Le Gouvernement est en passe d’ouvrir la boîte de
pandore de toutes les complicités relatives au détournement des USD 3 millions
(sur les USD 12 millions), destinés à la construction de la Station d’atterrage
de la fibre optique à Muanda. Tout peut arriver à travers une série de procès
que risquent de lui attenter en cascades ses fournisseurs et dont l’issue peut
ne pas lui être favorable. Sans raison qui vaille, l’ADG intérimaire de la
Poste (SCPT), sous l’impulsion du ministère des Postes, Nouvelles technologies
de la Télécommunication (PNTC), soufflé par le ministère des Finances (pourtant
pas organe technique dans le dossier), décide de résilier le contrat qui lie
son entreprise à la société
Smart Ideas Trading (SIT), l’entrepreneur de droit indien qui construit
l’infrastructure à Muanda. Une belle boulette qui va léguer à l’Etat une vraie
patate chaude, selon des experts qui pensent que dans ce dossier, les conflits
d’intérêt ont prévalu en lieu et place de l’intérêt général. Lorsqu’en novembre
2011 (les 2, 3 et 4), à la demande du Vice-Premier ministre Louis-Alphonse
Koyagialo, le ministère des PNTC décide de révisiter le contrat signé le 25
janvier 2011 entre la SCPT Sarl et SIT, laquelle a remporté, après un conseil
d’adjudication, le marché de la construction de la Station, l’option est de
mettre les bouchées doubles après le temps perdu consécutif à ce détournement
des fonds destinés à sa mise en œuvre et finalement récupérés jusqu’au dernier
centime grâce à l’opiniâtreté de Joseph Kabila dans sa lutte contre la
corruption. Des experts de la Présidence, de la Primature, de la Vice-primature
(PNTC), du ministère des Finances et de la SCPT ainsi que le Représentant de
l’entrepreneur recommandent, entre autres, au ministère des Finances la main
levée des comptes de la SCPT où sont logés le crédit BIAC destiné à la
construction de la Station d’atterrage de la fibre optique à Muanda, compte
garanti par l’Etat congolais. La commission invite le Gouvernement à payer dans
un délai raisonnable, par crainte des pénalités, le solde de USD 8.055.849,35
au Consortium WACS, propriétaire du backborn qui fournira la RDC
en connexion Internet haut débit. Enfin, la Commission demande à SIT, qui va
finalement toucher USD 8.955.849,30 au lieu de USD 12 millions, d’achever les
travaux dans le respect de la date butoir du 28 décembre 2011, fortement
recommandée par WACS, et qui joue sur la crédibilité de la RDC dans une
démarche qui concerne nombre de pays de la côte occidentale d’Afrique, déjà
prêts pour l’essai. Coup de théâtre cependant. En retour de courrier et sans
véritablement entrer dans la profondeur du dossier, prétextant abusivement le
caractère léonin du contrat, une façon de faire vibrer la corde sensible, le ministre
des Finances proposera aussi sec, comme exutoire, la résiliation du contrat,
mettant en doute la bonne foi de SIT et mettant en cause sa moralité.
‘‘L’intérêt étant la mesure de toute action, (…) il lui revient [à l’Etat,
ndlr] de dénoncer ce contrat (...) et de solliciter un autre fournisseur (…)’’,
écrit en censeur Matata Ponyo, repris en écho par le VPM Louis-Alphonse
Koyagialo qui venait tout d’un coup de découvrir, ‘‘après l’examen minutieux
dudit contrat… un déséquilibre criant équipollent au dol en défaveur de la
SCPT’’ et qui entérine ‘‘la résiliation pure et simple du contrat’’. Aux yeux
des analystes, cette décision s’apparente à une vengeance contre le Chef de
l’Etat qui a arraché, jusqu’au dernier morceau, le bifteck de USD 3 millions de
la bouche des kuluna en cravate. Des mauvaises langues voient d’ailleurs en
cela un agenda caché pour écarter SIT, spécialiste dans le secteur, se
positionner derrière une société écran en vue de se
partager des prébendes et des commissions occultes et léguer à la RDC un
travail bâclé, et tout cela, jamais sans conséquences pour les finances
publiques, pour la Révolution de la Modernité et pour la justice
distributive, autre cheval de bataille de Joseph Kabila pour l’assainissement
du climat des affaires très critiqué en RDC.
Sordide manœuvre
A sonder les échanges de correspondances, on comprend
aisément que le ministre des Finances a tout simplement ignoré les détails de
l’offre technique et évoque, sans le vérifier, le caractère dolosif du contrat.
SIT a évalué l’offre à USD 12 millions du fait de la somme de deux types de
constructions à réaliser pour protéger l’équipement. Outre les préfabriqués,
SIT avait prévu des compartiments en durs (murs anti-incendie) pour abriter les
containers des équipements sensibles, de ce que la station en construction est
situé à 600 m de l’océan et toute construction en acier (container) est
susceptible d’être entamée par la rouille au regard de l’air humide et salé qui
y circule. Ce qui déboucherait au même travail au bout d’un certain temps. Il
faut relever en outre que SIT a étalé les preuves de sa bonne foi en réalisant
dans un délai record de 60 jours ce qui était dans les prescrits du contrat. En
accusant faussement l’entreprise indienne de déséquilibre, le ministère des
Finances a fait fi des impérities de la SCPT qui n’avait jamais libéré, comme
convenu, la première tranche de 80 % du montant du contrat et que, ayant
succombé à la tentation, des responsables de la SCPT avait détourné, en
complicité avec ceux qu’on appelle ‘‘Kuluna en cravate’’, le quart de ce
montant. Faut-il indiquer en plus que SIT a préfinancé les travaux de génie
civil en réalisant le beach manhole (point d’atterrage) avant le 16 février 2010,
épargnant ainsi le gouvernement de l’opprobre et des pénalités de la part du
fournisseur WACS. Les observateurs s’interrogent si on peut évoquer la mauvaise
foi de la part de l’opérateur indien alors que la SCPT n’avait jamais honoré
ses factures d’eau et d’électricité et encore moins les frais d’acquisition du
terrain, honorés plutôt par SIT. ‘‘Pourquoi, comme sortie d’une léthargie, le
gouvernement qui a garanti le crédit à la BIAC s’attaque à une entreprise qui a
accompli sa part du contrat au prorata de ce qu’elle a reçu’’.
Et déjà, SIT, dont les travailleurs (une trentaine de
compatriotes) moisissent depuis bientôt 5 mois à Muanda sans salaires, pourrait
trainer la SCPT, comme stipulé dans le contrat, devant les instances
judiciaires tant et si bien que les textes stipulent clairement que la SCPT ne
peut s’engager avec une autre entreprise endéans 5 ans. Selon des experts, ces
atermoiements assombrissent de plus en plus le climat des affaires en RDC et
les banques réfléchiront désormais à deux fois avant de s’engager. En effet, la
SCPT devra payer à ce jour à la BIAC des intérêts cumulatifs de l’ordre de USD
300.000. D’autre part, le bureau d’étude, BTC, qui a confirmé la qualité du
travail abattu par SIT, presse lui le gouvernement à rentrer dans ces droits,
sans oublier que le pays risque d’être confronté à des pénalités que peuvent
lorgner des fonds vautours.
L’avenir de la fibre optique s’assombrit en RDC,
laquelle risque de demeurer encore longtemps dans le Moyen-âge des
télécommunications. Il n’est cependant pas tard de relancer des négociations
avec la firme indienne. Et les autorités peuvent initier des pourparlers avec
elle afin de régler à l’amiable cette affaire qui va éviter à la République des
frais exorbitants qui peuvent découler des procès et de perdre inutilement du
temps pour l’intérêt du haut débit à partir duquel devra prendre le pas la
Révolution de la Modernité. Et le Chef de l’Etat Joseph Kabila Kabange n’a pas
tapé à côté en y investissant près de USD 120 millions.
Emmanuel Makila
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