Mesdames
et Messieurs de la presse,
Le peuple
congolais choqué et meurtri par les massacres perpétrés dans la périphérie de
la ville de Beni par un groupe de terroristes chassés de leurs repaires de
Mwalika et Naduyi le samedi 13 août 2016 vient de lever le deuil national de
trois jours décrété par le Gouvernement de la République sur instruction de
Monsieur le Président de la République, Chef de l'Etat. Le Gouvernement tient à
réitérer ses condoléances attristées aux familles et aux proches des victimes et
à l’ensemble de la population du territoire de Beni, un territoire qui souffre
le martyre depuis de trop longues années du fait de ces bandes criminelles
venues de l’étranger.
Le Gouvernement
rend hommage à la solidarité exprimée par les différentes couches de la
population congolaise dans toutes nos provinces et se félicite de la compassion
et de la dignité de la majorité des hommes et des femmes de ce pays dans cette
épreuve, une de plus, une de trop pour le grand Nord Est de la RDC qui n’a que
trop souffert de la cruauté des hordes barbares sans foi ni lois depuis le
milieu des années ‘90.
Il tient à
réaffirmer, aujourd’hui plus que jamais, sa ferme détermination à faire monter
en puissance nos forces de défense et de sécurité pour éradiquer de manière
définitive les groupes terroristes auteurs de tels actes d’une barbarie qu'aucune
cause ne peut justifier.
C’est dans cette
optique que le Premier Ministre a effectué une visite mardi à Beni à l’issue
d’une importante réunion du Conseil supérieur de la Défense convoqué à Goma par
Monsieur le Président de la République. Le but de cette visite était certes de
marquer la solidarité de l’ensemble du pays à l’égard des victimes de
l’activisme des terroristes dans la région, mais il s’agissait surtout d’inspecter
le dispositif mis en place au regard du nouveau modus operandi des criminels
qui, d’actions de type conventionnel que nos vaillantes Forces de défense et de
sécurité ont sérieusement mis à mal, sont passés à des formes dites
asymétriques d’agression qui nécessitent une réponse d’un autre type
susceptible de sécuriser coûte que coûte cette partie du territoire national.
L’exploitation
des documents saisis dans les trois places fortes de ce groupe criminel,
Meidna, Malwika et Naduyi, capturés et détruites par nos FARDC ainsi que les
interrogatoires des éléments capturés n’est pas encore terminée. Elle a permis
d’ores et déjà à nos services de retracer de la manière suivante son évolution historique.
D’une
opposition armée traditionnelle au régime ougandais du Président Museveni
expatriée en République du Zaïre qu’ils étaient en 1995, c’est-à-dire deux ans
avant l’anéantissement de la deuxième République du défunt président Mobutu
(1997), l’ADF-NALU s’est substantiellement transformée et est devenue à ce jour
une véritable internationale terroriste à caractère islamiste radical. Ce
constat se dégage de la composition multinationale de ses unités combattantes
ont été trouvés non seulement des sujets ougandais des premiers jours, mais
aussi des Somaliens, des Tanzaniens, des
Kenyans, des Rwandais, des Ethiopiens et aussi des Congolais de RDC. C’est
manifestement en pleine mission de recrutement en Tanzanie que Jamil Mukulu, le
leader du mouvement a été arrêté en Tanzanie avant d’être extradé vers
l’Ouganda, son pays d’origine où il va bientôt passer en jugement.
Le
processus de radicalisation des éléments des recrus a, selon les renseignements
recueillis, bénéficié de l’appui des Shebab somaliens. C’est à l’instigation de
ces derniers que les bandes des miliciens ADF mises en déroute par les
offensives des FARDC se sont converties à l’asymétrie :
-
asymétrie au plan des moyens d’attaque par le recours à des
moyens banals comme des machettes, des haches ou des gourdins disponibles en
tous lieux et ne pouvant pas à priori susciter la suspicion des forces de
défense et de sécurité dans cette zone agricole ;
-
asymétrie aux plans tactique et stratégique et du choix des
cibles par la renonciation à affronter les FARDC pour s’attaquer à des
paisibles populations dans des hameaux isolés sélectionnés en fonction de leur
éloignement par rapport aux casernes des forces de défense et de sécurité ou en
déplacement à destination ou au retour des fermes et des champs dans l’espoir
de briser la solidarité entre les technostructures de l’Etat et les dites
populations qui pourrait accélérer leur neutralisation définitive.
À l’instar
de tous les autres pays de la planète victimes du terrorisme international de
groupes islamistes radicalisés, et ils sont fort nombreux, la République
Démocratique du Congo, notre pays, est demandeur d’une solidarité
internationale digne de ce nom. Une solidarité effective, non condescendante et
susceptible d’accroitre ses propres capacités opérationnelles, ce qui n’est
malheureusement pas le cas jusqu’à présent.
Il n’est pas
juste que le gouvernement congolais et ses forces de défense et de sécurité soient
à cet égard obligées pratiquement de se contorsionner littéralement pour
disposer des moyens militaires de faire face à cette menace et ce, en dépit de
l’appui de la Monusco qui est encore loin d’être à la hauteur d’un défi de cet
ampleur. La levée de l’embargo sur les armes serait un signal fort qui marquerait
la reconnaissance de la communauté internationale quant à la nécessité d’accorder
à la RDC le même statut que les autres pays qui sont dans le collimateur de ce
fléau.
Le
Gouvernement apprécie à sa juste valeur la compassion exprimée par le Pape
François qui a saisi l’opportunité de la solennité de l’Assomption pour
dénoncer depuis le Vatican le silence de la communauté internationale face aux
actes terroristes à répétition qui ne cessent de d’endeuiller le territoire de
Beni. Cette consolation symbolique du Souverain Pontife nous va droit au cœur
même si elle n’est pas, comme on peut s’en douter, de nature à fournir aux
forces de défense et de sécurité de RDC les moyens idoines pour mener à bonne
fin leurs tâches de sécurisation de l’ensemble du territoire national.
C’est le
lieu pour le Gouvernement de la République de questionner
certaines attitudes et habitudes adoptées par quelques uns de nos compatriotes face
à ce véritable défi existentiel et qui frisent l'indécence. En effet, en plus
de polémiques stériles, ces concitoyens semblent se délecter de cette tragédie
qui assaille notre peuple au Kivu et tentent même d’en tirer une sorte de
dividende politicienne. Pour eux, cette insécurité chronique du grand Nord
n’est qu’une banale opportunité comme une autre pour régler des comptes
partisans, intenter des procès sans fondement, stigmatiser et culpabiliser les
institutions établies ainsi que les forces de défense et de sécurité de notre
pays, faisant de la sorte le jeu d’un ennemi, le terrorisme, contre lequel le
bon sens et l’humanité appellent à une union sacrée.
Face aux multiples
meurtres de sang-froid d’innocents compatriotes à Beni, plutôt que d’appeler au
sursaut patriotique et à la constitution d’un front républicain dans le cadre de
la solidarité nationale comme cela se passe sous d'autres cieux en pareil cas, quelques
membres d’une certaine société civile et leurs mentors politiciens inciviques n’y
ont vu que l'occasion de se jeter à bras raccourcis sur les institutions
nationales à travers des allégations cyniques dictées par leurs intérêts mesquins.
On a vu un
élu se permettre de rameuter la population de Butembo pour la conduire vers
Beni vers la scène des crimes commis dernièrement prétendument pour y exprimer
leur colère comme. Les autorités locales ne pouvaient en aucune manière laisser
ainsi envahir une scène de crime dans laquelle ne sont généralement admis que
les enquêteurs et on se peut se demander si ce qui motivait les initiateurs de
ces actes irrationnels n’était pas de brouiller les pistes et de rendre
difficiles les enquêtes et la traque en cours. Les efforts des autorités de
préserver ainsi le site de commission des crimes que nous déplorons ont été
sérieusement malmenés par ces inciviques et on a déploré une nouvelle victime
touchée mortellement par une balle perdue après que les soit-disant manifestant
eurent tué un policier à coups de pierres. Ces manifestants ont en outre lynché
un malade mental de Beni qu’ils avaient pris pour un combattant ADF et blessés
sept personnes. Comme quoi, il est préférable de laisser les technostructures de
l’Etat faire leur travail au lieu de chercher à instaurer l’anarchie de la
justice dite « populaire ».
En tout
état de cause, et malgré ces tentatives de sabotage dont on connaîtra bientôt
le fin mot, les forces de défense et de sécurité continuent la traque des
terroristes et au moment où nous parlons, 80 éléments ADF ont déjà été capturés
et sont gardés dans la prison centrale de Kangwanyi à Beni. Parmi eux, beaucoup
de sujets ougandais mais aussi des Tanzaniens et quelques Rwandais et
Congolais. À Butembo un imam a été pris en flagrant délit de recrutement de
jeunes pour le groupe terroriste et a été arrêté.
Un certain nombre
d’articles lus sur les médias, de postings affichés sur les réseaux sociaux et
de déclarations entendues dans les ondes audiovisuelles sont symptomatiques de cet
état d'esprit. Après les ignobles massacres de Beni, on a vu déferler des
appels à la démission des plus hautes autorités du pays assimilées on ne sait trop
sur quelle base aux terroristes auteurs de ces massacres lorsqu’elles ne sont
pas carrément présentées contre toute logique rationnelle comme des
planificateurs-promoteurs ou commanditaires desdits massacres. On se souvient que
lors des affrontements entre les forces de l'ordre et la milice du hors-la-loi du
chef Mpandi Kamwina Nsapu le vendredi 12 août 2016 à Tshimbulu au Kasaï-Central
qui ont coûté la vie à 19 compatriotes dont 11 policiers, les mêmes sources avaient
rué sur les brancards pour faire de la récupération, brocarder la Police
nationale et prendre pratiquement fait et cause pour les criminels au profit
desquels ils ont invoqué les droits de l'homme comme si les autres victimes notamment
les policiers tués par ces miliciens dans l'accomplissement de leur mission
n'étaient pas des humains et n'avaient pas de droits. Les propos tenus par un
activiste des droits de l'homme dans ces circonstances témoignent de cette
espèce de schizophrénie qui voudrait que les criminels soient encensés et que
les forces de l'ordre qui font usage de la légitime défense soient vilipendées.
Avec un ton martial, cet activiste avait dénoncé et fustigé ‘’l'usage de la
force par la riposte disproportionnée par le gouvernement rdcongolais" dans
son analyse de ces événements qui s’étaient soldés par la mort de 8 miliciens
et 11 policiers, de sorte qu’on est en droit de se demander de quel coté se
situait la « disproportion ». Aucun mot de compassion à l'endroit de
11 policiers qu'il s'est plutôt empressé de qualifier de "bourreaux’’.
Ce qui ressemble étrangement à un remake des propos déjà entendus au sujet de
l'opération Likofi.
Dans une
certaine presse qui ne s’embarrasse plus des principes déontologiques, on s’est
plu à étaler des images très choquantes contraires au respect dû aux morts et
dont on sait maintenant qu’elles n’ont rien à voir avec les événements en
question, et à y superposer des "unes" délibérément malveillantes qui
ne vont ni dans le sens du renforcement de la cohésion nationale, ni dans celui
de la culture de la paix dans notre pays.
D’autres
compatriotes s’amusent à alimenter la psychose à travers une logorrhée
sémantique belliqueuse. Pendant que le peuple congolais pleure et enterre ses
morts à Beni et à Kananga, un quarteron de politiciens en mal de visibilité n’a
pas trouvé mieux que de diffuser aux quatre vents des déclarations incendiaires
mêlant provocations, défis et menaces. Lundi 15 août, un tabloïd Kinois n'a pas
hésité à relayer à sa « une » la déclaration du responsable d'une
plate-forme de l'opposition affirmant le plus sérieusement du monde qu'en cas
de non convocation du corps électoral le 19 septembre prochain, lui et ses amis
exigeraient la démission et l'arrestation du staff de la CENI.
On peut se
demander si cette terminologie martiale ne participe pas d'une intention
délibérée de mise à mort de la République surtout lorsque la même déclaration
fourre-tout va jusqu'à contester une décision souveraine de non prorogation
d'un visa en faveur d'un individu ressortissant étranger par les services
congolais de l’immigration ou pire à remettre en cause les prérogatives de la
Cour Constitutionnelle, flagellée pour avoir prononcé un arrêt en interprétation
de la Loi fondamentale ou du Chef de l'Etat à qui il est tout simplement dénié
le droit de prendre la décision de rétablir des relations diplomatiques normales
avec un Etat voisin conformément à ses prérogatives constitutionnelles au motif
que son mandat arrive bientôt à son terme. De telles pratiques sont
inadmissibles lorsqu'on proclame dans le même temps sa foi en l'avènement d'un
État de droit démocratique.
Cette façon
de dire une chose et son contraire revient en fait à se moquer du peuple de ce
pays.
DIALOGUE : RAISON D’ETAT
Aujourd’hui,
beaucoup plus qu’hier, le dialogue national inclusif suggéré par le Président
de la République comme un lieu de rupture avec tout ce qui compromet la
fiablilité et le caractère pacifique de nos cycles électoraux et qui entache
ceux-ci de violences inqualifiables a fini par arracher l’assentiment de tous
les Congolais de bonne foi.
Force est de
constater qu’il existe une conspiration contre ce seul schéma rationnel de
sortie de crise. Des adeptes du chaos s’activent depuis quelques mois pour
empêcher par tous les moyens possibles les Congolais de régler leurs différends
grâce à la thérapeutique pacifique du dialogue.
Ce projet
diabolique vise à laisser pourrir la situation jusqu’à ce que les clans
adverses, n’ayant pas su arrondir à temps les angles, puissent s’affronter dans
un bain de sang que des forces politiques dépourvues de scrupules rêvent de
ramasser le pouvoir suprême dans les décombres du chaos ainsi occasionné. Si
l’on considère les gigantesques manifestations de l’opposition et de la
majorité à la fin du mois de juillet passé, on peut aisément se faire une idée
du carnage qui pourrait survenir si les partisans des deux camps venaient à en
découdre.
En réalité,
les Congolais qui pensent comme le gouvernement qu’une mort de plus pour les
ambitions politiques démesurées des uns et des autres est une mort de trop sont
plus que majoritaires. Endeuillé depuis près de deux décennies, notre peuple à
travers la quasi-totalité de ses composantes a fait le choix d’épargner à la
nation de nouveaux épisodes macabres en souscrivant au dialogue politique
national inclusif.
Il est
regrettable de constater que certains acteurs parmi les plus célèbres
s’autorisent à marcher à reculons en crachant sur ledit dialogue qu’ils étaient
les premiers à présenter comme l’unique solution aux problèmes des élections
qui se profilent à l’horizon.
Beaucoup
avaient du mal à comprendre le rétropédalage d’une icône de l’opposition, qui
nous avait jusqu’ici habitués à respecter mordicus ses engagements, par rapport
à tout le bien du dialogue qu’il répétait à qui voulait l’entendre. Depuis la
semaine dernière, la presse d’investigation nous a gratifiés des révélations
scabreuses sur un pacte contre nature entre ce leader pourtant partisan de la
non-violence et les promoteurs du schéma du chaos dont la majorité des
Congolais se détournent.
Quoi qu’il en
soit, nous continuons à croire que tous les Congolais qui aiment réellement
leur pays vont se rallier à cette solution idéale finir et prioriser l’intérêt
supérieur de la nation qui rime avec le dialogue politique national inclusif,
surtout après les bons offices de la communauté internationale, de la société
civile, de la CENCO.
Je vais
terminer cette communication par une citation que je voudrais, au nom du
Gouvernement dédier aux fétichistes des dates ; une citation tirée des
enseignements de la sagesse africaine telle que rappelée par le grand leader
sud africain Nelson Mandela d’heureuse mémoire : « Si vous ne
pouvez pas courir, marcher, si vous ne pouvez pas marcher, rampez mais
avancez » vers la paix, la concorde sans lesquels il n’y a point de
développement possible.
Lambert
MENDE OMALANGA
Ministre
de la Communication et Médias
Porte-parole
du Gouvernement