple - ait lieu. A voir comment les manifestations politiques sont réprimées
chez nous, il ne serait pas exagéré de soutenir que les forces de police
commises à la sécurité des personnes et de leurs biens obéissent à
des ordres foulant au pied ladite constitution. Il arrive même que
ne faisant aucune allusion aux textes qui régissent les manifestations
publiques, « les experts du Congo RD » en viennent à
poser des questions apparemment
« réalistes » du genre : « A quoi bon organiser
des manifestations si vous êtes convaincus qu’elles seront brutalement
réprimées ? » Ce genre de questions va dans le sens de la
criminalisation des manifestants sans un souci sérieux de se
référer aux textes sur lesquels la gestion de la cité congolaise est
fondée !
Si la constitution, la loi fondamentale du pays,
est constamment traitée comme du papier hygiénique, quelle garantie
nos populations ont-elle que le code de bonne conduite - que
les partis politiques sont appelés à signer pour des élections
apaisées - pourra être respecté ? Cela dans un pays où le droit et la
justice ne rentrent pas dans les préoccupations fondamentales des
gouvernants ?
Le spectacle hideux auquel nous
assistons aujourd’hui chez nous est fondamentalement lié à la création de la
zone de non-droit orchestrée par les initiateurs de la guerre de basse
intensité de 1996 et les élites compradores Congolais et Africains. Les
discours de bonnes intentions et « la bonne volonté » manifestée
par les candidats aux prochaines élections - probables - de novembre
2011 ne suffiront pas à éradiquer le mal ; celui-ci est trop profond. La
complicité entre les multinationales, les seigneurs de guerre, les hommes et
les femmes politiques Congolais de la sous-région des Grands-Lacs - de
cette même sous-région - a relégué le respect du droit à la vie des
populations Congolaises à l’arrière-plan. La signature des textes risque de
n’être que de la poudre jetée aux yeux de nos populations si nous tenons compte
de l’implication de certains de ces acteurs apparaissant aujourd’hui sur la
scène publique dans des combines marchandes avec « les cosmocrates »
et les crimes de tous ordres qui s’en sont suivis.
Depuis notre indépendance politique biaisée jusqu’à
ce jour - et avec la guerre de basse intensité de 1996 -, la politique
Congolaise - comme celle de plusieurs pays du monde - est dévoyée. Elle
poursuit d’autres objectifs que le service de la cité dans la justice et le
droit.
« La politique, disait le Pape
Benoît XVI au Bungestag, doit être un engagement pour la justice et
créer des conditions de fond pour la paix. Naturellement un politicien
cherchera le succès qui en soi lui ouvre la possibilité de l’action
politique effective ! Mais le succès est subordonné au critère de la
justice, à la volonté de mettre en œuvre le droit et l’intelligence
du droit. Le succès peut aussi être une séduction, et ainsi ouvrir la route à
la contrefaçon du droit, à la destruction de la
justice. » Comme plusieurs pays du monde marqué par la
crise financière, le Congo dit démocratique vit dans le déni du droit. « ‘Enlevé
le droit- et alors qu’est-ce qui distingue l’Etat d’une grosse bande de
brigands ?’ a dit un jour saint Augustin, poursuit le Pape. »
Et se référant à son pays, il dit : « Nous Allemands, nous savons par
expérience que ces paroles ne sont pas un phantasme vide. Nous avons fait
l’expérience de séparer le pouvoir du droit, de mettre le pouvoir contre le
droit, de fouler aux pieds de droit, de sorte que l’Etat est devenu - sous
Hitler - une bande de brigands très bien organisée, qui pouvait menacer le
monde entier et le pousser au bord du précipice. » -Lire le discours du Pape au Bundestag du 22
septembre 2011-
La permanence de la zone de non-droit chez nous est
aussi liée à la présence de « l’Hitler Africain », Paul Kagame,
« ami chéri » des concepteurs et des initiateurs de la guerre de
basse intensité de 1996 et « maître incontesté » de la
sous-région des Grands-Lacs ! Il fait et défait ses « collabos »
dans la sous-région en perpétuant la zone de non-droit.
Pour rappel, dans un câble datant du 8 mai
2009 et publié par WikiLeaks, Kikaya Bin Karubi, ancien secrétaire
particulier de « Joseph Kabila » soutenait que pour gagner aux
élections en Rdc, il fallait avoir une milice. Son chef et Jean-Pierre Bemba
lui servaient de référence. Il est possible que plusieurs compatriotes n’aient
pas lu l’échange de Kikaya Bin Karubi avec l’ambassadeur
américain en Rdc William J. Garvelink au cours duquel il
affirmait que « les personnalités et les partis politiques en
Afrique ont besoin de la force militaire pour réussir, soulignant ». Cela
rend difficile la compréhension de la folie des forces de sécurité converties
en milices du pouvoir en place, en plus de nos jeunes abrutis à dessein pour
être utilisés comme des « Pomba » par le pouvoir de Kinshasa. Le
discours criminalisant les manifestations de l’opposition politique- à
l’exception de leurs excès- participe de cette ignorance réelle ou feinte des
options majeures des gouvernants de Kinshasa en marge des textes qu’ils signent
officiellement. L’usage permanent de la violence et de la corruption est l’une
de ces options.
Quand, dans ce contexte, la Céni en appelle à la
signature du code de bonne conduite, qu’est-ce que cela veut dire ? Que
les signataires autres que le pouvoir en place se plient à l’usage permanent de
la violence et de la corruption par le pouvoir en place sans s’en
indigner ? C’est peut-être là le subterfuge.
Dans le discours du Pape auquel nous avons fait
allusion et dont nous partageons l’essentiel du contenu, Benoît XVI estime
que la résistance peut se justifier dans les cas où les lois d’un
pays portent atteinte à la dignité de l’homme et à son humanité, fussent-elles
des lois votées majoritairement. « Au troisième siècle, soutient-il, le
grand théologien Origène a justifié ainsi la résistance des chrétiens à certains
règlements juridiques en vigueur : ‘Si quelqu’un se trouvait chez les
Scythes qui ont des lois irréligieuses, et qu’il fut contraint de vivre parmi
eux…celui-ci certainement agirait de façon très raisonnable si, au nom de la
loi de la vérité qui chez les Scythes est justement illégalité, il formerait
aussi avec les autres qui ont la même opinion, des associations contre le
règlement en vigueur..’ »
Revenant à l’histoire de son pays et du monde, le
Pape note que « sur base de cette conviction, les combattants de la
résistance ont agi contre le régime nazi et contre d’autres régimes
totalitaires, rendant ainsi service au droit et à l’humanité toute entière.
Pour ces personnes il était évident de façon incontestable que le droit en
vigueur était, en réalité, une injustice. »
Créer des textes de lois et/ou des
règles accommodants pour le pouvoir en place ne serait pas une
invention de la Céni au Congo. Le système capitalo-parlementariste dominant a
excellé dans ce domaine, aidé par la lobotomisation des masses populaires. La
montée des indignés à travers le monde semble sonner le glas du sommeil
déresponsabilisant les citoyens. Pourvu que de l’indignation, plusieurs
citoyennes et citoyens passent à l’engagement dans les institutions dirigeantes
pour y insuffler un nouvel esprit ! - Lire à ce sujet, l’interview
accordée à Stéphane Hessel et intitulé Engagez-vous ! Entretiens avec Gilles Vanderpooten, Paris,
Editions de l’Aube, 2011 -.
La signature du code de bonne conduite ne devrait
pas enlever aux Congolaises et aux Congolais épris de paix, de droit et de
justice leur capacité d’indignation et de résistance face à « un
pouvoir-os » ayant fait du recours à la violence et à la
corruption des éléments essentiels de son mode de gouvernement s’il
arrive que les résultats des - probables - prochaines élections pas
à répondent au choix réel des électeurs. Cela à parti des témoignages et des
preuves à l’appui.
J.-P.
Mbelu
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire