« Nous nous sommes-là pour
accompagner les décisions prises par Monsieur ke gouverneur de la ville de
Kinshasa. C’est-à-dire, nous sommes-là pour appliquer le code de la route. Que
les chauffeurs mettent leurs ceintures de sécurité, que le véhicule soit en
bonne état… Nos agents ne rançonnent jamais. C’est du nouveau ce que vous venez
de me dire puisque nos agents ne rançonnent pas. Je pense qu’il y a d’autres
récalcitrants qui sont là. Mais je pense que ce sont des propriétaires des
véhicules qui doivent acheter les documents de bord. Avant que le véhicule ne
roule, il faut que le chauffeur aille dans les endroits appropriés pour le
contrôle technique, qu’il achète l’assurance. Il y a des conducteurs qui
roulent sans permis de conduire. Nos agents ne dérangent pas les conducteurs.
Ce sont des chauffeurs qui circulent sans documents de bord. Et on doit les
arrêter, nous ne pouvons pas les laisser comme ça. Là, on va frapper et nous
seront durs face à la loi ».
Ce
sont des propos tenus par le commissaire supérieur Paulin Banza de la Police de
circulation routière à la fin du mois de janvier sur la Rtg@ Fm. Avec de tels
propos dénués de toutes les réalités sur le terrain, la police ne pourrait
jamais traquer les éléments de la police de circulation routière qui se
méconduisent tous les jours sur nos routes. Entre les intentions manifestées
par la hiérarchie des autorités urbaines et de la police d’une part et de
l’autre, la volonté affichée d’en finir avec des diverses tracasseries dont les
conducteurs sont victimes sur les principales artères de la ville de Kinshasa,
le fossé est énorme.
S’exprimant
vendredi 10 janvier dernier au terme d’une réunion présidée par le ministre de
l’Intérieur avec les ministres provinciaux de toutes les provinces, le
commissaire général de la Police nationale congolaise, Charles Bisengimana
déclarait sur les tracasseries routières que « nous devons commencer par le commencement. Nous ne devrions pas faire
le tout au même moment. Nous allons poursuivre avec les autres étapes qui
concernent la gestion de la circulation routière. Vous êtes Kinois et vous
connaissez comment les permis sont délivrés. Sous d’autres cieux, c’est la
Police nationale qui a la charge de décerner les permis de conduire.
Aujourd’hui, vous pouvez être dans votre maison, vous envoyez votre fils vous
acheter un permis de conduire. Nous devons nous rassurer que les agents qui
détiennent des permis de conduire sont réellement des conducteurs des véhicules
et qui respectent les règles en matière
de circulation routière. Nous allons nous attaquer à cette question très
prochainement ».
La
commissaire supérieur ne peut ignorer les tracasseries dont font l’objet les
conducteurs. L’Asadho qui est une association de promotion et de protection des
droits humains, a publié dernièrement une enquête intitulée « Rapport sur les tracasseries
routières Kinshasa ». N’importe quelle personne peut lire cette enquête sur
le site de cette organisation.
Voici un extrait de cette enquête : « L’Attitude des autorités face à la corruption de la Police Nationale
Congolaise. La corruption des policiers est un phénomène connu de toutes les
autorités tant de la Police Nationale Congolaise que politiques. Sur toutes les
voies publiques, tout le monde voie comment les policiers se font remettre de l’argent
par les conducteurs des véhicules. Au-delà du fait que la corruption des
policiers peut être liée à leurs mauvaises conditions socio-professionnelles,
il y a lieu de signaler que la complicité des chefs hiérarchiques qui se
partageraient l’argent avec les policiers qui sont de service sur la voie
publique n’est pas un facteur négligeable. Ceci expliquerait le silence
coupable que tout le monde garde tant en ce qui concerne les tracasseries dont
les usagers de la route sont victimes de la part des policiers qu’en ce qui
concerne leur corruption. Aucun policier n’a jamais été poursuivi pour les
faits de corruption.
Il se dégage des
différents entretiens nous accordés par certains policiers que le mal vient
d’en haut, des autorités politiques et de la police qui laissent la situation
se dégrader. Au lieu d’améliorer les conditions de travail des policiers, elles
préfèrent les laisser se servir auprès des pauvres populations. Nous tenons
aussi à mentionner le fait que la corruption de la police lui a fait perdre
toute autorité sur la voie publique, surtout à l’égard des conducteurs de
transport en commun, qui ne lui obéissent plus ».
Les endroits les plus dangereux pour les conducteurs sont :
District de Lukunga : Pompage,
Kintambo–Magasin, Delveaux et Barrée - Ozone, UPN, Rond-point Socimat,
Boulevard du 30 juin, Avenue du Commerce (Rond-point INA) ;
District de Tshangu: Masina –
Boulevard Lumumba, Kinkole, Boulevard Kimbuta, Nd’jili quartiers 1 et 2 ;
District de Mont amba : Bay – pass,
Rond-point Ngaba, Kianza, Super Lemba et Terminus ;
District de Funa : Avenue de
l’Université, Rond-point Victoire et Bongolo ; avenue Kasa-Vubu, Bandal Molaërt,
coin des avenues Kasa-Vubu et Sendwe. D’autres endroits de la ville existent où
ces agents opèrent dans toute impunité et aucun responsable de la police ne
dénonce.
J’ai mis en circulation un véhicule de marque « Toyota Corolla »
et je ne pouvais pas imaginer l’ampleur de cette corruption. Le premier endroit
où je me suis rendu, c’était le bureau de la PCR Pont Cabu. J’ai été conduit
auprès d’une dame. Après de petites questions, je lui avais dit d’établir une
quittance. Elle me dira que je risquais de payer trop cher en y ajoutant des
frais bancaires. Face à mon obsession d’obtenir une quittance, j’ai fini par
l’énerver au point de m’établir une quittance fantaisiste sur le cas présumé de
mauvais stationnement.
La deuxième fois. C’était à la division urbaine de transport. A
mon arrivée, je questionnais la personne qui était devant moi pour connaitre le
motif de la mise en fourrière de mon véhicule. C’était franchement une histoire
à dormir débout. Je lui ai demandé de m’établir la quittance. Le gars commença
à me convaincre de ne pas aller payer à la banque. Finalement, je lui demandai
le montant à payer. 100.000 Fc, me dira-t-il. Fais-moi la quittance, lui
avais-je lancé. Le gars tenait à me persuader de ne pas aller payer à la
banque. Il m’énerva en me disant qu’avec quittance le montant revenait à
200.000 Fc. J’avais eu une discussion assez aigre avec lui au point de
m’emporter dans son bureau sis sur l’avenue Tombalbaye, à côté de l’Hôtel de gouvernement
provincial piloté par André Kimbuta.
La troisième et quatrième fois, je me suis retrouvé à deux jours d’intervalle
à côté de la maison communale de Kalamu. J’ai vécu ce jour-là, au mois de
décembre 2012, une véritable arnaque opérée par des agents de la police de
circulation routière. Une seule contravention était retenue : mauvais arrêt et mauvais stationnement.
Le montant à payer variait d’une personne à l’autre. La plupart des conducteurs
étaient noirs de colère avec l’ampleur du mensonge des agents dits qualifiés.
Au même mois de décembre 2012, mon chauffeur m’alerta que le
véhicule venait d’être saisi au commissariat de la police de
circulation routière sur le Boulevard du 30 Juin dans la commune de la Gombe.
Toujours et encore, une contravention à dormir débout.
On
m’amena auprès d’une dame, major de son état qui avait la charge du dossier.
Mme l’agent, pourquoi avez-vous saisi mon véhicule ? « Bakonzi bazo zela 45.000 Fc pe naza na
explication yako pesa yo te », me balança-t-elle. A la place Moulaërt
dans la commune de Bandalungua au mois de mars 2013, un conducteur d’un bus 207
s’est vu interpeller par cinq agents de la police de circulation routière. En
observant la scène, c’était une véritable opération « commando » qu’ils avaient mené pour cette contravention. Ils
avaient tous sauté sur le véhicule. Je venais de réaliser que ces policiers
sortaient probablement d’une salle de cours d’apprentissage de la manière de
mener des opérations « commando ». Ils devraient coûte que coûte,
faute d’aller sur le champ de guerre, mettre en pratique la leçon apprise pour
ne pas l’oublier.
Sur
la route Kinshasa-Kikwit le 24 décembre 2013, jusqu’à un certain niveau, j’ai
pu compter au moins six barrières érigées par des éléments de la police de
circulation routière. Les conducteurs m’ont dit que c’est plus que ça. Les
conducteurs mettent en tout 100.000 Fc à distribuer pour chaque barrière. Les
tracasseries routières, sur l’ensemble du pays, sont une réalité et non une
fiction. Pour lutter contre cette tare de la deuxième République que nous
avions oubliée pendant tout le règne de Laurent-Désiré Kabila, les autorités
doivent mettre à contribution la Justice militaire pour traquer tous les
éléments qui se livrent à cette pratique et non à la police qui l’entretien.
Car, les loups ne se mangent pas entre eux.
Selon
le témoignage d’un taximan qui me conduisait du quartier Bon Marché (Barumbu)
jusqu’au Rond-point Victoire (Kalamu), les tracasseries policières sont plus
qu’une mine d’or dans la ville de Kinshasa. Il serait difficile de mettre un
terme à ce phénomène. Il se demandait s’il était difficile de mettre fin aux
tracasseries policières qu’au M23. Les autorités ne manifestent que des intentions
sans saisir le taureau par les cornes. Si le M23 était soutenu par des pays
voisins avec les puissances internationales, mais quels sont ces pays étrangers
qui soutiennent les éléments de la police de circulation routière qui donnent
du fils à retordre aux responsables gouvernementaux congolais ?
Apparemment, aucun responsable ne souhaite s’aventurer sur ce terrain trop
glissant pour ne pas laisser des plumes.
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