L’initiative présidentielle de la réglementation de l’élevage et de la possession des chiens d’attaque et de défense devra prendre en compte le secteur des sociétés de gardiennage. Des organisations de la société civile de la République Démocratique du Congo ont écrit une lettre ouverte au Président de la République le 23 avril 2024.
La réglementation de l’élevage et de la possession des chiens d’attaque et de défense a fait l’objet le 19 avril 2024 au cours du conseil des ministres. Le Président de la République a été informé de la prolifération inquiétante de la possession, par les ménages, de chiens d’attaque et de défense, particulièrement ceux de types molossoïdes tels que : le Pitbull ou encore le Boerboel (Boerbull), réputés pour leur agressivité et leur dangerosité.
Ce phénomène est d’autant plus inquiétant qu’il s’observe que ces chiens sont à première vue détenus par une population jeune et non avertie des risques et des dangers qu’ils peuvent représenter ; et que bien souvent, les conditions prévalant à leur domestication, tout comme leur dressage demeurent si pas sommaires, bâclées.
Purement et simplement interdit de possession sous d’autres cieux ou uniquement tolérés, au moyen d’une réglementation stricte assortie d’un contrôle obligatoire sur les aspirants propriétaires ; ces chiens peuvent être à l’origine de biens des drames souvent graves et parfois mortels.
Il vous souviendra, par exemple, le triste accident survenu à Kinshasa, le 24 février 2023, dans le district de la Tshangu, où un enfant d’un an perdait la vie des suites d’une attaque d’un pitbull ; attaque, qui en son temps avait suscité l’émoi de toute une population et qui appelait à une réaction des autorités publiques demeurées silencieuses à ce sujet.
Alimentée par la prolifération d’élevages non répertoriés, la reproduction clandestine et l’absence de réglementation quant à leur vente et à leur possession ; la prolifération de ces chiens inquiète d’autant plus qu’elle se mue progressivement en un phénomène de mode encouragé notamment par l’organisation, au grand jour, d’activités foraines où les propriétaires canins, parfois encore mineurs, mettent en exergue, souvent avec peu de précautions, les propriétés de leurs canidés.
Face à cette situation, et afin de prévenir tout risque au sein de la population, le Président de la République a insisté l’impérieuse nécessité pour le Gouvernement, à travers le ministère de l’Intérieur avec le concours du ministère de la Santé Publique, Hygiène et Prévention, d’œuvrer à la mise au jour d’une nomenclature permettant la classification des chiens de races et domestiques
Les organisations de la société civile congolaise ont salué les instructions du chef de l’Etat sur la nécessité pour le gouvernement, à travers le ministère de l’Intérieur, Sécurité et Affaires Coutumières avec le concours du ministère de la Santé publique, Hygiène et Prévention, d’œuvrer à la mise à jour d’une nomenclature permettant la classification des chiens de race et domestiques lors de la cent trente-troisième réunion ordinaire du Conseil des ministres du vendredi 19 avril 2024.
Les organisations de la société civile congolaise ont noté cependant que depuis la libéralisation du secteur minier qui a donné la possibilité aux acteurs privés de devenir détenteurs des titres miniers en 2002, de nombreuses entreprises minières opèrent dans les zones où il y a des germes de tensions entre ces entreprises et les communautés locales. Les communautés évoquent des problèmes d’accaparement des terres agricoles et fonciers, de perte de valeur culturelle et de la détérioration des moyens de subsistance.
Les organisations de la société civile observent également que face à la vulnérabilité sociale et économique, certaines communautés sont contraintes d’effectuer des incursions sur les sites miniers privés. Elles cherchent en effet à accéder à des ressources minières de proximité afin d’assurer leur propre survie et cela en enfreignant la loi minière.
Pour y remédier, de nombreuses entreprises minières ont recours aux sociétés de gardiennage dont certaines utilisent des chiens. L’utilisation de ces chiens entraîne des violations des droits humains dans et autour des concessions minières de certaines provinces occasionnant ainsi chez ces personnes des préjudices corporels et autres traumatismes. Afin de prévenir l’occurrence de tels incidents et dans le souci de contribuer au respect des droits humains par les sociétés de gardiennage, des organisations de la société civile de la République Démocratique du Congo travaillent depuis 2018 sur des propositions de projets de réformes afin d’améliorer les pratiques des sociétés de gardiennage en accord avec les lois du pays.
Dans ce contexte, en mars 2023 ces organisations avec les autres parties prenantes comprenant des acteurs du secteur public et privé, ont proposé à Kinshasa un texte portant réglementation des sociétés de gardiennage en République Démocratique du Congo. Ce texte cherche à répondre à l’essor considérable du secteur des sociétés de gardiennage en intégrant les bonnes pratiques internationales.
Ce projet de texte contient également des mesures afin de réglementer l’utilisation des chiens dans l’exercice des activités des sociétés de gardiennage. Il souligne que « les animaux utilisés dans les lieux publics ou ouverts au public doivent être tenus en laisse et contrôlés de manière immédiate et continuelle par leurs maîtres ou conducteurs. Les conditions d’utilisation du chien ou autre animal dans l’exercice des activités régies par la présente loi sont fixées par un décret d’application » et que : « les sociétés de gardiennage doivent déclarer auprès de l’Administration tout incident ou accident auquel son personnel aurait été associé, toute escalade de violence, dommages matériels, blessures, attaques, actes criminels, accidents de la circulation, ou tout autre incident auxquels leurs personnels ont été associés ».
Le texte souligne également « […] que toute personne s’estimant victime des agissements des sociétés de gardiennage peut solliciter auprès de l'Administration et/ou service habilité une réparation du préjudice subi par l'entremise de ces sociétés ».
Au regard de tous ces éléments énumérés, il semble pertinent pour ces organisations de la société civile de solliciter le pouvoir autoritaire du chef de l’Etat afin d’instruire le gouvernement à étendre des mesures dans le secteur des sociétés de gardiennage car l’utilisation des chiens constituent un danger en l’absence d’une réglementation solide.
« Nos organisations restent disponibles à collaborer avec les services techniques du gouvernement afin de contribuer à l’élaboration d’une réglementation stricte assortie d’un contrôle obligatoire sur les aspirants propriétaires de chiens selon la volonté de votre Excellence. Il s’agit de s’assurer que l’initiative de la réglementation de l’élevage et de la possession des chiens d’attaque et de défense prenne en compte tous les secteurs de la vie nationale ».
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