L’enceinte et les environs de la Cour militaire a connu, dès
le matin du vendredi, une ambiance particulière avant le début du procès. Au
coin des avenues Lubefo et Batetela, une jeep de la police d’intervention
rapide y a été postée. Il a été également observé un nombre pas négligeable des
militaires de la Justice militaire.
La Cour qui ne dispose pas assez de bancs a eu à recourir à
la location des chaises en plastique pour recevoir ses visiteurs occasionnels.
Elle ne sera pas en tout cas en mesure de louer à chaque audience des chaises.
Si le procès n’est pas délocalisé, les petits commerçants du coin pourraient se
faire de l’argent en donnant en location leurs chaises. Au procès Botethi qui
s’est tenu au camp Kokolo, les femmes et les enfants amenaient des tas de chaises
en plastique qu’ils faisaient louer à 500 Fc.
Outre les avocats de la défense et de la partie civile, les
membres de la Voix des Sans voix, des membres des diverses organisations de la
société civile, des hommes politiques, plusieurs personnes parmi lesquelles des
membres des familles, amis et connaissances des victimes et des accusés ont
rehaussé de leur présence à la première audience.
Le local étant conçu pour une salle à manger et de séjour
sert depuis des années à la salle d’audiences. Il n’a pu recevoir toute
l’assistance et a attiré la curiosité des visiteurs à cause de son état de
délabrement très avancé. D’autres personnes se sont mises devant l’entrée
principale de la salle d’audiences. Sur l’extrait de rôle, l’audience était
annoncée pour 9 heures. Mais, elle n’a débuté qu’aux environs de 11 heures 25
minutes.
La plupart des procès qui se tiennent devant les cours
et tribunaux militaires ne commencent pas aux heures prévues. Cas des procès
Franck Ngycke, Firmin Yangambi, Botethi, René de Haes… Raison avancée, la
difficulté d’extraire les prévenus de la Prison centrale de Makala. En
attendant le début de la première audience, les avocats de la défense et des
parties civiles commençaient déjà à transpirer. La salle n’étant pas aérée,
tous ceux qui étaient à l’intérieur sont sortis avec une partie des habits
mouillés.
Dès que l’audience a commencé, personne n’a voulu rater
l’occasion de voir comment les membres de la Cour allaient condamner les
présumés assassins de Floribert Chebeya et de son chauffeur Fidèle Bazana.
Plusieurs avocats sont restés dehors par manque de place. Les professionnels
des médias nationaux et étrangers ont connu la même difficulté. A la veille du
début des audiences, certains avocats ont suggéré que le procès se tienne ailleurs.
En écoutant l’un des avocats des parties au procès, la Cour
comptait sur la magnanimité de la Voix des sans voix pour un soutien financier
afin d’organiser matériellement ce procès. La sonorisation a fait défaut sur
toute la ligne. Les techniciens se sont démenés sous la pression des militaires
commis à la Cour militaire d’arranger la sonorisation. Ils ont réussi à mettre
au point la sonorisation presqu’à la fin de l’audience. « C’est propre aux
Congolais l’improvisation », pouvait-on entendre de la foule excédée
d’avoir loupé les premières auditions, surtout l’identification des prévenus.
A l’occasion, la Cour a prévu la sonorisation qui n’a pu
fonctionner que vers la fin de l’audience. Les personnes présentes dans la
salle pouvaient à peine entendre les mots prononcés par les parties au procès.
Il est presque 12 heures moins, une jeep bleue encadrée par deux autres avec
gyrophares de la police nationale fait son irruption dans l’enceinte de la
cour. Son occupant sort en tenue de général de la police. Il s’agit du Général
John Numbi.
Il est conduit directement dans la salle pendant ce temps la
cour procède à l’identification des prévenus. Le Général quitte la cour peu
avant la fin de l’audience. La petite foule se déplace pour le voir et le huer
brièvement. Il repart sans commentaire de la part de la foule.
Il sera suivi par un autre Général qui n’est autre Jean de
Dieu Oleko, inspecteur provincial de la police ville de Kinshasa. Pendant que
les parties s’accordaient de la date de la remise, le président de la cour
ordonne à la police d’audience de le faire entrer dans la salle. Il n’a pu
décliner son identité. Il lui est prié de revenir à la prochaine audience qui
sera tenue à un endroit à préciser.
Pendant l’audience, un militaire souffle à un avocat de la
partie civile, « Me … Nous sommes envahis par les éléments du bataillon
Simba ». Au même moment, les parties s’accordent à la délocalisation du
procès puis que la cour militaire de la Gombe n’offre pas les garanties de
sécurité.
Il est environ 14 heures mois, cour annonce la suspension de
l’audience pour sa reprise à un endroit à déterminer. Les avocats et
l’assistance présents dans la salle sortent avec leurs toges et habits mouillés
comme s’ils étaient dans un terrain de football. Même ceux qui n’étaient sur
l’aire de jeu en sont sortis mouillés.
A la fin de l’audience, un groupe de jeunes retranché au
croisement des avenues Lubefo et Batetela détenait un calicot où l’on pouvait
lire « nous voulons tous connaître la vérité. Mais pourquoi
Numbi ? ». Ces jeunes sont rentrés avec leur inscription sans
trouver de réponse à leur interrogation. Ils seront encore et certainement au
rendez-vous avec le même message. Destiné à qui ?
C’est parti peut-être pour long procès qui oppose huit
policiers face au ministère public, aux parties civiles familles Chebeya,
Bazana et la Voix des Sans voix. Si les faits mis à charge des prévenus sont
établis, ils risquent la peine de mort.
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