Introduction
Dès les élections générales de 2006, La République
Démocratique du Congo a renoué avec la démocratie pluraliste suspendue depuis le
coup d’Etat militaire du 24 novembre 1965, par lequel le colonel Joseph-Désiré Mobutu s’empara du pouvoir et imposa du coup l’arrêt des premières
expériences électorales Congolaises de
1957-1958, 1960 et 1965.
En 2011, de nouvelles élections devaient se tenir
dans l’espoir de capitaliser les acquis démocratiques de 2006, consolider la
paix, stabiliser le pays et créer les opportunités d’investissements nationaux
et étrangers pour la relance du développement économique et social. De ce fait,
le processus électoral de 2011 constituait un nouveau test d’une
démocratisation en temps de crise, ceci en référence à l’occupation d’une bonne
partie de l’Est du pays par des groupes armés nationaux et étrangers , pour le
renouvellement de la légitimité et de la légalité des gouvernants et partant
des institutions de l’Etat sous leur direction. Il s’agissait donc d’un
événement aussi historique majeur puisque jamais, auparavant, il n’y avait eu
de succession démocratique et électorale
au niveau du pouvoir politique national en RDC. Ainsi, pour la première fois en
cinquante ans d’indépendance, nous avons pu vivre l’expérience de l’alternance
démocratique au sommet de l’Etat, le Président Joseph Kabila s’étant succéder à
lui-même. De la même manière, la première législature de la troisième
République constituait la première
législature à avoir exercé ses attributions jusqu’à la fin de son mandat, avant
de laisser sa place, par la voie des urnes, à une nouvelle législature.
En dépit de ces points positifs relatifs à l’aboutissement
du processus électoral de 2011, il convient de préciser que des nombreux événements politiques et
violences électorales ont émaillé, dès l’entame, la préparation de ces
élections alors que celles-ci devraient être organisé dans un climat apaiser
dans le but de consolider la jeune démocratie Congolaise fragile.
De l’avis de nombreux observateurs, ces élections
du 28 novembre 2011 n’ont cependant pas été exemptées
d’écueils. Il a été ainsi relevé les défaillances ci-après :
1)
La
publication tardive des listes électorales ;
2)
L’omission de
plusieurs électeurs sur les listes électorales ;
3)
La délocalisation de bureau de vote ;
4)
La perte de
plis électoraux ;
5)
La
multiplicité de cas de vote par dérogation ;
6)
Les violences
électorales ;
7)
L’utilisation
des biens publics de l’Etat durant la campagne électorale
8)
Le non
respect de la neutralité des forces de sécurité et de l’administration publique ;
etc.
Au vue de certains écueils soulevés ci-haut, il sied de constater que la plupart relève
bel et bien de la qualité de l’administration de la sécurité électorale durant
la période électorale sus-évoqué.
Ainsi, dans la présente communication, nous
voudrions démontrer l’importance
capitale de la sécurité électorale dans un processus électoral étant donné que sa bonne administration garantirait les élections
libres, démocratiques et transparentes.
Il serait question de dresser, dans cette
communication le contour et la quintessence de la sécurité électorale afin
d’amener les différents acteurs du secteur de sécurité à redoubler tant
d’effort quant à son administration avant, pendant et après les élections. De
ce fait, nous nous pencherons sur le pourquoi de la sécurité électorale et ses
différentes exigences.
1. Pourquoi
la sécurité électorale ?
La sécurité électorale est vitale pour la
consolidation des Institutions démocratiques
dans plusieurs pays car même dans un environnement politique stable, des
élections peuvent entrainer un conflit. Alors que c’est un problème d’envergure globale, les causes,
caractéristiques et intensités des conflits électoraux varient suivant le
contexte de chaque pays.
L’intégrité
électorale exige d’assurer le jour du vote un climat libre de toute crainte,
intimidation ou manipulation. La sécurité du processus électoral est d’une importance
capitale, particulièrement pendant la période préélectorale, électoral et post
électoral.. Un climat électoral pacifique facilite la tenue d’une
élection libre, juste et crédible et élimine les problèmes de sécurité qui
pourraient compromettre l’intégrité du matériel, de la participation et des
résultats.
Si la sécurité électorale est garantie, Les électeurs vont pouvoir voter
sans crainte et les observateurs vont pouvoir observer toutes les
opérations électorales sans
intimidation. Les candidats devraient vont
pouvoir faire campagne sans redouter que leurs partisans soient assassinés ou
blessés. Les administrateurs électoraux peuvent assurer l’intégrité s’ils
réussissent à planifier et mener les élections sans interférence. Le matériel
électoral devrait être protégé afin qu’il ne soit pas manipulé de façon à
changer les résultats de l’élection.
La sécurisation des élections relève
premièrement des forces de défenses et de sécurité, il s’agit de la Police
Nationale et des FARDC. A ces deux acteurs, il faut ajouter la CENI elle- même
en tant qu’une police spéciale
des élections dans la mesure où la loi électorale confie aux président de chaque Bureau de Vote
le pouvoir de prendre toutes les mesures appropriées pour y maintenir l’ordre
et la tranquillité publique en ce sens que ces derniers peuvent expulser
quiconque qui troublerai la quiétude du déroulement de scrutin. En cas de résistance ou de récidive, le
Président de bureau de vote rédige un procès-verbal y
afférant et le transmet à l’autorité judiciaire.
Le maintien de la sécurité physique nécessaire
relève du gouvernement à travers la police civile qui
dépend du Ministère de l’Intérieur, qui utilise habituellement à cette fin la
force policière. Les mesures de sécurité varient selon les pays et les
circonstances. L’intégrité exige l’application neutre et équitable des lois, de
sorte que ceux qui sont soupçonnés de les avoir enfreints obtiennent un procès
juste
2. Les
exigences d’une bonne administration de la sécurité électorale
A) La bonne
planification de la sécurité
La sécurité requiert une bonne planification. Cette
dernière consiste à fixer des objectifs et à déterminer les actions susceptibles d’être réalisées. La planification se
fonde en général sur une analyse de la trajectoire passée de l'organisation,
des ressources à sa disposition, de sa situation actuelle et des buts à
atteindre. Outre la dimension principale qui est le temps (Quand), la
planification prend forme selon ses autres dimensions que sont le périmètre des
objectifs du projet (Quoi), les ressources (Qui), la manière et le chemin
(Comment) et les obstacles possibles (Risques)
Si aucune planification n’est faite pour prévenir,
gérer et médire des conflits électoraux, les élections risquent de devenir le
terrain de violences et d’intimidations où le conflit est utilisé comme une
tactique politique pour influencer le résultat des urnes. Ce problème s’étend au-delà du simple processus électoral étant donné que la
légitimité du gouvernement gagnant est en péril lorsque le conflit est utilisé
pour arriver au pouvoir. Il s’agit d’abord de cerner les étapes vulnérables du
processus électoral et les sites physiques qui devraient être protégés. Il faut
ensuite élaborer des mesures et mettre sur pied un plan de sécurité.
Un plan de sécurité peut être amélioré par une
bonne coordination entre l’organisme électoral et les agences chargées
d’appliquer la loi. Un plan de sécurité conjoint peut être élaboré et un
mécanisme de coordination établi pour faciliter le partage des renseignements
et la prise de décisions aux niveaux national, régional et local de toutes les
institutions.
B) La
neutralité des agents de la sécurité
Une sécurité électorale adéquate repose sur la
neutralité et le professionnalisme des personnes chargées de l’application de
la loi. Ces personnes devraient respecter la loi et les droits constitutionnels
et civils des citoyens, et se tenir à l’écart des campagnes et programmes des
partis politiques et des candidats. Elles devraient également s’abstenir de
recourir à une force excessive ou à la violence.
Dans certains régimes, surtout dans les sociétés
qui ont connu des conflits récents, les problèmes de sécurité peuvent être le
résultat d’une mauvaise conduite de la part des policiers, ce qui peut
provoquer le climat d’insécurité et entraver les élections.
C) La
protection des sites et bureaux de scrutin
La sécurité physique des sites électoraux et des
fonctionnaires électoraux qui y travaillent crée un environnement propice à une
administration neutre et sans entrave. Le vol de matériel électoral et
d’équipement peut miner l’intégrité du processus. La sécurité des sites peut
être assurée par un contrôle des entrées et sorties au moyen de pièces
d’identité avec photo. Les observateurs et les surveillants devraient aussi
porter une pièce d’identité qui permet de les reconnaître comme étant autorisés
à avoir accès aux endroits électoraux à des étapes critiques du processus.
Le jour du scrutin, il est essentiel de maintenir
l’ordre dans les bureaux de vote. Dans certains pays, cela se fait sous la
direction de la police et par des mesures indirectes, comme la fermeture des
débits d’alcool pendant les heures de votation. Aux Philippines par exemple, il
est illégal de servir, vendre, acheter ou boire des boissons enivrantes le jour
de l’élection. La plupart des pays interdisent le port d’armes à feu à
l’intérieur d’un certain périmètre des bureaux de vote.
Certains régimes nomment un responsable de la
sécurité à chaque site de votation. Ces personnes contrôlent l’accès aux
immeubles, permettent à un nombre limité d’électeurs d’être présents dans le
bureau de vote en même temps et maintiennent l’ordre dans les files d’attente.
D) La
protection du matériel électoral
Il est nécessaire de protéger l’intégrité
électorale en s’assurant que les bulletins, les feuilles de comptage et autre
matériel électoral ne soient pas copiés, manipulés ou détruits. La plupart des pays
utilisent des numéros de série sur les talons des bulletins de vote afin qu’il
soit plus facile de les retracer. L’emballage des bulletins peut aussi
faciliter la sécurité. Le regroupement des bulletins en paquets contenant un
nombre différent de bulletins emballés de façon à ce qu’ils ne puissent pas
être faussés permet la distribution de bulletins à chaque bureau de vote sans
avoir à ouvrir et refermer les paquets. On peut aussi faciliter l’entreposage
et la distribution des bulletins de vote et minimiser les risques de
manipulation en plaçant les paquets de bulletins de chaque circonscription dans
des contenants scellés et en inscrivant à l’extérieur du contenant leurs
numéros de série et l’emplacement du bureau de vote.
Le bureau de vote devrait être sécuritaire pour
protéger le matériel électoral et les urnes. Il peut arriver que les candidats
défaits volent ou détruisent les urnes après la fermeture du scrutin dans le
but d’invalider les résultats. La substitution des urnes après la fin de la
votation est une autre tactique quelquefois employée. L’utilisation de sceaux
sur les urnes et une surveillance continue par les représentants des partis
politiques et les observateurs peuvent contribuer à déceler de telles
tactiques.
E) La
protection des candidats, des électeurs et observateurs
Les candidats peuvent être la cible d’actes de
violence. La police et d’autres agences chargées de l’application des lois
assurent habituellement la protection des candidats. Les endroits où se
tiennent les rassemblements, les débats et les autres événements publics qui
attirent un grand nombre de personnes intéressées à la campagne devraient également
être protégés.
Un électeur
est une personne ayant le droit de participer à une élection ou plus
généralement à un scrutin. En référence à l’article 5 de la loi électorale en
vigueur en RDC, il sied de constater qu’un électeur est celui qui remplit les
conditions ci-après : être de nationalité Congolaise, être âgé de dix-huit
ans révolus, ne pas se trouver dans l’un d’exclusion prévus à l’article 7 de
ladite loi et se trouver sur le territoire de la RDC le jour des élections.
Ainsi, le
jour du scrutin, les électeurs devraient pouvoir quitter leur domicile et voter
sans craindre la violence dans les rues ou l’intimidation aux bureaux de vote.
S’ils doivent faire face à des groupes partisans menaçants pour exercer leur
droit de vote, le taux de participation en souffrira.
L’observation
des élections désigne l'observation d'une élection précise par une ou plusieurs
parties indépendantes soit originaires d'un autre pays soit provenant d'une
organisation non gouvernementale (ONG). L'observation a pour but d'assurer un
processus électoral équitable, conduit selon des standards internationaux, ce
qui encourage la protection des droits civils et politiques. La légitimité
d'une élection peut être affectée par les critiques des observateurs.
Au regard de
la nature de leur mission aussi délicate, les observateurs devraient aussi être
protégés afin qu’ils puissent observer le processus, poser des questions et
signer les feuilles de comptage sans intimidation ou crainte de rétribution.
Dans les pays en voie de transition, les observateurs nationaux peuvent se
sentir vulnérables à l’intimidation et à la violence, surtout s’ils observent
des problèmes causés par le parti au pouvoir ou les forces de l’ordre.
Conclusion
En guise de
conclusion, il convient de relever, au vue de tout ce qui a été esquissé
ci-haut, qu’il est tout à fait indispensable de s’en passer d’une bonne
administration de la sécurité électorale
dans un processus électoral. De même, durant la votation, le dépouillement des
votes et la transmission des résultats, une meilleure administration de la
sécurité électorale y est strictement requise pour garantir la transparence et
la crédibilité du scrutin.
Le gouvernement de la République Démocratique du
Congo, qui, durant le processus électoral de 2006 et 2011, n’a ménagé aucun
effort pour assurer une administration
électorale aussi efficace, est appelé à mettre plus d’accent et des moyens sur
cet aspect du processus électoral qui demeure vital pour la consolidation
d’institutions démocratiques. Ainsi, avec une bonne planification de la
sécurité électorale, les acteurs de sécurité appelés à intervenir durant le
processus électoral pourront bien éviter et contenir toutes formes des
violences électorales susceptibles de jeter l’opprobre sur l’aboutissement du
processus électoral.
Fait à Kinshasa, le 23 mai 2015
Joseph SEKABO
Consultant
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