Monsieur le président, Mesdames et Messieurs
les membres du Parlement européen,
La République démocratique du Congo (RDC) est
un pays qui met en évidence que l'action de l'UE doit s'inscrire dans la durée
pour porter ses fruits et un pays dans lequel, avec le temps, nous parvenons à
peser sur le cours des choses. Dans le cadre de mon intervention, j'aborderai
plus particulièrement deux thèmes: le suivi démocratique après les élections de
novembre 2011, ainsi que la sécurité et la situation humanitaire dans l'est du
Congo.
La RDC est un État fragile et une jeune
démocratie. Elle se relève peu à peu d'une longue période de guerre et de
dénuement. La voie du redressement et de la stabilisation n'est pas sans
écueils, mais l'UE est déterminée à continuer d'aider la RDC à consolider sa
démocratie et à accélérer son développement. Les élections de 2006 ont
constitué une étape importante dans sa marche vers un avenir plus démocratique,
mais elles n'ont pu se tenir qu'avec l'aide massive de la communauté
internationale. Celles de 2011, en revanche, ont été principalement financées
et organisées par la RDC elle-même. Les problèmes qui subsistaient étaient
considérables, le déroulement du scrutin n'a sans doute pas été parfait mais il
n'en demeure pas moins qu'il s'agit là d'une avancée que nous devons
saluer. L'UE a continué d'apporter une aide au processus électoral, dans
le cadre à la fois de sa contribution, qui a atteint 47,5 millions d'euros, et
de l'envoi d'une mission d'observation électorale.
Je saisis cette occasion pour rendre hommage
à la détermination et aux efforts acharnés de la mission d'observation
électorale de l'UE qui, sous la houlette de l'Honorable Parlementaire Mariya Nedelcheva,
a accompli son travail dans des conditions particulièrement difficiles. Dans le
rapport final de la mission (qui a été bien accueilli par l'ensemble des
acteurs politiques en RDC), l'accent est mis sur le fait que l'ampleur des irrégularités
et des fraudes a affaibli, si ce n'est compromis, la crédibilité du
résultat, et que l'introduction de réformes et d'améliorations de grande
envergure revêt une importance capitale pour l'avenir.
Néanmoins, dans les circonstances actuelles,
toutes les parties ont reconnu qu'il serait impossible de recompter les
bulletins de vote ou d'organiser un nouveau scrutin. À nos yeux, la priorité
est donc qu'il soit donné suite aux recommandations très utiles formulées dans
le rapport de la mission d'observation concernant les réformes à mener. Ces
recommandations constitueront un élément important du dialogue entre l'UE et le
gouvernement de la RDC.
À court terme, nous espérons que des
améliorations importantes seront mises en place lors des élections locales et
provinciales qui doivent être organisées au cours des prochaines années.
Aussi, dans l'immédiat, l'UE
coopérera-t-elle plus étroitement avec le nouveau gouvernement de la RDC pour
améliorer le processus démocratique et renforcer la gouvernance du pays.
Je juge encourageante la nomination récente de M. Ponyo Matata aux
fonctions de Premier ministre et des nouveaux ministres qui travailleront à ses
côtés. M. Matata a collaboré étroitement avec l'UE par le passé et il a
obtenu de bons résultats en tant que ministre des finances de l'ancien
gouvernement de la RDC et en tant qu'ordonnateur national du Fonds européen de
développement.
Les engagements qu'il a pris dans son
discours inaugural devant l'assemblée nationale sont encourageants et ouvrent
de nouvelles perspectives sur le plan du dialogue politique et de
l'évolution vers une meilleure gouvernance. Le chef de notre délégation a déjà
rencontré plusieurs ministres du nouveau gouvernement et commence à coopérer
étroitement avec eux. Les premières impressions sont positives, mais elles
doivent être confirmées par des actes car les engagements seuls ne
suffisent pas.
Nous disposons, pour l'aide au développement,
de moyens financiers importants, que nous souhaitons utiliser. Notre objectif
est de faire en sorte que ces moyens soient utilisés de manière aussi
productive que possible de manière à ce que la RDC puisse relever les défis de
demain.
Par ailleurs la situation dans l'est du Congo
s'est améliorée au cours des trois dernières années. Mais elle reste
extrêmement fragile et, comme en témoignent les événements récents, le
risque subsiste de voir cette région sombrer à nouveau dans la guerre et le
chaos. Notre priorité est de travailler avec les partenaires internationaux et
avec les gouvernements de la région pour empêcher que cela ne se
reproduise.
La mutinerie de certains éléments des Forces
armées congolaises - d'anciens rebelles ont en effet repris le maquis - a
provoqué de nouveaux heurts dans les Kivu. Je suis horrifiée par les massacres
perpétrés récemment par plusieurs groupes armés et je les condamne avec la plus
grande fermeté. Une des conséquences en a été l'augmentation importante, au
cours des derniers mois, du nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays
dont le nombre s'élève à l'heure actuelle à plus de deux millions. L'aide
humanitaire de l'UE s'élève d'ores et déjà à 63 millions d'euros en 2012,
et il est clair que la crise humanitaire n'est pas terminée.
L'UE est attachée à l'unité et à la
souveraineté de la RDC. Je condamne la rébellion et je soutiens avec force le
rétablissement de l'autorité de l'État dans l'est du Congo. À cet égard, il
faut, bien entendu, tenir compte des préoccupations légitimes des voisins
immédiats de la RDC en matière de sécurité.
Je suis, à ce sujet, préoccupée par les
informations récentes communiquées par la mission de l'ONU en RDC, qui
font état d'appuis à cette rébellion venus de l'extérieur du pays. S'ils
venaient à être confirmés, ces faits nouveaux mettraient en péril la
dynamique régionale positive amorcée entre la RDC et le Rwanda et
affaibliraient leur coopération, qui n'a pas été étrangère à l'amélioration de
la situation observée dans l'est du Congo ces dernières années.
Des messages clairs ont été adressés à
l'ensemble des parties afin de les inciter à adopter une approche constructive
dans les circonstances actuelles. L'UE rappelle que tous les groupes armés
illégaux doivent déposer les armes et éviter toute nouvelle violence. La coopération régionale est essentielle pour faire face
à un certain nombre des problèmes auxquels est confrontée la région des Grands
Lacs, notamment l'exploitation illégale des ressources naturelles (les
"minerais qui alimentent les conflits") et un meilleur
approvisionnement énergétique pour tous.
Nous soutenons les activités menées par la
MONUSCO en RDC et nous nous félicitons de la prolongation de son mandat à la
fin juin. La protection des civils dans l'est du Congo demeurera une mission
importante de la MONUSCO dans les années à venir. Il ne saurait toutefois y
avoir de paix durable au Congo si l'État de droit n'est pas assuré et si la
justice n'y est pas appliquée. C'est pourquoi je suis favorable au mandat d'arrêt
lancé par le procureur contre le général Bosco Ntaganda, initiative dont je me
félicite. Il s'agit d'un signe clair que l'impunité ne l'emportera pas et d'une
source d'espoir pour les populations qui sont en proie aux exactions de groupes
armés.
Notre contribution à la reconstruction du
système judiciaire fait également partie intégrante de la vaste campagne menée
contre les violences sexuelles et basées sur le genre en RDC. Tout le monde
doit savoir que de tels crimes peuvent être punis et qu'ils le seront. Mais les
programmes de l'UE visent également à s'attaquer aux causes profondes ainsi
qu'aux symptômes de ce problème.
L'UE a soutenu les efforts déployés pour que
la RDC reste à l'ordre du jour du Conseil des droits de l'homme et pour inciter
le gouvernement à coopérer avec le Conseil. La réforme du secteur de la
sécurité demeure elle aussi essentielle. Nous y contribuons dans le cadre de
deux missions: EUSEC RD Congo, qui contribue à la restructuration de l'armée et
EUPOL, qui contribue à la réforme de la police. J'espère pouvoir continuer à
contribuer à ce processus au moyen des instruments les plus appropriés, compte
tenu du mandat futur de la mission de maintien de la paix des Nations unies
(MONUSCO). Toutefois, la réforme du secteur de la sécurité ne pourra aboutir
que si les autorités congolaises y adhèrent de manière durable, à tous les
niveaux.
En conclusion, je tiens à réaffirmer que l'UE
est déterminée à agir dans la durée pour aider la RDC et la région des Grands
Lacs à sortir des conflits du passé et à construire un avenir durable, plus
prospère et plus pacifique. C'est la population de la RDC que nous sommes
déterminés à aider, et nous entendons le faire grâce à une approche globale qui
s'attaque aux nombreux problèmes auxquels elle est confrontée. Nous sommes
déterminés à agir et notre détermination ne faiblira pas.
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