(POINT
DE PRESSE DU 30 août 2013)
Ces derniers jours les
autorités du Rwanda ont multiplié les menaces d’entrer en guerre contre la
République Démocratique du Congo en guise de représailles à de prétendus
bombardements répétés du territoire de leur pays par les Forces Armées de la
République Démocratique du Congo (RDC).
Hier jeudi, le Ministre rwandais des Affaires étrangères et porte parole du
Gouvernement rwandais est revenu à la charge en accusant les FARDC d’avoir
intensifié les bombardements délibérés du territoire rwandais.
A l’en croire, un obus largué hier par les FARDC à
9H45’ a tué une femme et gravement blessé son bébé de deux mois dans un marché
près de Rubavu (Rwanda). Selon la même source, un second obus, tiré par les
FARDC est tombé vers 11h20’ près de la grande barrière à Rubavu.
Pour Mme Louise Mushikiwabo, les forces loyalistes
congolaises sont responsables des tirs ciblant le Rwanda. Elle affirme qu’au
total, 34 bombes ont été lancées sur le territoire rwandais au cours de la
semaine qui s’achève. Ces propos son assaisonnés de menaces à peine
voilées car « ces provocations ne
peuvent plus être tolérées ». Lorsque le Gouvernement de la RDC, les
ONG, la MONUSCO et les Nations Unies établissent sans équivoque
qu’effectivement des obus tirés de notre côté de la frontière sont tombés sur
le territoire du Rwanda mais que ce sont les éléments du M23 et non les FARDC
qui en sont les auteurs, cela semble ne pas faire l’affaire de nos voisins.
En effet, depuis son quartier général à New York, le
sous Secrétaire général de l’ONU en charge des Opérations de maintien de la
paix a déclaré hier ce qui suit : « La force des Nations Unies est en mesure de confirmer que les tirs qui
ont ciblé le territoire rwandais entre le 22 et le 29 Août provenaient des
positions du M23. La Force MONUSCO n’a eu à observer aucune unité des FARDC
tirant en direction du territoire rwandais durant cette période ».
S’agissant des derniers tirs, un rapport de la force
MONUSCO parvenu à l’équipe du Mécanisme Conjoint Elargie de Vérification dans
lequel siègent des officiers Congolais et Rwandais aux côtés de leurs collègues
des pays de la CIRGL indique très clairement ce qui suit : « 1) Le 29 Août 2013, vers 9h15, un tir
de mortier a été effectué par le M23 à partir du lieu dit Trois Tours à Kibati.
L’obus est tombé sur le village de Mudu Vudu au Rwanda à près de 200 mètres de
la frontière internationale, à proximité du Camp Focolary. Aucun rapport de
décès ou dommages corporels reçu jusque-là. 2) Le bruit de la détonation du tir
de mortier a été concrètement identifié comme émanant des trois tours de
Kibati, un lieu qui est sous le contrôle du M23. Nous vous demandons
d’effectuer plus d’investigations pour clarifier la situation pour éviter tout
malentendu au sujet de l’origine du tir ».
Comme pour balayer ce fait qui ne semble pas être en
adéquation avec la stratégie de son gouvernement, la Ministre porte parole du
gouvernement rwandais a déclaré que son pays avait « la capacité de déterminer qui tire sur lui », comme si elle
déniait à la RDC la capacité de savoir qui tire à partir de son propre sol.
Nous sommes d’accord avec Madame Mushikiwabo lorsqu’elle revendique pour le
Rwanda a la responsabilité de protéger sa population. Nous affirmons dans la
même logique que le Gouvernement de la RDC a la responsabilité de protéger la
population congolaise.
Nous en appelons encore une fois, à nos collègues
rwandais pour qu’ils fassent l’effort de se conformer à leurs engagements
contenus dans l’Accord Cadre d’Addis Abeba de ne pas apporter aide et appui au
groupe armé M23 qui est une force négative. Malheureusement, jusqu’au moment où
nous parlons, le soutien de Kigali au M23 ne s’est jamais démenti à aucun moment.
Nous en voulons pour preuves :
-
la
présence aux côtés des terroristes du M23 de quelques centaines d’éléments des
forces régulières rwandaises infiltrés en RDC au cours de ces derniers
jours après les avoir lourdement équipé avec armes, munitions et équipements
sophistiqués comme des lunettes de vision nocturne (rapport des Nations
Unies) ;
-
le
blocage pas plus tard qu’hier par le gouvernement rwandais d’un projet de
résolution introduite au Groupe des experts sur la RDC de l’ONU par les
Etats-Unis et la France pour ajouter Vianney Kazarama et Erick Mboneza, deux
commandants du M23 sur la liste des sanctions des Nations-Unies. Sans rire,
les autorités rwandaises ont prétendu
que pareille mesure mettait en danger les pourparlers de Kampala entre le Gouvernement
congolais et le M23 et que somme toute, les preuves contre les deux hommes
étaient « faibles » ;
-
le
gel du dossier de demande d’extradition par la RDC de quatre chefs du M23
auxquels le Rwanda a accordé l’asile politique parmi 682 autres Congolais, en
dépit de ses engagements dans l’Accord-Cadre d’Addis Abeba ;
-
Le
retour organisé et encadré vers les zones de combat à partir de Rumangabo de
groupes de combattants du M23 qui avaient obtenu l’asile au Rwanda.
Les accointances du Rwanda avec les forces négatives
du M23 ne sont donc plus à démontrer. Pourtant ce pays voisin ne perd aucune
occasion pour stigmatiser fallacieusement le soutien que les forces négatives
du FDLR recevraient de la RDC.
Le blocage délibéré des sanctions contre les deux
criminels congolais par le Rwanda a eu lieu au sein d’une réunion du Groupe des
Experts des Nations Unies ou une telle décision requiert un consensus unanime.
On notera que le Rwanda qui a profité de cette disposition était le seul pays à
s’y être opposé, ôtant ainsi tout doute sur ses intentions et sa responsabilité
dans la crise sécuritaire et humanitaire qui secoue la région des Grands Lacs.
Le Gouvernement de la RDC entend pour sa part relancer ce projet de Résolution franco-américain
lors d’une réunion ultérieure du Conseil de sécurité pour réduire les marges de
l’impunité dans notre pays et dans la région. Il appelle la Communauté
internationale à le soutenir dans cette croisade contre le mal. Les
condamnations de principe ne suffisent plus. Il appert de plus en plus
clairement que le caractère purement symbolique des pressions exercées jusqu’à
présent sur les prédateurs belliqueux qui, à partir de Kigali, déstabilisent de
manière systémique la région des Grands Lacs a envoyé le mauvais signal et
coûté à nos peuples de nombreuses vies humaines innocentes. Nous engageons les
membres de la communauté internationale à mettre en œuvre des sanctions ciblées
et efficaces contre quiconque porte une responsabilité dans les atrocités qui
sèment la mort et la désolation au Nord Kivu. Nous voudrions exprimer ici notre
compassion pour les victimes, aussi bien congolaises que rwandaises, de cette
barbarie sans limites. Nous déplorons l’indifférence de nos collègues du Rwanda
face au calvaire des hommes, des femmes et des enfants de Goma du fait de leurs
supplétifs du M23 et pour lesquels on chercherait en vain un simple mot de
solidarité dans leur rhétorique belliqueuse. Nous en sommes à 13 civils tués à
Goma et ses environs depuis que les extrémistes au Rwanda et leurs affidés du
M23 ont commencé à cibler la capitale martyre du Nord Kivu. La dernière de ces
victimes est un garçon de 16 ans dont le corps a été déchiqueté et dispersé à
travers la pièce ou il se trouvait. Pourquoi cette vie humaine aurait-elle
moins de valeur la voracité des prédateurs insatiables qui ont décidé de
balkaniser notre pays pour s’emparer de nos ressources ?
La Ministre Mushikiwabo a remis une nouvelle couche
de plaidoyer pour des négociations politiques assorti d’un partage de pouvoir
avec les criminels que son gouvernement soutient à bout de bras. C’est
inacceptable de la part d’un Gouvernement qui a signé avec nous l’Accord Cadre
d’Addis Abeba dont un des fondamentaux est de mettre hors-la-loi ces forces négatives.
C’est cynique pour un gouvernement qui refuse obstinément de négocier avec ces
concitoyens des FDLR dont les M23 sont une copie presque conforme en RDC.
Toujours aux ordres de ses maîtres rwandais, le
sieur Bisimwa qui dirige par procuration le M23 aurait annoncé un repli des
éléments de cette milice pour un redéploiement sur un autre site. Cela n’est
pas acceptable pour le Gouvernement congolais qui continue à exiger que cette
force négative et criminelle cesse purement et simplement d’exister comme
groupe armé et que ces membres qui ne sont pas en conflit avec la loi
articulent leurs revendications par des voies licites (non violentes). Le
Rwanda ferait œuvre utile en encourageant le désarmement et la démobilisation
du M23 au lieu de se faire le défenseur inconditionnel des pires turpitudes de
cette milice qu’il a créé dans notre pays.
C’est le lieu d’exprimer la reconnaissance de la
Nation toute entière aux vaillantes troupes des FARDC qui se dévouent nuit et
jour pour défendre notre peuple et notre territoire contre l’arrogance, le
mépris, le cynisme et la cruauté des ennemis de la paix. Honneur à ces
courageux jeunes gens qui, dans les rangs de nos FARDC, ont payé le prix du
sang pour leur pays.
Honneur aussi à notre frère, le soldat de la paix
tanzanien qui a été fauché par les hors-la-loi en plein exercice de son mandat
de maintien de la paix. Le Gouvernement
de la RDC apprécie à sa juste valeur le haut degré de solidarité manifesté par
la SADC et particulièrement par la République Sud Africaine, la Tanzanie et le
Malawi, contributeurs de troupes au sein de la Brigade Internationale de la
MONUSCO.
Lambert
MENDE OMALANGA
Ministre des Médias, chargé des
Relations avec le Parlement et de l’Initiation à la Nouvelle Citoyenneté, Porte-parole
du Gouvernement