Le
30 avril 2012, une mutinerie éclatait dans trois unités des FARDC au Nord et au
Sud-Kivu. D’anciens membres de groupes armés intégrés récemment dans l’armée
avaient déserté avec leur ancien chef, Bosco Ntaganda, pour tenter de lancer
une énième rébellion armée à l’Est. On observera peu après des tentatives
similaires dans d’autres unités ainsi que la réactivation des milices locales,
chacune prétendant vouloir protéger sa communauté ethnique contre d’autres.
Début
mai, prise en déroute par les FARDC, la bande à Bosco Ntaganda a fui
précipitamment Kibumba où elle avait établi ses quartiers pour se diriger vers
le Parc National de Virunga et rejointe entre temps par le n°2 du groupe, le
dénommé Makenga, elle s’est finalement repliée dans un réduit adossé à la
frontière rwandaise entre les collines de Runyonyi, Mbuzi et Tshianzu.
Entretemps,
onze officiers renégats, dénoncés par des militaires dans des garnisons du
Sud-Kivu qu’ils tentaient de détourner du devoir ont été arrêtés, promptement
jugés et condamnés. Une demi douzaine d’autres officiers, dont la forfaiture a
été mise à jour au Nord-Kivu ont été eux aussi neutralisés et attendent de
passer en jugement.
Dans
une vaine tentative de donner un caractère politique à ce qui en fait n’est qu’une
fuite en avant devant l’étau de la justice qui commençait à se resserrer sur
Ntaganda pour les crimes qu’il avait commis sous l’UPC en Ituri, cette bande
d’officiers félons rebaptisés M23 se sont mis à formuler des revendications
creuses et fantaisistes.
Ce mouvement revendique des grades pour ses membres dans les FARDC alors que,
suite à leur intégration dans les FARDC, Bosco Ntaganda avait été fait général
de brigade et son lieutenant Makenga colonel.
Ils réclament leur intégration dans la vie politique nationale alors que les
cadres civils de l’ex-mouvement politico-militaire CNDP, devenu parti politique
en exécution des accords de paix de Goma de 2009, siégeaient depuis lors dans les
institutions politiques (Sénat et Gouvernement provincial du Nord-Kivu). Le président
de ce parti, Sénateur de son état, a du reste dénoncé cette pantalonnade.
Ils sollicitent pardon et amnistie pour des crimes perpétrés naguère en Ituri
et au Kivu, mais ils commettent de nouveaux crimes pour appuyer cette requête. Les
soubassements de cette agitation n’ont donc rien à voir avec des engagements
souscrits en 2009 et que le Gouvernement congolais n’aurait pas honorés.
Le
Gouvernement est d’autant plus préoccupé par cette situation que la promenade
séditieuse de la bande à Ntaganda et Makenga avait provoqué le déplacement de milliers
de familles congolaises qui, fort heureusement, comme ont pu le constater de
visu le Premier ministre et sa délégation qui leur ont rendu visite jeudi 7
juin, sont entrain de regagner leurs foyers suite aux revers infligés aux
mutins par les FARDC.
Bien plus, des informations de sources variées mais concordantes, font état de
soutiens dont bénéficierait la bande à Ntaganda à partir du Rwanda et de l’existence
d’une filière de recrutement de combattants pour Ntaganda dans ce pays voisin,
membre, comme la RDC de l’Union Africaine (UA), de la Communauté Economique des
Pays des Grands Lacs (CEPGL) et de la Conférence Internationale sur la Région
des Grands Lacs (CIRGL).
Le
Gouvernement de la République, tenant compte de la gravité des faits s’est
donné le temps de les corroborer avec ses propres sources. Une enquête de nos
services a été diligentée pendant qu’étaient mis en œuvre, parallèlement, les
mécanismes conjoints institués il y a quelques années par la RDC et le Rwanda à
l’effet de les vérifier ensemble sur terrain.
Ceux
qui ont vu dans cette approche un signe de complaisance ont tort. Le
Gouvernement a à cœur de procéder avec professionnalisme et responsabilité pour
une défense efficace et utile de nos Intérêts Nationaux.
Aujourd’hui,
sur base des conclusions des enquêtes de nos services, nous sommes en mesure d’affirmer
ce qui suit :
1) Parmi
les miliciens de la bande à Ntaganda et Makenga, se sont trouvés quelques 200 à
300 éléments recrutés sur le territoire du Rwanda par un réseau actif dans ce
pays voisin;
2) Plusieurs
combattants ainsi recrutés sont des ressortissants rwandais. Infiltrés en RDC,
ils ont subi un entraînement sommaire avant d’être déployés au front
contre les FARDC ;
3) Il
y a des mineurs d’âge et de très jeunes gens parmi ces combattants dont le
Premier ministre et sa délégation ont pu voir un échantillon à Goma ;
4) Alors
que dans leur fuite, les mutins avaient abandonné tout leur armement, soit 38
tonnes récupérées par les FARDC, il a été noté un décuplement de la puissance
de feu de la bande à Ntaganda et Makenga dès son arrivée dans le triangle Runyonyi-Tshianzu-Mbuzi
accoté à la ligne frontalière entre la RDC et le Rwanda alors que les mutins avaient
abandonné dans leur fuite tout leur armement, soit 38 tonnes récupérées par les
FARDC ;
5) Les
alliances contre nature se sont établies entre la bande à Ntaganda et Makenga d’une
part, et les mutins d’autre part, l’objectif étant de se partager le butin de
leurs pillages ;
6) Il
en est de même des FDLR que les FARDC étaient en voie de réduire et qui
paradoxalement sont devenus des alliés de la bande à Ntaganda et Makenga comme le
démontrent la présence aux cotés de ces derniers du colonel Mandevu des FDLR à
Runyonyi et des combattants FDLR naguère rapatriés en bonne et due forme au
Rwanda par la Monusco parmi les éléments M23 faits prisonniers près de
Runyonyi.
Ces
éléments d’information, précis, détaillés, vérifiés et contre-vérifiés,
viennent des sources propres du Gouvernement qui s’est impliqué dans une
patiente collecte de faits. Ils soulèvent un problème sérieux à résoudre d’urgence
dans la synergie entre Etats de la région des Grands Lacs dans leur lutte
contre les forces négatives.
Une
chose est indéniable : le territoire rwandais a servi à la préparation et à la
perpétration d’une conspiration qui, après avoir commencé comme une simple
mutinerie, évolue dangereusement vers un schéma de rupture de la paix entre
deux pays de la région des Grands Lacs.
Ce
déplorable développement a été au centre de toutes les réunions bilatérales entre
experts congolais et rwandais qui se tiennent depuis quelques jours. Le
Gouvernement congolais dénonce la passivité ou plus des autorités rwandaises
face à ces atteintes graves à la paix et à la sécurité de la RDC ourdies à
partir de leur territoire.
Le
Gouvernement réaffirme sa détermination à protéger la vie des Congolais et
toutes les dispositions ont été prises pour débarrasser les provinces du Kivu
du cancer de la violence systémique qui hypothèque leur décollage économique.
Le
Gouvernement n’envisage pas de négociations avec les groupes armés, CNDP, M23
ou FDLR qui sont invités à se rendre aux autorités congolaises ou à la Monusco
en déposant les armes, au risque de subir la puissance de feu des
FARDC.
Le Gouvernement engage les leaders des communautés du Nord et du Sud-Kivu à
isoler et dénoncer tous ceux qui, dans ces communautés, trahissent l’idéal
patriotique en se faisant les instruments de la déstabilisation de leurs provinces
et de la RDC. Armée nationale et républicaine, les FARDC ne seront jamais
organisées sur une base communautariste.
Le
Chef de l’Etat, Commandant Suprême de l’armée, et le Gouvernement, félicitent
les troupes FARDC déployées contre l’ennemi pour leur bravoure, leur
détermination et leur discipline dans la traque des criminels du CNDP, du M23,
des FDLR et de tous les autres groupes armés. Leur comportement irréprochable
vis-à-vis de nos populations civiles en zones opérationnelles est hautement
apprécié.
La
quasi-totalité des éléments FARDC issus de toutes les communautés du Kivu sur
lesquels les renégats et leurs maîtres à penser comptaient pour donner de l’ampleur
à leurs projets funestes ont fait preuve d’une loyauté républicaine totale qui
est à leur honneur. Le Gouvernement est fier du choix du devoir que ces compatriotes
en uniforme ont fait.
Le
Gouvernement exprime de manière solennelle son appréciation positive du
partenariat efficace qui s’est établi sur terrain entre les FARDC et la force
Monusco. Il salue par ailleurs le rôle joué par la Monusco dans la protection
des populations civiles et en appui apporté aux FARDC.
Convaincu
qu’il existe un lien de causalité entre l’insécurité à l’Est du pays et l’exploitation
illégale des ressources naturelles, le Gouvernement qui va lancer le mécanisme
de certification et de traçabilité des substances minérales tel que
recommandé par la CIRGL a décidé de sanctionner sévèrement tous les comptoirs,
entités de traitement et négociants qui continueront d’acheter des minerais
dans les sites non certifiés et non validés. En outre, il sera procédé à la
déchéance et l’annulation de tous les droits et titres miniers en état de gel
au Nord-Kivu. Obligation est faite par ailleurs dorénavant aux titulaires de
permis miniers
de recherche valides de les transformer rapidement en permis d’exploitation en
vue de construire des usines de transformation de minerais dans notre pays.
Le
Gouvernement de la République Démocratique du Congo entend user de toutes les
voies diplomatiques dans la région pour dénoncer et faire échec à cette énième aventure
qui porte atteinte à la paix et la sécurité dans notre pays. Il entend de même
poursuivre sans relâche la traque de toutes les forces négatives y compris le
CNDP, le M23, les FDLR, les ADF-NALU et la LRA vont se poursuivre en
coordination avec tous les pays de la région qui le souhaitent.
Fait à Goma le 09 juin 2012
Lambert Mende Omalanga
(Ministre des Médias, Relations
avec le Parlement et Initiation à la Nouvelle Citoyenneté, Porte-Parole du Gouvernement)
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