Par
Ida Sawyer
La
compagnie pétrolière britannique SOCO International et le Fonds mondial
pour la nature (WWF) ont annoncé le vendredi 12 juin 2014 un accord mettant
provisoirement fin aux travaux de recherche pétrolière dans le Parc national
des Virunga, un site inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO situé dans l'est
de la République démocratique du Congo. Cependant, des mesures supplémentaires
sont nécessaires pour protéger les gardes du parc et les activistes qui ont été
menacés et attaqués pour avoir critiqué les projets d'exploration pétrolière
dans le parc, et pour traduire les responsables en justice.
Les
activités de SOCO dans le parc des Virunga ont suscité des critiques de plus en
plus nombreuses. Cette compagnie a déclaré aujourd'hui qu'elle n'entreprendrait
ou ne passerait commande d'aucun forage - exploratoire ou autre - à l'intérieur
du parc, à moins que l'UNESCO et le gouvernement congolais ne concluent que de
telles activités sont compatibles avec le statut de site inscrit au patrimoine
mondial du parc. WWF a accepté de surseoir à faire valoir ses arguments dans le
cadre de sa plainte à l'encontre de SOCO auprès du Point de contact national du
Royaume-Uni aux termes des principes directeurs
à l'intention des entreprises multinationales de l'Organisation de coopération
et de développement économiques (OCDE).
Human
Rights Watch a documenté plusieurs cas d'arrestations arbitraires
par les autorités gouvernementales, ainsi que de menaces et d'attaques de la
part d'agresseurs non identifiés, contre des gardes du parc et des activistes
qui ont critiqué les projets d'exploration pétrolière dans le parc. Le
gardien-chef du secteur central du parc a été averti en septembre 2013 qu'il
serait tué s'il continuait à s'opposer aux activités de SOCO. Quelques jours
plus tard, des militaires et des membres des services de renseignement
congolais l'ont battu, arrêté et détenu arbitrairement.
Le
15 avril, le directeur du parc, Emmanuel de Mérode, de nationalité belge, a été
grièvement blessé par balles par trois hommes armés vêtus d'uniformes
militaires. La semaine suivante, plusieurs
défenseurs de l’environnement ont reçu des menaces. Un message texto (SMS)
provenant d'un numéro non identifié disait: « Vous pensez qu’en écrivant, vous
nous empêcherez d’extraire le pétrole. Vous allez mourir pour rien comme de
Mérode. »
Des
membres du gouvernement, de l'armée et des services de renseignement congolais
ont été impliqués dans un grand nombre des menaces et des agressions
documentées par Human Rights Watch. Certains auraient reçu de l'argent de la
part de la compagnie SOCO. Des activistes et des gardes du parc ont
également affirmé que des représentants de SOCO et de sociétés de sécurité
avaient essayé de les soudoyer afin d’obtenir leur soutien, de les décourager
de prendre la parole contre l’exploration pétrolière dans le parc ou pour
qu'ils facilitent les activités de la compagnie dans le parc.
SOCO
a condamné l'attentat contre de Mérode et a nié tout rôle
dans les menaces, les actes de violence ou le recours à des pots-de-vin,
mais a affirmé qu’elle examinerait les allégations de corruption de ce type et
a condamné le recours à la violence et à l’intimidation.
Les
individus responsables de ces abus doivent être traduits en justice. Les
autorités congolaises devraient mener des enquêtes approfondies et impartiales
sur les menaces et les violences à l'encontre des gardes du parc et des
activistes. Le procureur fédéral de Belgique devrait
également envisager d’ouvrir une enquête sur l’attentat contre de Mérode, du
fait qu'il est de nationalité belge. Les autorités britanniques
devraient enquêter sur les activités de SOCO dans l'est de la RD Congo, au nom
de la loi britannique sur la corruption.
L’accord
provisoire annoncé aujourd'hui ne devrait pas servir de prétexte pour relâcher
la pression exercée sur les gouvernements congolais, britannique et belge afin
qu'ils effectuent des enquêtes, qui sont grandement nécessaires. Il ne devrait
pas non plus décourager la compagnie SOCO de procéder à son propre examen de ce
qui s'est passé et de s'assurer que ses opérations respectent les normes
internationales en matière de droits humains. Les gardes du parc et les
activistes ont le droit d'exprimer leur point de vue librement et de protéger
le parc sans risquer leur vie.
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