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vendredi 15 juin 2012

Discours de la Haute Représentante, Mme Catherine Ashton, sur la situation en Rdc

Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les membres du Parlement européen,
La République démocratique du Congo (RDC) est un pays qui met en évidence que l'action de l'UE doit s'inscrire dans la durée pour porter ses fruits et un pays dans lequel, avec le temps, nous parvenons à peser sur le cours des choses. Dans le cadre de mon intervention, j'aborderai plus particulièrement deux thèmes: le suivi démocratique après les élections de novembre 2011, ainsi que la sécurité et la situation humanitaire dans l'est du Congo.
La RDC est un État fragile et une jeune démocratie. Elle se relève peu à peu d'une longue période de guerre et de dénuement. La voie du redressement et de la stabilisation n'est pas sans écueils, mais l'UE est déterminée à continuer d'aider la RDC à consolider sa démocratie et à accélérer son développement. Les élections de 2006 ont constitué une étape importante dans sa marche vers un avenir plus démocratique, mais elles n'ont pu se tenir qu'avec l'aide massive de la communauté internationale. Celles de 2011, en revanche, ont été principalement financées et organisées par la RDC elle-même. Les problèmes qui subsistaient étaient considérables, le déroulement du scrutin n'a sans doute pas été parfait mais il n'en demeure pas moins qu'il s'agit là d'une avancée que nous devons saluer. L'UE a continué d'apporter une aide au processus électoral, dans le cadre à la fois de sa contribution, qui a atteint 47,5 millions d'euros, et de l'envoi d'une mission d'observation électorale.
Je saisis cette occasion pour rendre hommage à la détermination et aux efforts acharnés de la mission d'observation électorale de l'UE qui, sous la houlette de l'Honorable Parlementaire Mariya Nedelcheva, a accompli son travail dans des conditions particulièrement difficiles. Dans le rapport final de la mission (qui a été bien accueilli par l'ensemble des acteurs politiques en RDC), l'accent est mis sur le fait que l'ampleur des irrégularités et des fraudes a affaibli, si ce n'est compromis, la crédibilité du résultat, et que l'introduction de réformes et d'améliorations de grande envergure revêt une importance capitale pour l'avenir.
Néanmoins, dans les circonstances actuelles, toutes les parties ont reconnu qu'il serait impossible de recompter les bulletins de vote ou d'organiser un nouveau scrutin. À nos yeux, la priorité est donc qu'il soit donné suite aux recommandations très utiles formulées dans le rapport de la mission d'observation concernant les réformes à mener. Ces recommandations constitueront un élément important du dialogue entre l'UE et le gouvernement de la RDC.
À court terme, nous espérons que des améliorations importantes seront mises en place lors des élections locales et provinciales qui doivent être organisées au cours des prochaines années.
 Aussi, dans l'immédiat, l'UE coopérera-t-elle plus étroitement avec le nouveau gouvernement de la RDC pour améliorer le processus démocratique et renforcer la gouvernance du pays. Je juge encourageante la nomination récente de M. Ponyo Matata aux fonctions de Premier ministre et des nouveaux ministres qui travailleront à ses côtés. M. Matata a collaboré étroitement avec l'UE par le passé et il a obtenu de bons résultats en tant que ministre des finances de l'ancien gouvernement de la RDC et en tant qu'ordonnateur national du Fonds européen de développement.
Les engagements qu'il a pris dans son discours inaugural devant l'assemblée nationale sont encourageants et ouvrent de nouvelles perspectives sur le plan du dialogue politique et de l'évolution vers une meilleure gouvernance. Le chef de notre délégation a déjà rencontré plusieurs ministres du nouveau gouvernement et commence à coopérer étroitement avec eux. Les premières impressions sont positives, mais elles doivent être confirmées par des actes car les engagements seuls ne suffisent pas.
Nous disposons, pour l'aide au développement, de moyens financiers importants, que nous souhaitons utiliser. Notre objectif est de faire en sorte que ces moyens soient utilisés de manière aussi productive que possible de manière à ce que la RDC puisse relever les défis de demain.
Par ailleurs la situation dans l'est du Congo s'est améliorée au cours des trois dernières années. Mais elle reste extrêmement fragile et, comme en témoignent les événements récents, le risque subsiste de voir cette région sombrer à nouveau dans la guerre et le chaos. Notre priorité est de travailler avec les partenaires internationaux et avec les gouvernements de la région pour empêcher que cela ne se reproduise.
La mutinerie de certains éléments des Forces armées congolaises - d'anciens rebelles ont en effet repris le maquis - a provoqué de nouveaux heurts dans les Kivu. Je suis horrifiée par les massacres perpétrés récemment par plusieurs groupes armés et je les condamne avec la plus grande fermeté. Une des conséquences en a été l'augmentation importante, au cours des derniers mois, du nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays dont le nombre s'élève à l'heure actuelle à plus de deux millions. L'aide humanitaire de l'UE s'élève d'ores et déjà à 63 millions d'euros en 2012, et il est clair que la crise humanitaire n'est pas terminée.
L'UE est attachée à l'unité et à la souveraineté de la RDC. Je condamne la rébellion et je soutiens avec force le rétablissement de l'autorité de l'État dans l'est du Congo. À cet égard, il faut, bien entendu, tenir compte des préoccupations légitimes des voisins immédiats de la RDC en matière de sécurité.
Je suis, à ce sujet, préoccupée par les informations récentes communiquées par la mission de l'ONU en RDC, qui font état d'appuis à cette rébellion venus de l'extérieur du pays. S'ils venaient à être confirmés, ces faits nouveaux mettraient en péril la dynamique régionale positive amorcée entre la RDC et le Rwanda et affaibliraient leur coopération, qui n'a pas été étrangère à l'amélioration de la situation observée dans l'est du Congo ces dernières années.
Des messages clairs ont été adressés à l'ensemble des parties afin de les inciter à adopter une approche constructive dans les circonstances actuelles. L'UE rappelle que tous les groupes armés illégaux doivent déposer les armes et éviter toute nouvelle violence. La coopération régionale est essentielle pour faire face à un certain nombre des problèmes auxquels est confrontée la région des Grands Lacs, notamment l'exploitation illégale des ressources naturelles (les "minerais qui alimentent les conflits") et un meilleur approvisionnement énergétique pour tous.
Nous soutenons les activités menées par la MONUSCO en RDC et nous nous félicitons de la prolongation de son mandat à la fin juin. La protection des civils dans l'est du Congo demeurera une mission importante de la MONUSCO dans les années à venir. Il ne saurait toutefois y avoir de paix durable au Congo si l'État de droit n'est pas assuré et si la justice n'y est pas appliquée. C'est pourquoi je suis favorable au mandat d'arrêt lancé par le procureur contre le général Bosco Ntaganda, initiative dont je me félicite. Il s'agit d'un signe clair que l'impunité ne l'emportera pas et d'une source d'espoir pour les populations qui sont en proie aux exactions de groupes armés.
Notre contribution à la reconstruction du système judiciaire fait également partie intégrante de la vaste campagne menée contre les violences sexuelles et basées sur le genre en RDC. Tout le monde doit savoir que de tels crimes peuvent être punis et qu'ils le seront. Mais les programmes de l'UE visent également à s'attaquer aux causes profondes ainsi qu'aux symptômes de ce problème.
L'UE a soutenu les efforts déployés pour que la RDC reste à l'ordre du jour du Conseil des droits de l'homme et pour inciter le gouvernement à coopérer avec le Conseil. La réforme du secteur de la sécurité demeure elle aussi essentielle. Nous y contribuons dans le cadre de deux missions: EUSEC RD Congo, qui contribue à la restructuration de l'armée et EUPOL, qui contribue à la réforme de la police. J'espère pouvoir continuer à contribuer à ce processus au moyen des instruments les plus appropriés, compte tenu du mandat futur de la mission de maintien de la paix des Nations unies (MONUSCO). Toutefois, la réforme du secteur de la sécurité ne pourra aboutir que si les autorités congolaises y adhèrent de manière durable, à tous les niveaux.
En conclusion, je tiens à réaffirmer que l'UE est déterminée à agir dans la durée pour aider la RDC et la région des Grands Lacs à sortir des conflits du passé et à construire un avenir durable, plus prospère et plus pacifique. C'est la population de la RDC que nous sommes déterminés à aider, et nous entendons le faire grâce à une approche globale qui s'attaque aux nombreux problèmes auxquels elle est confrontée. Nous sommes déterminés à agir et notre détermination ne faiblira pas.

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