Le Monde |
Par Muhammad Ali
A l'est de la République démocratique du Congo, soit au coeur de l'Afrique, cette région est l'une des plus belles du monde. Autour d'un lac, des cultures montent en terrasses jusqu'au sommet des collines. Eau, soleil, terres fertiles, le Kivu aurait tout pour vivre heureux.
Hélas pour lui, son sous-sol regorge de matières premières.
Principalement la cassitérite, un minerai dont on tire l'étain. Mais
aussi le coltan, autre minerai recherché. Et bientôt le pétrole,
qui vient d'être découvert. Attirées par ces richesses faciles, des
bandes de mercenaires et de pillards de toutes sortes écument le
territoire depuis des décennies et martyrisent les populations.
De temps en temps, des voix s'élèvent. De temps en temps, le calme
revient. Et puis recommence le silence. Et reprennent les viols et les
massacres. Pour tenter de limiter
ces atrocités, l'ONU a envoyé sur place, en 1999, une force de paix qui
compte aujourd'hui dix-sept mille soldats. Rappelons que ces dix-sept
mille casques bleus y sont au nom de la communauté internationale,
c'est-à-dire en notre nom.
Mais, faute d'application réelle de son mandat pour intervenir,
ces dix-sept mille soldats regardent et constatent. L'horreur, ces
derniers jours, a franchi un nouveau degré. Des escadrons, dont le
groupe baptisé M23, font des incursions à Goma et sèment la terreur dans
sa périphérie. Ils portent de beaux uniformes et brandissent des armes
neuves.
D'où viennent-ils ? Ils ravagent et ils tuent. Et ils violent. Ils
violent par centaines de milliers les femmes et les enfants pour terroriser la population. Ils violent pour détruire. Ils violent pour arracher à jamais les identités. Et les enfants qu'ils n'ont pas massacrés, ils les enrôlent de force.
Et, pendant ce temps-là, les dix-sept mille soldats de la Mission de
l'ONU pour la stabilisation en RDC (Monusco) attendent une résolution du
Conseil de sécurité qui leur permettrait d'agir. Connaissez-vous le Kivu ? Un drame s'y joue. En ce moment même. Avec déjà des millions de morts et d'autres millions de vies dévastées.
Un drame que la communauté internationale pourrait arrêter. A l'instant. Il lui suffirait de donner l'ordre aux dix-sept mille soldats de faire leur métier et de remplir leur mandat. Leur métier de soldat. Et leur mission de garantir la paix et la dignité de l'espèce humaine.
Signataires : Muhammad Ali, fondateur du Muhammad Ali Center ; Robert Badinter, ancien président du Conseil Constitutionnel ; Yamina Benguigui, ministre de la Francophonie ; Jacques Chirac, ancien Président de la République Française et président de la Fondation Jacques Chirac ; Rosario Dawson, comédienne ; Jonathan Demme, réalisateur ; Abdou Diouf, ancien Président de la République du Sénégal et Secrétaire Général de la Francophonie ; Eve Ensler, auteur et créatrice des V-Day ; Leymah Gbowee, prix Nobel de la paix 2011 ; Stéphane Hessel, ancien ambassadeur de France ; Angélique Kidjo, Chanteuse ; Claude Lanzmann, écrivain et réalisateur ; Federico Mayor, ancien directeur général de l'Unesco ; Denis Mukwege, gynécologue, prix des droits de l'Homme des Nations Unies ; Thandie Newton, comédienne; Erik Orsenna, écrivain, Atiq Rahimi, écrivain, Jean Christophe Ruffin, écrivain, Mahamat Saleh Haroun, réalisateur, Valérie Trierweiler, ambassadrice de la Fondation Danielle Mitterrand
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