Kinshasa/Geneve,
8 décembre 2015: Un rapport des Nations Unies publié mardi met en exergue une
répression inquiétante de l'opposition, des médias et de la société civile
en République démocratique du Congo
(RDC) depuis le début de l'année et souligne la nécessité de garantir les
droits civils et politiques avant la tenue d’élections clés.
Le
rapport, préparé par le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme
en République démocratique du Congo
(BCNUDH), documente des violations des droits de l'homme en relation avec le
processus électoral perpétrées entre le 1er janvier et le 30 septembre 2015,
dont des exécutions sommaires, des menaces de mort, des arrestations et
détentions arbitraires, une utilisation excessive de la force par les forces de
sécurité et des restrictions au droit aux libertés d'expression et de réunion
pacifique.
«
Cette tendance de restrictions à la liberté d'expression et d’atteintes à la
sécurité de ceux qui expriment des opinions critiques concernant les actions du
gouvernement, dénote un rétrécissement de l’espace démocratique susceptible
d’affecter la crédibilité du processus électoral », dénonce le rapport.
Au
total, le rapport documente 143 violations des droits de l’homme en lien avec
le processus électoral. Après la répression violente de manifestations par des
services de sécurité en janvier 2015, qui a conduit à l’exécution
extrajudiciaire d’au moins 20 personnes par des agents de l’Etat, une deuxième
vague de violations des droits de l’homme a commencé en juillet 2015. Des
menaces, des arrestations et détentions arbitraires ont ciblé principalement
des professionnels des médias, des membres de la société civile et des
opposants politiques.
Le
rapport montre que la majorité des violations ont eu lieu dans des provinces où
les partis d’opposition et la société civile se distinguent particulièrement.
Il s’agit notamment des provinces de Kinshasa, du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et du
Kasaï oriental.
Les
agents de la Police nationale congolaise (PNC) et de l’Agence nationale de
renseignements (ANR) sont responsables de la plupart des violations des droits
de l’homme documentées dans ce rapport.
Au
moins 649 personnes ont été arrêtées et détenues arbitrairement en relation
avec le processus électoral pendant les neufs premiers mois de l’année. La
plupart se sont vues refuser toute communication avec leurs familles et leurs
avocats. L’ANR est principalement responsable de ces arrestations arbitraires
et détentions illégales, le plus souvent
« au secret ».
«
Les arrestations et détentions arbitraires, en particulier d’opposants
politiques, de membres de la société civile ou de manifestants, constituent un
moyen récurrent d’intimidation utilisé par les forces de l’ordre pour limiter
les libertés d’expression et de réunion pacifique », affirme le rapport.
Le
rapport alerte également contre l’instrumentalisation de la justice. « Les
ingérences politiques dans les procès et le peu de progrès dans les poursuites
judiciaires de certains démontrent l’instrumentalisation de la justice en vue
de faire taire les personnes concernées et a pour effet d’intimider la société
civile en général », soutient le rapport.
Le
rapport salue l’accord passé entre la Commission électorale nationale
indépendante et la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) pour faire
le suivi et enquêter sur les allégations de violations des droits de l’homme
avant, pendant et après le processus électoral. Il reconnait aussi certains
progrès en matière de lutte contre l’impunité. Cependant, aucune enquête ou
procédure légale n’a été jusqu’à présent ouverte sur les violations en lien
avec le processus électoral en cours.
«
J’exhorte les autorités congolaises à garantir que les responsabilités pour les
violations graves des droits de l'homme documentées dans ce rapport soient
établies », a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les droits de
l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein. « Ceci est d’autant plus important que la RDC
se dirige vers une période électorale très dense. Pour que les prochaines
élections soient crédibles et pacifiques, les autorités doivent garantir que
tous les citoyens, indépendamment de leurs opinions politiques, puissent
pleinement participer à un débat ouvert et démocratique et que les militants de
la société civile, les professionnels des médias et les opposants politiques
puissent exercer leurs activités sans crainte. »
«
Ce rapport attire l’attention sur le risque de violence électorale avant la tenue
des élections elles-mêmes. Je vais donc encourager les autorités congolaises et
les partenaires internationaux à examiner attentivement les recommandations de
ce rapport et à continuer d’entreprendre les démarches nécessaires pour
garantir un processus électoral libre, juste et crédible », a déclaré le
Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies, Maman S. Sidikou.
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